Transports - La SNCF imagine le TER à l'horizon 2030
La SNCF a rendu publics le 17 juin les résultats d'un travail prospectif mené depuis octobre dernier avec des élus, des experts du ferroviaire et du transport routier ainsi que des universitaires sur le TER en 2030. "Nous sommes partis d'une question simple, a expliqué Guillaume Pépy, président de la SNCF : si le trafic continue à progresser de 6,5% comme aujourd'hui, comment allons-nous répondre à une demande qui aura quadruplé à l'horizon 2030 ?" Avec la hausse des prix des carburants et les décisions du Grenelle de l'Environnement, le TER ne peut que bénéficier d'un contexte favorable aux transports collectifs. Mais le défi est de taille pour la SNCF : le trafic régional est déjà bien souvent au bord de la saturation tandis que le réseau ferré souffre d'un manque d'investissements, comme l'a souligné un rapport récent de la Cour des Comptes.
En travaillant sur les questions clés qui structurent l'offre TER - comment augmenter la capacité des lignes ? Comment assurer un service fiable et de qualité avec quatre fois plus de trafic ? Comment faire des gares de véritables pôles d'échanges ? - le groupe de réflexion a retenu plusieurs grands axes d'amélioration.
Côté infrastructure, il n'est pas question de construire de nouvelles voies pour faire face à l'accroissement de la demande mais de mieux utiliser le réseau existant. Le groupe de travail suggère que RFF, autorités organisatrices et SNCF élaborent ensemble un schéma directeur des priorités d'aménagement permettant par exemple d'identifier les points les plus difficiles du réseau ou les gares à aménager en priorité. Il propose aussi à RFF de normaliser les hauteurs de quai en les ramenant d'une trentaine aujourd'hui à seulement deux à l'horizon 2030, ce qui permettrait de faciliter l'accès au train.
Pour améliorer le matériel, financé par les régions depuis 2002, la SNCF propose de lancer un programme de recherche. La nouvelle génération de trains devrait être plus fiable, plus performante et plus économique. "L'utilisation de matériaux composites peut permettre d'avoir des trains 20% moins lourds et de réaliser ainsi des économies d'énergie, résume Jean-Pierre Farandou, directeur général délégué de SNCF Proximités, en charge des TER. Nous avons aussi besoin d'améliorer la performance des trains à l'accélération et au freinage pour qu'ils arrivent et repartent plus vite".
Autre piste de progrès : les modes d'exploitation. La SNCF propose de travailler avec RFF sur un système d'exploitation des trains plus performant en zones denses, qui autorise un débit de ligne plus important. Elle compte aussi revoir en profondeur l'organisation de l'exploitation, avec des lieux de remisage des trains plus éloignés des gares et l'abandon des gares terminus.
Le groupe de réflexion s'est aussi penché sur le devenir des 3.000 gares ou haltes TER en France qui ont toutes besoin de s'adapter pour devenir de véritables pôles d'échanges intégrés à la ville. La SNCF propose de lancer au premier semestre 2009 un appel à projets pour réaliser avec des régions volontaires une gare pilote qui permettrait de tester en grandeur nature des solutions innovantes en termes de services, de signalétique, de gestion des flux, d'accessibilité, etc.
Les régions pour une extension du versement transport
Alors que les TER affichent aujourd'hui un taux d'occupation moyen de 20%, la SNCF entend proposer aux autorités organisatrices d'élaborer une nouvelle tarification, qui permettrait une meilleure répartition des voyageurs sur l'ensemble des trains. Elle compte aussi développer des services facilitant la multimodalité. D'ici deux ans, elle prévoit d'offrir une plateforme unique d'information multimodale par mobile qui permettra d'accéder en temps réel à une information fiable sur toute la chaîne de son voyage, tous modes de transport confondus.
Au nom des régions, Bernard Soulage, vice-président du conseil régional Rhône-Alpes délégué aux transports, déplacements et infrastructures, a salué le travail prospectif mené par la SNCF. Selon lui, les régions doivent mener de front quatre grands chantiers : appeler l'Etat et RFF à agir pour faire du réseau ferroviaire classique une priorité, le propriétaire des infrastructures devant entretenir lui-même le réseau ; mobiliser les acteurs locaux dans les agglomérations autour de projets communs de services de transport coordonnés ; concevoir les gares régionales de demain (aménagements favorisant l'accès aux piétons, modes doux et transports en commun, penser les gares comme des lieux de services au cœur des villes) et travailler à la refonte du financement des services ferroviaires. "Sans un versement transport étendu, on ne pourra pas financer le développement du ferroviaire", estime-t-il. Il faut aussi, selon Bernard Soulage, que la SNCF améliore très vite la qualité et la fiabilité des services TER et propose des solutions innovantes, sur le plan technique comme sur celui de la billetique, de la tarification, de l'accessibilité des gares et du marketing. "On est encore trop axé aujourd'hui sur les clients captifs. Il y a à faire un effort identique à celui mené sur le TGV pour attirer de nouveaux clients".
Anne Lenormand