Politique de la ville - Les contrats de ville 2015-2020 s'appuieront sur un quatrième pilier : "valeurs de la République et citoyenneté"
Il y avait le pilier "cohésion sociale", le pilier "cadre de vie et renouvellement urbain" et le pilier "développement de l'activité économique et de l'emploi". Les contrats de ville 2015-2020 devront désormais s'appuyer sur un quatrième pilier qui pourrait s'intituler "valeurs de la République et citoyenneté". C'est ce qu'a confirmé Myriam El Khomri, mardi 27 janvier, à l'occasion des vœux à la presse du ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports (voir aussi notre article du jour " En 2015, les politiques sportives seront marquées par la candidature de Paris aux JO… ou pas"). Une décision qui fait suite à la mobilisation du gouvernement en réaction aux attentats du début du mois.
La signature des contrats de ville ne sera pas retardée
Pour autant, "nous n'allons pas freiner la signature des contrats de ville" dont l'échéance demeure fixée à juin 2015, car certaines seraient déjà prêtes, a précisé la secrétaire d'Etat. Un avenant portant sur ce quatrième pilier sera possible. Le contenu sera précisé lors du comité interministériel "consacré à la lutte contre les inégalités et au combat pour l'égalité dans les quartiers", annoncé par Manuel Valls le 22 janvier dernier. Ce comité, piloté par le ministère de la Ville, se tiendrait "début mars".
S'il remplace de fait le comité interministériel des villes plus ou moins prévu à cette période-là, il ne s'agira pas d'aborder uniquement "la centaine de quartiers" qui s'apparentent à des "ghettos" et où régnerait "l'apartheid" (deux expressions de Manuel Valls reprises et assumées au ministère en charge de la ville), car "les problèmes dans les quartiers ne sont pas ceux des quartiers mais ceux de la France entière", a déclaré Myriam El Khomri. Selon elle, les évènements récents ont mis "la lumière sur les fractures béantes de notre société".
Des réponses à court terme
Il n'empêche, la commande de Manuel Valls porte bien sur des réponses à apporter à court terme pour cette "centaine de quartiers" évoquée par le ministre Patrick Kanner. Selon son cabinet, il s'agirait des quartiers qui seraient à la fois en zone de sécurité prioritaire (ZSP), en réseau d'éducation prioritaire (REP) et bénéficiaires du nouveau programme national de renouvellement urbain (Anru 2) (*).
Patrick Kanner a lancé quelques pistes pour "rendre ces quartiers attractifs, des quartiers qui fassent envie, et créer vers eux un flux positif". C'est ce qu'il entend par "politique de peuplement" au sens large : celle qui fera venir de nouvelle populations (sous-entendu "moins pauvres que celles qui y résident aujourd'hui").
En matière de politique locale de l'habitat, il s'agirait de travailler aux attributions de logements sociaux en faveur de la mixité sociale, de réfléchir à la manière opérationnelle dont les préfets pourraient "saisir" des terrains sur les communes n'appliquant pas la loi SRU (elles seraient une centaine à préférer payer les lourdes amendes prévues par la loi Duflot 1), mais aussi d'imposer que toute reconstruction dans le cadre d'une démolition-reconstruction Anru se situe hors quartier prioritaire, voire hors commune (le comité interministériel ira-t-il jusqu'à proposer de reconstruire dans des "ghettos de riches" ?)
L'attractivité de ces quartiers passerait également par des espaces publics et privés sécurisés et agréables, des services publics en présence renforcée, des équipements sportifs de proximité, une offre culturelle, des loisirs pour les jeunes, sans oublier l'école et l'éducation populaire, les politiques en faveur de l'emploi… Un air de "déjà-vu" ? "Les outils existent, il faut les accélérer par des actes concrets" et les mettre "en convergence" dans le cadre d'une véritable vision interministérielle, confirme Myriam El Khomri.
Valérie Liquet
(*) En gros : la carte publiée ce dimanche par le JDD (voir notre article Le JDD fait sa carte des "64 ghettos de la République") à laquelle s'ajouterait les quartiers ultra-marins concernés (le JDD ne s'étant intéressé qu'à la métropole).