Transports - Libéralisation des TER : le Cese pour une expérimentation progressive et encadrée
Pour élaborer son avis sur l'ouverture à la concurrence des services ferroviaires régionaux de voyageurs, voté le 27 juin, le Cese a mobilisé deux de ses sections, celle de l'aménagement durable des territoires et celle du travail et de l'emploi, étant donné la forte dimension sociale du dossier. Le texte adopté, qui fait une centaine de pages, rappelle en premier lieu les échéances. Selon le règlement Obligations de service public (OSP), l'obligation de rendre possible pour les autorités compétentes, une ouverture à la concurrence du transport ferroviaire régional de voyageurs, est fixée à décembre 2019. "Il convient donc de s'y préparer sans attendre, d'autant qu'est prévue la publication prochaine du quatrième paquet ferroviaire par la Commission européenne", motive l'avis. Ce texte n'est cependant pas encore écrit et la France sera partie prenante de son adoption. "Mais prenons garde car on a un certain passif en termes de mauvaise préparation. L'ouverture à la concurrence du fret ferroviaire, tardive et insuffisamment préparée, a par exemple fragilisé ce secteur", insiste Thierry Lepaon, co-rapporteur de l'avis.
Relever de nouveaux défis
Mais quels nouveaux défis se posent au TER ? "Sa régionalisation a accompagné son essor, remarquable au vu du trafic qui a crû de 40 % de 2002 à 2010. Les régions ont beaucoup investi, y compris dans l'achat de matériels. A l'heure actuelle, les régions font face à des difficultés financières. Le défi est de poursuivre le développement du réseau et de renforcer certains services comme l'intermodalité", répond Jean-Marie Geveaux, co-rapporteur et président du conseil général de la Sarthe. En ce sens, le Cese recommande une évolution progressive et maîtrisée pour maintenir et amplifier le succès de la régionalisation des TER et non pas les fragiliser.
S'il y a ouverture à la concurrence, sachant que la décision revient à l'Etat, le Cese préconise l'instauration d'une phase d'expérimentation début 2015. "Fondée sur le volontariat régional, elle pourrait être proposée à trois ou six régions via un appel à projets accompagnée d'une subvention de l'Etat pour le financement des étapes de préparation", ajoute Jean-Marie Geveaux. D'ici là, trois ans ne semblent pas de trop car l'un des préalables nécessaires à l'expérimentation est l'adoption d'un ensemble complet de mesures juridiques et techniques. "Il faudra notamment changer la Loti [loi d'orientation des transports intérieurs]", cite Jean-Marie Geveaux. Autre préalable réclamé par le Cese : que la SNCF soit plus transparente sur ses comptes liés au TER.
Les conditions de l'expérimentation
Quant à l'expérimentation, elle devra être "progressive et encadrée" et s'effectuer non sur une région entière mais sur un allotissement par groupe de lignes cohérent et équilibré de taille moyenne. Avec quel matériel ? Sur ce point et en cas d'allotissement, le Cese propose que soit transférée aux régions la propriété des matériels TER qu'elles ont en grande partie contribué à financer, et ce moyennant une "juste indemnisation pour la SNCF". Sur la méthode, le Cese recommande avant tout la mise en place dès l'an prochain d'un comité national de pilotage de l'expérimentation rassemblant l'ensemble des parties prenantes (Etat, régions, partenaires sociaux, usagers). Et de miser sur la négociation et le dialogue social. "Un cadre social commun à tous les opérateurs apparaît comme un moyen de lutter contre les distorsions de concurrence et d'éviter les risques de dumping social et environnemental", expliquent les rapporteurs. Enfin, il faudra évaluer en continu les résultats des expérimentations régionales et donner, au sein de la SNCF, la priorité au reclassement interne en cas de pertes de marché.