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Sport - Les politiques sportives des collectivités sont à réinventer

Marqué par l'installation de l'Assemblée du sport, ce premier semestre 2011 dans le domaine des politiques sportives a été ponctué par plusieurs dossiers, dont celui des normes. Dans le même temps, on assiste à un recentrage des moyens publics sur le sport pour tous, on demande au sport de servir de nouveaux objectifs de cohésion sociale, la compétence sport des collectivités est questionnée, des diagnostics territoriaux sont attendus...

Le premier semestre 2011 dans le domaine des politiques sportives a incontestablement été marqué par l'installation de l'Assemblée du sport. Depuis l'extinction, fin 2007, du Conseil national des activités physiques et sportives (Cnaps), le mouvement sportif mais aussi les parties prenantes – au premier rang desquelles figurent les élus locaux – attendaient la création d'une institution fédératrice par laquelle ils pourraient dialoguer et peser sur les politiques nationales. L'Assemblée du sport sera-t-elle ce porte-voix tant attendu ? Seul l'avenir le dira. Son installation, en mars, puis la restitution des préconisations de travail des six groupes la composant, fin juin, ont toutefois donné lieu à un consensus assez large. La prochaine étape, qui va voir, en septembre, la mise en place d'une assemblée définitive au nombre de membres resserré et, surtout, la constitution d'un bureau – baptisé Conférence du sport – aux rendez-vous plus fréquents, donnera le ton. Pour assurer le rôle que notamment les élus locaux veulent lui voir tenir, cette nouvelle "gouvernance" devra bien évidemment s'emparer des dossiers les plus lourds y compris par exemple, le plus en amont possible, des réformes législatives.

Les normes, un dossier qui fâche

Le plus sensible des dossiers actuels est sans conteste celui des normes. Le rapport Doligé, où le sport a tenu une place de choix, ainsi que le bilan de la première année de fonctionnement de la Commission d'examen des règlements fédéraux relatifs aux équipements sportifs (Cerfres) ont alimenté un débat où, cette fois, élus locaux et fédérations sportives ne sont pas du tout sur la même longueur d'ondes. En témoigne la récente prise de position de l'Association des maires de grandes villes de France (AMGVF) qui souhaiterait limiter le pouvoir des fédérations par la voie législative. Les élus locaux, plus grands financeurs du sport derrière les familles et gestionnaires de 80% des équipements sportifs, ne supportent plus de se voir imposer des normes par des fédérations qui ne se coordonnent pas, mesurent mal les impacts financiers et, plus grave, privilégient des logiques commerciales au détriment du sport pour tous.

Recentrer les moyens sur le sport pour tous

Car en ces temps de restrictions budgétaires, les élus ont clairement fait le choix de consacrer leurs rares ressources à une pratique accessible au plus grand nombre. Pour eux, le sport doit servir de levier aux politiques de santé et de cohésion sociale. Ils prennent ainsi de plus en plus fréquemment leurs distances avec le sport professionnel, son coût et ses dérives. L'inauguration, en janvier, du stade du Mans, financé à 53% par le secteur privé, marque ainsi un tournant dans l'investissement des collectivités en faveur des grands équipements. Le recours aux partenariats public-privé (PPP) ira s'accentuant avec les constructions des stades-hôtes de l'Euro 2016 de football. Parmi les quatre nouvelles enceintes prévues, trois feront l'objet d'un PPP et une sera entièrement financée par le privé.

Des objectifs trop lourds à porter ?

Pour autant, le recentrage des moyens publics sur le sport pour tous ne garantit en rien d'atteindre les objectifs de santé et de cohésion sociale, rendus plus visibles encore par les nouveaux critères de subventionnement du Centre national pour le développement du sport (CNDS). D'importantes études ont montré ces derniers mois l'ampleur et la difficulté des défis à relever. Il ressort ainsi des travaux de l'Agence de l'éducation par le sport (Apels) que "les clubs sportifs ont du mal à se mettre dans une démarche d'innovation sociale", et d'un rapport du Sénat que la pratique sportive demeure largement inégalitaire entre hommes et femmes. Devant ces constats sans appel, on peut encore se demander si les attentes envers le sport dans le domaine social ne sont pas trop élevées. Et si leur extension au domaine de l'environnement ne finira pas par entraver le développement d'activités qui peinent déjà à subsister devant la baisse du nombre de bénévoles. Le lancement de la stratégie nationale de développement durable du sport, en mai, accentue en effet un peu plus la pression sur les clubs et les manifestations sportives. Là encore, les subventionnements vont être de plus en plus conditionnés au respect de normes et les petites structures pourraient se trouver fragilisées.

Quelles compétences pour les collectivités à l'horizon 2014 ?

Les cartes des politiques sportives semblent donc avoir été profondément rebattues. Le modèle français, marqué par une action centrée avant tout sur la compétition au sein de clubs soutenus par de puissantes fédérations nationales, elles-mêmes placées dans le giron du ministère des Sports, semble condamné. Le mouvement sportif, tiraillé entre ses missions traditionnelles et des injonctions politiques qui parfois le dépassent, va devoir trouver de nouveaux appuis. Le secteur privé a déjà pris ses marques dans le champ professionnel et dans un certain nombre de disciplines de loisir. Les collectivités devront très vite se positionner à leur tour. Si la réforme territoriale de 2010 fait du sport une compétence partagée, les collectivités doivent maintenant s'entendre pour définir des schémas régionaux d'organisation d'ici fin 2014. Or, de l'aveu même de Jacques Thouroude, président de l'Association nationale des élus en charge du sport (Andes), ce dossier est au point mort depuis le début de l'année. Pour les aider à y voir plus clair, le ministère des Sports, qui annonce depuis six mois sa volonté de prendre de la hauteur et de mettre en avant les acteurs locaux, travaille à la mise en place de diagnostics territoriaux approfondis. En attendant que ces outils soient opérationnels, il sera intéressant d'observer le devenir des huit centres régionaux d'éducation populaire et de sport (Creps, devenus depuis centres de ressources, d'expertise et de performance sportives) sortis du dispositif national entre 2009 et 2010 : friches sportives ou reprise en mains par leurs collectivités d'implantation au service d'une politique sportive territoriale qu'il reste à inventer ?

 

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