Transports - Décentralisation des TER : dix ans après, un bilan plutôt positif
Les 7es Rencontres sur le transport régional ont réuni à Tours une centaine de participants. Des dix années qui se sont écoulées depuis le transfert de l’organisation du transport régional de voyageurs aux conseils régionaux, l’événement a permis de tirer des enseignements. "Le bilan est positif, il n’y a d’ailleurs plus grand monde pour le contester. Les régions ont fait le Grenelle de l’environnement avant l’heure en développant l’offre, en investissant dans le renouvellement du parc de matériel roulant, en contribuant au développement de l’intermodalité et en construisant des réponses adaptées avec les élus, les usagers et les associations", se satisfait Jean-Michel Bodin, organisateur de l’événement et vice-président du conseil régional du Centre chargé des transports. Sur le réseau de cette région, deux fois plus de voyageurs qu’avant transitent au quotidien. "On a conquis une nouvelle clientèle mais ce n’est pas une raison pour ne pas s’interroger sur ce qui a réellement marché, sur ce qui a été moteur de développement et sur les nouveaux enjeux qui se posent à nous", ajoute l’élu.
Le paysage actuel en termes de développement ferroviaire est marqué du sceau de la diversité. Selon lui, "d’une région à l’autre, par exemple entre le Limousin et Rhône-Alpes, les différences en termes de réseau, de développement ou de gestion sont marquées". Pour l'expliquer, retour aux premières heures du dispositif : "Des régions ont expérimenté plus tôt le transfert de compétence, d’autres n’ont pas tardé à suivre et d’autres enfin ont pris leur temps. Résultat, les acquis sont très différents". Il n’en reste pas moins qu’un besoin de coopération a émergé entre elles, qui s’accroît depuis, notamment sur le volet de la politique tarifaire. Pour permettre aux étudiants de circuler à moindre prix d’une région à l’autre, le Centre et les Pays-de-la-Loire travaillent ainsi main dans la main sur leurs grilles tarifaires. "Et une autre forme de coopération s’accentue entre les régions et les communautés d’agglomérations. On est tous parties liées dans cette affaire. Maintenons nos efforts car nos territoires ont besoin de cohérence", motive-t-il.
Lors d’une récente réunion de la commission d’enquête sur l’industrie ferroviaire, son rapporteur et député du Val-d’Oise, Yannick Paternotte, qui est intervenu à Tours durant ces rencontres, proposait une autre piste pour harmoniser les pratiques régionales, en standardisant mieux les modèles de TER en circulation. "Car trop de diversité nuit à la compétitivité", justifiait-il. En ce sens, les commandes groupées seraient-elles une solution ? "Si quinze régions décidaient de commander dix rames chacune, soit une commande non-négligeable de 150 rames, dans l’état actuel des choses cela ne serait pas possible en raison des seuils de passation de commande en vigueur, qui posent problème aux régions. Cela serait pourtant dans l’intérêt des constructeurs", regrette Jean-Michel Bodin. Aux membres de la commission d’enquête sur l’industrie ferroviaire présents à Tours, deux messages ont donc été transmis : il faut desserrer l’étau des modes de commande actuels et offrir aux régions la possibilité d’être plus parties prenantes dans la définition des matériels proposés par les industriels. "Pour répondre aux besoins des voyageurs, il faut des matériels toujours plus fiables, plus accessibles et plus souples d’usage", avance Jean-Michel Bodin.
Hostile au principe d’ouverture à la concurrence, un sujet qui n’a pas manqué de délier les langues à Tours, il y voit "un leurre, une forme de démagogie qui n’apportera rien de plus à l’usager et une manière de bousculer le système actuel alors qu’il a fait ses preuves". Enfin, à l’approche de la publication du "décret gares", il craint à terme un renchérissement du coût d’accès de celles-ci pour les régions. "On paie déjà pour l’utilisation des sillons, on ne va pas repayer en tant qu’utilisateurs des gares alors même qu’on a investi dans leur rénovation. Ce serait comme une double peine." Inquiet de voir que la SNCF, via sa filiale Gares & Connexions, considère "ces gares comme un lieu où il faut coûte que coûte développer des activités économiques", il préférerait que la gestion des déplacements demeure aux yeux de tous la priorité.