Police municipale - Armement, mutualisation et coopération au menu du livre blanc de l'Amif sur la sécurité
L'Association des maires d'Ile-de-France (Amif) a présenté le 28 février 2017 son livre blanc sur la sécurité en Ile-de-France. Le document, annoncé dès 2015, avance plusieurs propositions, comme développer la mutualisation des moyens au niveau intercommunal, mieux former les policiers municipaux et augmenter la coopération entre police municipale et police nationale. Il préconise aussi la création d'un fonds pour financer l'armement des policiers.
Il avait été annoncé dès 2015 mais reporté à plusieurs reprises. Finalement le livre blanc sur la sécurité réalisé par l'Association des maires d'Ile-de-France (Amif) a été présenté le 28 février 2017 par la commission sécurité-prévention de l'association, en pleine campagne pour l'élection présidentielle. "Nous souhaitons que les candidats prennent en compte la sécurité qui est la deuxième priorité des Français", a signalé Dominique Bailly, maire de Vaujours et vice-président de l'Amif.
Le livre a été élaboré dans un contexte difficile avec les attentats de ces dernières années, les violences en banlieues, et les missions élargies confiées aux policiers municipaux et aux maires dans le domaine de la sécurité. "Les préfectures se sont totalement appuyées sur les maires au moment des attentats, a expliqué Dominique Bailly, il faut s'adapter aux événements avec le personnel disponible."
Les policiers municipaux ont des missions traditionnelles de proximité (prévention) auxquelles se sont ajoutées des missions judiciaires (répression). Mais avec les événements récents, leurs missions ont fortement évolué pour se rapprocher toujours plus de celles des policiers nationaux. Pour exemple, dans le cadre la loi de sécurité publique du 28 février 2017, les policiers municipaux vont bénéficier du nouveau cadre sur l'usage des armes. Ils pourront aussi réaliser des palpations, au même titre que les agents de sécurité privée, lorsqu'ils sont affectés à la sécurité de manifestations sportives ou culturelles ou à la surveillance de l'accès à un bâtiment communal (écoles, mairies…).
Revalorisation de la fonction et formation
Pour répondre à cette évolution des missions et du cadre de travail, les maires d'Ile-de-France demandent que la fonction soit revalorisée, que le recrutement soit modifié, et que la formation prenne une place importante dans la carrière des policiers. "L'offre de formation actuelle connaît d'importantes lacunes ; les sessions de formation sont encore peu nombreuses", précise le livre blanc qui avance l'idée de créer une école nationale de la police municipale ou de faire évoluer l'école nationale de police, avec un tronc commun pour les policiers nationaux et municipaux et la gendarmerie, suivie d'une spécialisation dans une des trois filières.
Les maires d'Ile-de-France proposent aussi d'encourager et de généraliser la coopération entre police nationale et police municipale encore incomplète, en faisant signer les conventions de coordination par le procureur de la République. Ainsi en Essonne, le rapprochement entre les deux polices, nationale et municipale, s'est concrétisé à travers l'échange puis la mise en commun d'informations et la création du Centre d'information et de commandement de la police nationale (CIC) qui a contribué à une meilleure synergie entre les différents services.
Une mutualisation des moyens encore difficile
Par ailleurs, d'après l'Amif et face aux disparités qui persistent entre communes franciliennes, "l'intercommunalité peut être un échelon à investir". Le contexte du Grand Paris favorise ce mouvement et les nouvelles dispositions de la loi de sécurité publique encouragent le rapprochement des communes et la création de polices inter-municipales grâce à une mutualisation de personnels. Le partage d'agents de police municipale est ainsi maintenant ouvert sans maximum de taille (suppression du plafond fixé à moins de 20.000 habitants dès lors que l'ensemble des communes ne dépasse pas 80.000 habitants, au lieu de 50.000 précédemment). Mais ce mouvement de mutualisation, aux vertus positives d'après l'Amif, peine à prendre. "Nous sommes favorable à plus de mutualisation, mais les élus ne sont pas tous d'accord, c'est un sujet un peu sensible", a expliqué Dominique Bailly. Le souhait des maires de garder leur pouvoir de police mais aussi l'hétérogénéité des problématiques communales expliquent la réticence de certains élus. Il y a pourtant des initiatives en cours de mutualisation : entre Chatillon et Montrouge d'une part ou Pantin et le Prés-Saint-Gervais.
L'exemple de la communauté d'agglomération de la vallée de Montmorency (Cavam), qui a décidé dès 2005 de mutualiser les moyens des huit communes qui la composent pour lutter contre la délinquance et sécuriser l'espace public, montre les bienfaits d'une telle organisation. 97 fonctionnaires sont affectés à ces missions, 111 caméras numériques ont pu être installées sur le territoire.
Favoriser les financements croisés entre collectivités
L'Amif estime aussi qu'il faut favoriser les financements croisés entre collectivités, citant la l'Ile-de-France comme référence dans ce domaine. La région a distribué une aide à 31 communes en 2007 dans le cadre des violences urbaines de Villiers-le-Bel (95), pour la remise en état des équipements. L'exécutif actuel a voté un "bouclier sécurité" en janvier 2016. Les municipalités peuvent solliciter cette aide pour moderniser leur police. La subvention régionale est fixée à 30% maximum des équipements financés, 35% pour les territoires de zone de sécurité prioritaires (ZSP). 18 collectivités ont été soutenues à hauteur de 212.000 euros.
Alors que l'armement resurgit à la faveur de la campagne, l'Amif estime nécessaire de "réfléchir à la création d’un fonds spécifique pour l’armement et la protection des policiers municipaux". "La mise sur pied de ce fonds assurerait une égalité pour l’ensemble des communes tout en permettant à l’État d’assurer sa mission régalienne", poursuit-elle. "Dans cet esprit, une politique de prise en charge totale de l’armement de la police municipale doit être également envisagée." L'association plaide aussi pour une réévaluation des crédits du FIPD (Fonds interministériel de prévention de la délinquance) consacré à la videoprotection.
L'Amif compte présenter prochainement son livre blanc à Bruno Le Roux, ministre de l'Intérieur.