Mobilité - Transports : l'année de tous les chantiers
"Rebattre les cartes et rétablir un système ferroviaire à bout de souffle". Depuis sa nomination au poste de ministre délégué chargé des Transports, Frédéric Cuvillier ne cesse de marteler ce message. Sans taire la nécessité d'un profond désendettement du rail. En 2013, l'effort de réduction de la dette restera donc sur toutes les lèvres. "Ce sera bien la priorité", confirmait lors de sa première audition parlementaire Jacques Rapoport, le nouveau président de Réseau ferré de France (RFF), un établissement plombé par une dette de 30 milliards d'euros. La priorité ira à l'entretien des réseaux existants et à l'amélioration du service plutôt qu'au lancement de nouvelles infrastructures. Ainsi, le renouvellement du matériel roulant a été acté par l'Agence de financement des infrastructures de France (Afitf) pour les trains d'équilibre du territoire (Intercités, Corail, Téoz, Luna). Réforme du rail oblige, l'année sera propice aux rapprochements. La création d'un gestionnaire d'infrastructures ferroviaires intégrant RFF et rattaché à la SNCF au sein d'un pôle public unifié accélère déjà les échanges. Un premier projet de schéma d'organisation et de mise en place de ce gestionnaire d'infrastructure intégré est attendu en début d'année. S'esquissent ainsi de nouveaux modes de collaboration et un dialogue à réinventer. Un léger remodelage, également, de certaines instances, comme en atteste la récente ouverture du conseil d'administration de RFF aux régions ou celle du think tank TDIE à des acteurs comme Voies navigables de France (VNF). Avec la montée en force de l'intermodalité se nouent, en outre, des alliances d'un nouveau genre avec les collectivités. Exemple : le partenariat signé à la mi-septembre entre Gares & Connexions (branche de la SNCF) et le conseil général de Seine-et-Marne afin de "développer l'interaction entre la gare de demain et son territoire". S'il s'avère pertinent, ce type d'entente sera renouvelé dans d'autres départements.
Montée au créneau des collectivités
Des départements qui - ils l'ont rappelé il y a un mois à l'occasion d'une rencontre interdépartementale (voir notre article) - auront dans l'année leur mot à dire en matière de mobilité et pas seulement pour les réseaux de bus... Les régions affûtent aussi leurs positions. On le sait : ces dix dernières années, elles se sont largement impliquées dans le sauvetage des TER. Mais les choses restent à améliorer sur ces réseaux régionaux. Dernièrement, elles sont montées au créneau par la voix de certains élus, comme Jean-Jack Queyranne, président de la région Rhône-Alpes, au sujet de l'avant-projet de loi sur la décentralisation, qui reste à ce stade un document de travail. Les conseils régionaux surveilleront de près son avancement car il contient des dispositions les concernant. Dans chacune d'elles, il est ainsi question de créer un "syndicat régional de transport regroupant la région, les départements situés sur le territoire régional et les autorités organisatrices de la mobilité durable situées sur ce même territoire". Mais attention, seules les AO de plus de 100.000 habitants devraient être concernées.... A suivre également, le chantier que la Picardie s'apprête à mener pour remettre à plat la répartition des missions entre la partie qu'elle gère, c'est-à-dire les TER, et celle que gère l'Etat, les trains d'équilibre du territoire (TET). Ce travail sera une première et, au vu des crispations actuelles sur le sujet, il devrait faire des émules.
L'année des 1.000 chantiers
Les travaux sur le réseau seront nombreux : un millier de chantiers prévus en 2013. Les investissements ne ralentiront donc pas tant que cela : dans l'Ouest de la France, les travaux de construction de la ligne à grande vitesse Le Mans-Rennes iront bon train. De même en Ile-de-France. "Deux nouveaux tramways fraîchement inaugurés, des prolongations de lignes comme celle d'Eole à l'ouest, les prémices du chantier du Grand Paris Express : on perçoit enfin les effets de ces lourds investissements, avec un réseau de transports qui va être modifié en profondeur", soulignait lors de sa dernière audition parlementaire Jean-Paul Huchon, président de la région Ile-de-France. Sur le plan national, c'est à une commission pilotée par un élu, le député-maire de Caen Philippe Duron, par ailleurs président de l'Afitf, que revient la lourde charge de hiérarchiser les projets inscrits au Schéma national des infrastructures de transport (Snit). Les conclusions sont attendues au printemps. "Les travaux avancent bien mais, par devoir de réserve, nous ne pouvons en dire plus", consent à dire André Chassaigne, député du Puy-de-Dôme et membre de cette commission baptisée Mobilité 21. Son but est aussi d'explorer de nouvelles sources de financement. Le produit de l'écotaxe sur les poids lourds circulant sur le réseau routier non concédé, qui doit entrer en vigueur en juillet 2013, devrait à nouveau faire débat. Pour Mireille Schurch par exemple, sénatrice de l'Allier, son produit devrait revenir exclusivement aux projets ferroviaires. Mais pour l'heure, la balle est dans le camp du gouvernement, qui a promis de revoir l'ensemble du dispositif à travers un projet de loi qu'il reste à déposer. Côté poids lourds également, l'autorisation de circulation à 44 tonnes pour les véhicules de plus de quatre essieux, applicable au 1er janvier 2013, suscite des réactions variées, voire des réserves même de la part de certains professionnels.
Réveil du fret et transports urbains
Côté fret fluvial, tous les yeux restent braqués sur le projet canal Seine-Nord, pour lequel tout ne semble pas réglé et qui fait l'objet d'un dialogue compétitif en cours. Même si le fret ferroviaire accuse un retard certain, les choses bougent : lancement d'une troisième autoroute ferroviaire sur l'axe atlantique, création d'opérateurs ferroviaires de proximité dont l'un attendu en Midi-Pyrénées… Sans oublier la liaison Lyon-Turin, actée elle aussi au plus haut niveau et qui comportera à terme une part de fret. Enfin, côté transports collectifs urbains, un troisième appel à projets pour les transports en commun en site propre (TCSP) rythmera ce prochain début d'année. Très attendu par les collectivités, notamment des villes moyennes, qui ne manquent pas de projets à financer, son enveloppe n'a pas été pas officiellement dévoilée mais pourrait être comprise entre 400 et 450 millions d'euros, pour une quarantaine de projets de TCSP, dont des téléphériques urbains.