Commande publique - Attribuer, informer, notifier : le Conseil d'Etat apporte des précisions importantes
Le Conseil d’Etat a confirmé le 30 décembre 2009, que la décision d’attribution d’un lot n’engage pas la responsabilité du pouvoir adjudicateur à l'égard du titulaire en cas d’annulation du marché. En effet, tant que le contrat n’a pas été notifié au titulaire, le pouvoir adjudicateur peut décider d’annuler la procédure afin de lancer un nouvel appel d’offres sur des bases techniques plus avantageuses pour lui.
Dans le cadre d'un marché relatif à la construction de logements, l'office public d'aménagement et de construction (Opac) des Hautes-Pyrénées avait informé la société Estradera, par un courrier du 2 août 2001, que son offre concernant le lot n° 8 avait été retenue. Toutefois, après une nouvelle réunion de la commission d'appel d'offres, le 8 février 2002, l’Opac avise la société, par un courrier du 25 février 2002, que les autres lots du marché n'ayant pu être attribués l’ensemble de la procédure sera annulée. Le tribunal administratif de Pau, saisi par l’entreprise, avait admis la responsabilité de l'Opac "en raison des délais dans lesquels il a annoncé à la société l'impossibilité de conclure le marché" et condamné l’établissement à verser 8.500 euros en réparation du préjudice financier subi.
Le Conseil d’Etat censure le raisonnement du tribunal administratif : "la société a été informée dans un délai raisonnable que l'attribution du lot n° 8 du marché a été déclarée sans suite". Mais l’arrêt rappelle surtout que c’est la notification du marché au titulaire, et non la décision d’attribution, qui produit des effets juridiques susceptibles d’engager la responsabilité de la personne publique. En l’espèce, puisque aucun marché n’avait été signé, la commission d’appel d’offres de l’Opac pouvait légalement déclarer l'attribution du lot n° 8 sans suite et lancer une nouvelle procédure. L’annulation de la procédure semble d’autant plus légitime qu’elle se justifie en l’espèce par le fait que les logements "pouvaient être réalisés pour un coût nettement moins élevé sur des bases techniques nouvelles". Le Conseil d’Etat souligne à ce titre "qu'en renonçant, pour ce motif d'intérêt général, à conclure le marché, lequel ne pouvait faire l'objet d'un avenant, eu égard aux modifications substantielles consécutives aux nouvelles solutions retenues par l'Opac, qui remettaient en cause les conditions de l'appel à concurrence, et en soumettant à un nouvel appel d'offres le marché ainsi techniquement modifié, l'établissement public n'a commis aucune illégalité constitutive d'une faute de nature à engager sa responsabilité".
L’arrêt précise enfin que l’Opac n’avait pris, à l'égard de la société, aucun engagement quant à la date de démarrage des travaux. L’Opac n'était donc pas tenu, jusqu'à ce que la CAO décide de lancer un deuxième appel d'offres, d'informer la société des circonstances susceptibles de remettre en cause la conclusion du marché.
L’Apasp
Références : Conseil d'État, 30 décembre 2009, Société Estradera, n° 305287; Circulaire du 29 décembre 2009 relative au Guide de bonnes pratiques en matière de marchés publics.
Décision d'attribution et notification du marché
Les marchés d'un montant supérieur aux seuils de dispense de procédure doivent être notifiés au titulaire du marché avant tout commencement d'exécution. Les articles 15 et suivants de la circulaire du 29 décembre 2009 relative au Guide des bonnes pratiques en matière de marchés publics rappellent qu’il convient de procéder en plusieurs étapes successives. Dans un premier temps, il s'agit de choisir le titulaire du contrat, de l’informer de cette décision d'attribution et de notifier aux autres candidats le rejet de leur offre. Si besoin, une délibération autorisant la signature du contrat doit être adoptée et transmise au contrôle de légalité. Le contrat doit ensuite être signé par le pouvoir adjudicateur (il peut également être nécessaire de le transmettre au contrôle de légalité), avant d’être notifié au titulaire. Ce n’est qu’à la date de réception de la notification par le titulaire que le contrat commence à produire ses effets juridiques. Le titulaire doit donc attendre d'avoir reçu la notification, avant de commencer à exécuter le contrat, faute de quoi les prestations exécutées n'ont aucune base juridique.