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La loi confortant le respect des principes de la République publiée

Très peu censurée par le Conseil constitutionnel, la loi confortant le respect des principes de la République a été publiée au Journal officiel le 25 août dernier. Si plusieurs dispositions nécessitent des décrets pour être mises en œuvre – singulièrement le "contrat d'engagement républicain" que devront signer les associations pour pouvoir recevoir des subventions publiques –, nombre d'entre elles sont d'ores et déjà applicables, notamment en matière de commande publique.

Au terme d'une course vive (procédure accélérée au Parlement) et houleuse – de l'avis au vitriol du Conseil national d’évaluation des normes au rejet final du Sénat, qui a adopté la question préalable, après l'échec de la commission mixte paritaire à élaborer un texte commun –, la loi "confortant le respect des principes de la République" a finalement été versée au Journal officiel le 25 août dernier.

Trois dispositions censurées

Ce projet de loi de lutte contre les séparatismes – son intitulé initial –, qui avait directement pris sa source dans un discours du président de la République prononcé aux Mureaux le 2 octobre dernier (faisant lui-même suite à celui prononcé à Mulhouse le 18 février 2020), a franchi le dernier barrage sans trop de dommages. Le Conseil constitutionnel, destinataire de trois saisines, portant sur sept articles, n'a en effet censuré le 13 août que trois d'entre eux, dont un partiellement – sur les 103 que compte le texte.

Sont restées à quai les dispositions qui auraient permis :
- au ministre de l'Intérieur de suspendre les activités d'une association ou d'un groupement de fait faisant l'objet d'une procédure de dissolution en cas d'urgence et à titre conservatoire (atteinte non nécessaire, adaptée et proportionnée à la liberté d'association) ;
- de retirer ou de refuser la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger manifestant un rejet des principes de la République (non accessibilité et intelligibilité de la loi) ;
- aux groupes de travail des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance de traiter de questions relatives à la prévention de la récidive et aux actions de prévention de la radicalisation (cavalier législatif).

Feu vert au "contrat d'engagement républicain" et à la restriction de l'instruction en famille

Les Sages du Palais-Royal ont en revanche donné leur blanc-seing à deux dispositions particulièrement contestées. D'une part, au "contrat d'engagement républicain" que devra souscrire toute association ou fondation sollicitant l'octroi d'une subvention publique, souhaitant être reconnue d'utilité publique, etc. D'autre part, aux dispositions restreignant l'instruction à domicile à la portion congrue (lire encadré ci-dessous). Dans ces deux cas, les membres du Conseil constitutionnel se sont bornés à des réserves d'interprétation : l'interdiction d'exiger la restitution de "sommes versées au titre d'une période antérieure au manquement au contrat d'engagement" dans le premier cas ; l'absence de toute discrimination à l'occasion de la (non) délivrance de l'autorisation d'instruction en famille dans le second.

Collectivités locales concernées au premier chef

Les collectivités locales, leurs élus (possibilité de s'entretenir individuellement avec chacun des futurs époux avant la célébration de mariage, interdiction des réunions politiques dans les locaux servant habituellement à l'exercice du culte ou leurs dépendances, etc.) et leurs agents (formation à la laïcité, protection contre les pressions communautaires avec la création d'un "délit de séparatisme", prestation de serment préalable à sa prise de fonction de tout agent de la police municipale déclarant solennellement " servir avec dignité et loyauté la République, ses principes de liberté, d'égalité et de fraternité et sa Constitution", etc.) sont bien évidemment directement concernés par de nombreuses mesures de ce texte "attendu" et "espéré" – selon les mots du président de l'Association des maires de France, François Baroin, prononcés lors de son audition à l'Assemblée au début de l'année. Toutes ne les combleront pas. Emblématique, la création d'un "déféré laïcité" lorsque l'acte d'une collectivité attaqué par le préfet est de nature à "porter gravement atteinte aux principes de laïcité et de neutralité des services publics".

Des dispositions à mettre en œuvre sans délai

Si leur mise en œuvre passe dans de nombreux cas par l'adoption de décrets – ainsi du "référent laïcité" que les collectivités, parmi d'autres, devront désigner, du "contrat d'engagement républicain" et du contrôle de son respect ou encore de l'instance départementale chargée de la prévention de l'évitement scolaire à laquelle participent les services municipaux concernés –, nombre de dispositions sont d'ores et déjà applicables.
Tel est le cas de l'article 1er, qui impose à tout organisme chargé de l’exécution d’un service public ainsi qu'aux titulaires d’un contrat de la commande publique (pour autant que ce contrat leur confie l’exécution d’un service public) "d'assurer l'égalité des usagers devant le service public et de veiller au respect des principes de laïcité et de neutralité du service public". Article qui dispose par ailleurs que "les clauses du contrat rappellent ces obligations et précisent les modalités de contrôle et de sanction du cocontractant lorsque celui-ci n'a pas pris les mesures adaptées pour les mettre en œuvre et faire cesser les manquements constatés". Les collectivités doivent donc veiller à se conformer à cette obligation sans délai pour les contrats pour lesquels une consultation a été engagée ou un avis de publicité envoyé à la publication depuis le 25 août dernier, mais aussi à actualiser ceux pour lesquels une consultation ou un avis de publicité était en cours au 25 août ou ceux qui étaient en cours à cette même date si leur terme intervient après le 25 février 2023. La direction des affaires juridiques de Bercy a d'ores et déjà promis "prochainement" une circulaire "afin d’accompagner les autorités contractantes dans l’application de ces mesures".

Le Conseil constitutionnel valide le changement de régime de l'instruction en famille

Par une décision du 13 août, le Conseil constitutionnel a validé les dispositions de la loi confortant le respect des principes de la République du 26 juillet 2021 modifiant en profondeur le régime de l'instruction en famille.

Aux termes de l'article 49 de la loi, l'instruction en famille, reconnue depuis 1882 et soumise à une simple déclaration, relève désormais d'une autorisation préalable selon un nombre de cas restreints (état de santé de l'enfant ou handicap, pratique d'activités sportives ou artistiques intensives, itinérance de la famille, l'éloignement géographique de tout établissement scolaire public ou "existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif").

Pour les parlementaires requérants, cette disposition méconnaîtrait le principe fondamental de liberté de l'enseignement, laisserait un pouvoir d'appréciation trop important à l'autorité administrative ou encore méconnaîtrait la liberté d'opinion et de conscience.

Pour motiver la conformité du texte, le Conseil constitutionnel argue que la loi du 28 mars 1882 "n'a fait de l'instruction en famille qu'une modalité de mise en œuvre de l'instruction obligatoire" et non "une composante du principe fondamental reconnu par les lois de la République de la liberté de l'enseignement".

Le Conseil constitutionnel valide ensuite la méthode qui sera désormais suivie par l'administration, à savoir une autorisation "sous réserve que les personnes qui en sont responsables justifient de la capacité de la ou des personnes chargées d'instruire l'enfant". Pour le juge constitutionnel, "le législateur a entendu que l'autorité administrative s'assure que le projet d'instruction en famille comporte les éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie adaptés aux capacités et au rythme d'apprentissage de l'enfant". Par ailleurs, les modalités de délivrance de l'autorisation auront lieu, sous le contrôle du juge, selon des critères "excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit".

En dernier lieu, le Conseil constitutionnel estime, sans apporter plus d'argumentation, que les dispositions contestées "n'ont ni pour objet ni pour effet de porter atteinte à la liberté de conscience ou d'opinion des personnes qui présentent un projet d'instruction en famille".

Jean Damien Lesay pour Localtis

Référence : loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, JO du 25 août 2021.

 

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