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Cice du 6 mars 2015 - Les HLM demandent le retour de l'Etat dans les quartiers

L'Union sociale pour l'habitat a formulé une série de propositions à l'attention du gouvernement en vue du comité interministériel à la citoyenneté et à l'égalité (Cice) qui se tiendra ce jour, vendredi 6 mars. Les suggestions du mouvement HLM portent plus spécifiquement sur le thème de la politique de peuplement et vont pour la plupart dans le sens d'un retour de l'Etat dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Un quart du patrimoine des organismes HLM est localisé dans ces quartiers.

Comme tout le monde, le mouvement HLM souhaite l'application des politiques de droit commun dans les quartiers, qu'elles viennent des collectivités ou de l'Etat. A l'Etat, il demande de "s'engager à garantir l'égalité d'accès et de qualité aux services urbains, aux transports en commun, à l'éducation et au droit à la sécurité et à la tranquillité". Plus généralement, la nécessité d'une présence plus forte de l'Etat dans les quartiers prioritaires constitue le fil rouge de la contribution de l'Union sociale pour l'habitat (USH) au comité interministériel à la citoyenneté et à l'égalité (Cice) qui se tiendra ce jour, vendredi 6 mars, à Matignon.

Des "OIN-quartiers" ?

L'USH propose ainsi à l'Etat d'expérimenter une procédure spécifique de type opération d'intérêt national (OIN) dans la "cinquantaine" de quartiers "en difficulté extrême de fonctionnement", ceux qui "connaissent un niveau de criminalité gravement nuisible à la vie quotidienne des habitants, rendant difficile ou dangereux le travail des agents de proximité". Jean-Louis Dumont, président de l'USH, a cité comme exemple le quartier de la Castellane, à Marseille.
Cette procédure "OIN-quartier" serait, dans l'esprit de l'USH, dotée de moyens "exceptionnels" pour "mener de front un projet sur l'emploi, l'éducation, le désenclavement et les conditions de rétablissement des conditions de sécurité". Un opérateur unique assurerait "une mission globale sur l'urbain et le social". Le pilotage serait resserré autour du préfet et du président de l'intercommunalité. Avant généralisation, l'USH propose d'expérimenter les "OIN-quartiers" sur deux ou trois sites.

Les reconstructions Anru en Ile-de-France dans les mains du préfet

L'Union sociale pour l'habitat demande, dans le cadre du nouveau programme de renouvellement urbain (NPNRU), que l'Etat et les préfets s'engagent pour que la totalité des logements démolis soient reconstruits non seulement hors site, mais aussi hors des quartiers et des communes présentant déjà une forte proportion de logements sociaux. Histoire de ne pas répéter les erreurs du passé. "En Ile-de-France, sur les 37.000 logements reconstruits dans le cadre du premier programme de rénovation urbaine, seulement 3.000 logements ont été reconstruits en dehors des communes de démolition", s'insurge Frédéric Paul, délégué général de l'USH.
Justement, en Ile-de-France comme ailleurs, pour parvenir à davantage de mixité sociale, l'USH rappelle qu'il faut "sortir du périmètre de la commune". Alors, en attendant la mise en place de la métropole du Grand Paris, elle propose un dispositif intermédiaire qui serait piloté par l'Etat. Le préfet de région Ile-de-France imposerait non seulement la répartition des reconstructions, mais aussi la répartition des personnes à reloger du fait de la démolition de leur logement.
L'USH souhaite ardemment que l'Anru dispose d'une feuille de route exigeante en matière d'habitat pour les futurs projets de renouvellement urbain. Elle propose par exemple que les reconstructions comprennent une part de grands logements familiaux (que les constructions récentes ont eu tendance à oublier), une part de logements très sociaux (un quota de 60% de PLAI est suggéré), et qu'ils soient si possible situés à proximité des transports en commun et des services. L'accession sociale sécurisée pourrait être davantage valorisée en devenant l'"outil principal d'ancrage des catégories populaires ayant une situation stable".

Loi SRU : que les préfets délèguent leur droit de préemption aux HLM !

L'USH ne souhaite pas revenir sur le quota de logements sociaux à imposer aux communes dans le cadre de l'article 55 de la loi SRU : 20% ou 25%, ce n'est pas, selon elle, la question. Elle demande en revanche "le renforcement des conditions de mise en œuvre de la loi". Elle aimerait que les préfets exercent réellement leur droit de préemption urbain dans les communes carencées non seulement sur le foncier, mais aussi sur les logements du parc privé mis en vente. Ou qu'ils le délèguent à des organismes HLM. Ils sont preneurs, assure l'USH. Ils seraient en effet volontaires pour se porter acquéreurs - avec le concours de la Caisse des Dépôts - de logements dans le parc privé. N'étant pas outillé pour gérer des logements en diffus, ils en confieraient la gestion à des partenaires associatifs qui accueillent des familles précaires, de type Solibail.

