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Transports - Les régions plaident pour une industrie ferroviaire de proximité

"Les donneurs d’ordre et autorités organisatrices créent des moyens de transports pour satisfaire les besoins de mobilité mais, derrière cela, on oublie parfois qu'une filière industrielle à part entière existe et s'active." Le 15 mars, Jacques Auxiette, président de la commission Infrastructure et Transports de l'Association des régions de France (ARF) et président du conseil régional des Pays-de-la Loire, est intervenu sur la question devant une commission d'enquête sur la situation de l'industrie ferroviaire française créée par l'Assemblée nationale. L'ancien président du Groupement des autorités responsables de transport (Gart) a rappelé l'implication des régions dans ce secteur. "Elles ont contribué à sauver le rail en achetant massivement du matériel roulant, pour les TER bien sûr mais pas seulement. Sans d'ailleurs que cela contribue à augmenter vraiment l'offre, il s'agissait plutôt de remplacer du matériel vieillissant."
Pour soutenir l'innovation dans ce secteur, les régions ont un rôle à jouer en facilitant l'ancrage local de groupements d'entreprises spécialisées. "Mais au-delà des ressources disponibles pour financer les transports ferroviaires se pose la question du maintien dans le temps de ces ressources pour tenir les commandes de matériel roulant", a ajouté Jacques Auxiette. D'autant que la marge de manoeuvre des régions, dont il a souligné les problèmes d'autonomie fiscale, reste limitée. Pour construire des solutions de financement à long terme, il invite donc à une coopération plus étroite entre donneurs d'ordre et constructeurs. Côté fret, si les opérateurs ferroviaires de proximité peinent à voir le jour, il note qu'"au moins, plus aucune région ne néglige l'importance du fret".

Gares et ouverture à la concurrence

Face au peu d'entrain que manifestent les donneurs d'ordre pour accélérer l'ouverture à la concurrence, Yanick Paternotte, le député du Val-d'Oise à la tête de cette commission, s'interroge. En effet, à quoi bon tarder puisque cela semble desservir les constructeurs français ? Mais aussi les entreprises de services qui, comme Veolia, vont à l'étranger capter d'autres marchés plus ouverts ? Prudente riposte de Jacques Auxiette : "Sans dogmatisme de ma part, j'ai du mal à voir en quoi l'ouverture à la concurrence réglera des problèmes de fond. Démontrer qu'elle créerait des conditions favorables à l'industrie ferroviaire française n'est pas évident. Vu l'organisation actuelle, je crains même qu'elle entraîne des surcoûts significatifs pour les régions."
Auditionné le 16 mars par la même commission, Guillaume Pepy, président de la SNCF, a plaidé quant à lui pour "une ouverture à la concurrence saine et réalisée dans des conditions économiques et sociales les plus raisonnables possible". A l'approche de la publication du "décret gares" prévu en application de la loi sur l'organisation et la régulation des transports ferroviaires (ORTF), Jacques Auxiette a exigé qu'un "coup de pied dans la fourmilière" soit donné face au problème d'accueil et de services dans les gares. "Dans ce domaine, les marges de progrès en termes de management sont conséquentes".

Mieux piloter la filière

Guillaume Pepy souhaite aussi un meilleur pilotage de la filière. Dominée par Alstom et Bombardier côté constructeurs, et la SNCF côté exploitant (l'entreprise est la première cliente mondiale des deux premiers), la filière doit accroître sa compétitivité. "On est à un tournant : longtemps numéro 1 mondial sur le TGV, notre leadership est aujourd'hui disputé", insiste-il. Selon lui, il faut prendre le train de la mondialisation et conclure plus d'alliances au niveau européen. Jouer la carte France, la stratégie pays, comme le font également l'Allemagne et l'Espagne, c'est bien mais pour rester dans la course à l'international, "il faut être plus uni et fédérateur".
Autre préoccupation : les commandes, certes emblématiques mais réduites, de TGV ne drainent pas un modèle économique stable et pérenne. Rééquilibrer ce marché, redéfinir sa place et son usage est essentiel. Quant à l'entretien général des trains, du fait des nouvelles technologies qu'ils embarquent, "il coûte de plus en plus cher à l'inverse de ce qu'on a longtemps cru", a glissé Guillaume Pepy. Sans parler de l'entretien du réseau, vaste chantier où les travaux sont nombreux en ce moment, et pour lequel les plans de d'urgence de maintien de certaines lignes prévus avec Réseau ferré de France (RFF) seront prêts en avril. Le renouvellement des engins de fret, dont l'âge moyen est de 15-30 ans, suit aussi son cours. "Et les économies dégagées grâce au schéma directeur du fret seront réinvesties dans le réseau", assure Pierre Blayau, P-DG de Geodis, filiale de la SNCF.
Enfin, Yanick Paternotte a remarqué avec raison un autre souci d'harmonisation sur les TER, qui sont développés par chaque région en fonction des catalogues de constructeurs. "D'une région à l'autre, il est frappant d'observer l'absence complète de standardisation entre les solutions développées. C'est le règne des petites séries. Pour en finir avec cette quincaillerie, repartons des attentes des donneurs d'ordres et des usagers, car tant de diversité n'est pas source de compétitivité", a-t-il conclu.