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Dépendance - Une année décisive pour le cinquième risque

En matière sociale, l'année 2008 aura été celle du RSA. 2009 pourrait bien être celle du cinquième risque. Le dossier connaît en effet, depuis plusieurs mois, une phase de maturation qui doit déboucher sur des décisions au début de 2009. Lancée par Xavier Bertrand le 21 mars dernier, la phase de concertation avec les partenaires sociaux et les différents acteurs concernés - menée dans une très grande discrétion - s'est en effet achevée le 22 décembre. Au printemps dernier, le ministre du Travail envisageait une création de la cinquième branche en "janvier 2009". Si cette date est évidemment dépassée, Xavier Bertrand souhaite néanmoins présenter lui-même les orientations retenues, avant son départ pour le secrétariat général de l'UMP qui doit intervenir avant la fin du mois de janvier.
Le nouveau calendrier envisagé par le gouvernement prévoirait donc une présentation du projet de loi en Conseil des ministres au premier trimestre 2009 et un examen du texte par le Parlement au premier semestre. Ceci permettrait de respecter l'engagement de Nicolas Sarkozy d'une mise en place effective du cinquième risque en 2010. Sur le fond, le projet s'inspire très largement des travaux de la mission commune d'information sur la prise en charge de la dépendance et la création du cinquième risque, présidée par Philippe Marini. Celle-ci s'appuie notamment sur une série d'auditions, parallèles à la concertation menée par le gouvernement, et sur plusieurs déplacements à l'étranger (Angleterre, Allemagne, Etats-Unis...) afin de tirer le meilleur parti des dispositifs mis en place par les principaux pays développés. La phase de réflexion et de concertation devrait donc déboucher sur la mise en place d'une prestation unique dégressive, calculée à la fois en fonction du revenu et de la perte d'autonomie. Celle-ci aurait vocation à se substituer à plusieurs aides existantes, dont notamment l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), voire la prestation de compensation du handicap (PCH). Ce nouveau mécanisme permettrait de mieux prendre en compte la situation des classes moyennes, défavorisées par les mécanismes actuels en matière de maintien à domicile des personnes âgées. Elles ne peuvent en effet prétendre aux prestations soumises à conditions de ressources - qui bénéficient surtout aux personnes à très faibles revenus -, tout en ne tirant qu'un avantage limité des déductions fiscales en faveur de l'emploi à domicile, qui profitent en revanche aux ménages les plus favorisés. Compte tenu des enjeux financiers - la prise en charge de la dépendance est évalué à 19 milliards d'euros, dont 5 milliards pour la seule APA -, le positionnement du curseur sera donc essentiel et devrait donner lieu à des débats serrés.

 

Des sujets qui fâchent

Autre sujet délicat : la participation des bénéficiaires au dispositif. Si le mot de "récupération sur succession" est tabou, l'idée d'une participation financière est loin d'être abandonnée. Sur ce point, le gouvernement devrait reprendre la suggestion formulée en juillet dernier par la mission d'information du Sénat : la mise en place d'un système de "gage volontaire" sur le patrimoine. Les bénéficiaires disposant d'un patrimoine supérieur à un certain seuil (le chiffre de 200.000 euros est envisagé) se verraient ainsi proposer un choix : percevoir la nouvelle allocation unique à taux plein mais avec une prise de gage qui serait liquidée sur leur succession (autrement dit une récupération sur succession), ou ne percevoir qu'une allocation à taux réduit, mais sans récupération ultérieure. Selon les calculs de Philippe Vasselle, ce mécanisme, appliqué au seul périmètre actuel de l'APA, pourrait rapporter 800 millions d'euros à l'horizon 2012. Parmi les possibles points de frictions figurent également la place des départements dans le financement et la gouvernance du cinquième risque. La mission d'information du Sénat préconise pour sa part un partage à parité entre l'Etat (y compris l'assurance maladie) et les départements, ainsi qu'une modification des critères de péréquation pour la répartition des financements de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA).
D'autres sujets devraient se révéler plus consensuels, comme le développement parallèle de systèmes de prévoyance, afin de compléter l'allocation unique. La possibilité de convertir sans pénalité des contrats d'assurance vie en contrats d'assurance dépendance ou la déductibilité fiscale des cotisations complémentaires dépendance sur un contrat épargne retraite (sur le modèle du PERP) figurent parmi les pistes envisagées. Ici aussi, la question du coût devrait être décisive.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Le projet de loi HPST se prépare à entrer en scène

Présenté au Conseil des ministres du 22 octobre, le projet de loi "Hôpital, patients, santé et territoires" (HPST) doit être adopté avant la fin du premier semestre 2009, pour une mise en oeuvre au 1er janvier 2010. Ce texte ambitieux, qui entend constituer "un projet de santé durable pour nos concitoyens", intéresse très directement les collectivités à travers plusieurs dispositions, comme la création des communautés hospitalières de territoire, la gouvernance des établissements de soins (avec un recul du rôle des conseils d'administration), la permanence des soins ou la création des agences régionales de santé (ARS). Les petites villes devraient être particulièrement vigilantes sur le sort réservé aux hôpitaux locaux, tandis que les régions s'intéresseront à leur place dans les instances mises en place ou sein ou autour de l'ARS et les départements à l'articulation entre le secteur sanitaire et le secteur social.
Le projet de loi HPST a reçu un accueil plutôt favorable et pouvait donc espérer un parcours parlementaire plus paisible que d'autres textes récents. La situation pourrait toutefois évoluer dans les prochaines semaines, avec la montée en puissance d'un front commun "anti-ARS", qui s'inquiète des pouvoirs considérables confiés aux futures agences et de l'"étatisation rampante" de la protection sociale. Porté notamment par les économistes de la santé, ce mouvement pourrait trouver un relais intéressé auprès des départements - inquiets de l'empiètement des ARS sur leurs compétences en matière sociale - et de la Sécurité sociale, qui cache à peine son hostilité à cet aspect du projet de loi.

 

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