Des quotas APL dans les immeubles HLM ?

Pour élaborer une véritable politique de peuplement, le préalable est de savoir d'où l'on part. L'USH propose donc la mise en place d'indicateurs d'occupation sociale de son patrimoine à l'échelle de chaque immeuble, par exemple basés sur le taux de ménages disposant de l'APL. Objectif : "mettre en évidence les capacités d'accueil et de prévenir les dysfonctionnements sociaux". Mais aussi : "optimiser le travail des commissions d'attribution, dans lesquelles siègent d'ores et déjà les représentants des organismes, les représentants des locataires, des collectivités locales et de l'Etat", explique-t-elle. Il s'agit de donner des billes à la constitution d'une réelle "gestion collective de la demande de logement HLM" au sein de laquelle le préfet aurait instruction claire de favoriser la mixité sociale à l'échelle de chaque immeuble. Et pourquoi pas, un jour, imposer des quotas de ménages bénéficiant de l'APL à l'échelle des immeubles : réduire la part de ménages APL là où aujourd'hui il y en a beaucoup et, inversement, en augmenter la part dans les immeubles majoritairement peuplés de ménages plus favorisés.

"Trop de bailleurs sociaux..."

Une réponse notamment à François Hollande qui, lors de sa conférence de presse du 5 février au cours de laquelle il avait donné des orientations du futur comité interministériel, avait annoncé que "les bailleurs sociaux seront mis devant leurs responsabilités", observant que "trop de bailleurs sociaux s'arrangent pour que ce soit toujours dans les mêmes endroits qu'on mette les populations les plus difficiles" (voir notre article ci-contre du 5 février 2015).
Plus généralement, "le mouvement HLM est volontaire pour mener sans aucune concession toutes les politiques de rééquilibrage et de mixité sociale qui s'imposent", assure aujourd'hui l'USH, rappelant au passage "que l'action des organismes HLM s'inscrit dans le cadre de partenariat avec les élus locaux, avec l'Etat et les réservataires".
Au cours de cette conférence de presse, le président de la République avait également déclaré qu'il y avait "trop de bailleurs" et souhaitait qu'un "travail de simplification et de réduction" soit engagé dans le mouvement HLM. C'est vrai pour certains territoires, concède l'USH, citant Evry-Courcouronnes, Noisy-le-Grand et Plaine Commune. Dès lors, "un remembrement des patrimoines" lui semble "nécessaire". Mais à l'inverse, elle pointe l'existence de grands quartiers mono-bailleur "concernés par des processus marqués de ségrégation", comme la Grande Borne à Grigny dont les 3.000 logements sociaux sont gérés par l'Opievoy. Dans ce cas, ne faudrait-il pas "envisager de diversifier les bailleurs pour répartir les efforts, introduire de nouvelles identités résidentielles, créer de l'émulation... ?", interroge l'USH.

Valérie Liquet

Le Cice du 6 mars promet "la République en actes"

Le comité interministériel de ce 6 mars abordera bien les quatre thèmes énoncés par le porte-parole du gouvernement, Stéphane le Foll, à la sortie du conseil des ministres du 11 février dernier. A savoir : la politique de citoyenneté, la politique de peuplement, l'éducation et l'activité économique. Ces thèmes seront finalement classés en trois chapitres : "Vivre la République", "La République pour tous" et "La République au quotidien". Et le comité sera intitulé "comité interministériel à la citoyenneté et à l'égalité, la République en actes".
Le chapitre "Vivre la République" comportera des mesures sur les lieux et les symboles de la République (création de la "réserve citoyenne", service civique "universel", rites républicains...) ; la laïcité ; la langue française ; la culture et le sport.
Le chapitre "La République pour tous" abordera les thèmes de l'égalité homme/femme ; la lutte contre les discriminations (y compris dans la fonction publique) ; le numérique "pour tous".
Le chapitre "La République au quotidien" se déclinera en quatre fonctions : habiter (politique de peuplement) ; vivre en sécurité ; étudier (nouvelle méthodologie de la carte scolaire) ; travailler (agence de développement économique, école du numérique, actions envers les décrocheurs et les jeunes des quartiers sans emploi, aide aux jeunes pour travailler à l'étranger).
V.L.

 

 

 

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