Education prioritaire - Vincent Peillon et François Lamy signent leur convention d'objectifs, sans un mot sur la carte scolaire
Vincent Peillon, François Lamy et George Pau-Langevin ont enfin signé, le 7 octobre à Grenoble, leur convention d'objectifs pour les quartiers prioritaires de la politique de la ville 2013-2015, la neuvième du genre (voir nos articles ci-contre) depuis que Jean-Marc Ayrault a demandé à tous ses ministres concernés par la politique de la ville, en novembre dernier, de se prêter à l'exercice afin de mobiliser le droit commun pour les quartiers. En l'occurrence, l'Education nationale avait déjà une déclinaison "quartiers" via sa politique d'éducation prioritaire, ce qui n'aura pas facilité les consensus…
Les grands objectifs n'ont pas dû poser problème, puisqu'il s'agit très largement de "réduire les inégalités territoriales, favoriser la cohésion sociale et la réussite des enfants relevant de la politique de la ville".
L'éducation prioritaire dans les contrats de ville
Comme promis, il n'est pas directement question de zonage "éducation prioritaire", jugé aujourd'hui stigmatisant. L'accent est davantage mis sur les établissements eux-mêmes. Ainsi seront désormais pris en compte, en plus des réseaux de l'éducation prioritaire (REP) d'aujourd'hui, "les écoles et collèges accueillant une majorité d'élèves issus des quartiers prioritaires". Ces écoles et collèges seront identifiés par les recteurs et les préfets.
Par "quartiers prioritaires", s'entendent les mille quartiers issus de la nouvelle géographie prioritaire engagée par François Lamy et qui devraient être connus début 2014. Pour chaque quartier, un contrat de ville sera signé pour la période 2014-2020 y compris par les recteurs pour la partie "éducation prioritaire".
Pour cela, "les services académiques participeront à la préparation et au suivi des futurs contrats de ville", précise la convention. Plus précisément, les recteurs désigneront, au sein des services académiques, "les agents participant à l'équipe interministérielle mise en place auprès des préfets aux fins de préparer et de suivre la négociation des futurs contrats de ville avec les collectivités territoriales, puis de veiller à leur application".
Par ailleurs, la convention précise qu'"un examen de la partie pédagogique et des actions de soutien et d'accompagnement scolaire des associations locales sera effectué par les responsables territoriaux du ministère de l'Education nationale, afin de garantir la qualité de la prise en charge des élèves".
750 emplois pour la scolarisation des moins de 3 ans
Comme le prévoit la loi du 8 juillet 2013 de programmation et d'orientation pour la refondation de l'école de la République (voir notre article ci-contre "Loi Peillon : tout ce qui concerne les collectivités" du 10 juillet 2013), "les quartiers de la politique de la ville bénéficient en priorité des emplois que le ministère de l'Education nationale déploie au service d'une amélioration des résultats de notre système éducatif", rappelle la convention.
Concernant l'accueil des enfants de moins de trois ans dans les écoles maternelles, les quartiers prioritaires bénéficieront de 25% des postes créés à cet effet durant les trois premières années du quinquennat. Une part toute relative quand on sait que la loi dispose que ce dispositif est organisé "en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé, que ce soit dans les zones urbaines, rurales ou de montagne et dans les départements et régions d'outre-mer" (article 8). Si, comme le dit la loi dans son annexe, l''Education nationale créera 3.000 postes pour ce dispositif sur la totalité du quinquennat, les 1.000 quartiers prioritaires devraient pouvoir compter sur 750 postes. Rappelons à ce propos que la loi Peillon compte également sur les collectivités pour participer à "l'accueil matériel, éducatif et pédagogique" nécessaire à la mise en place de ce dispositif.
25% des emplois affectés au dispositif "Plus de maîtres que de classes"
Les écoles des quartiers prioritaires seront bénéficiaires de 25% des postes créés dans le cadre du dispositif "Plus de maîtres que de classes". Là encore, l'objectif est modeste quand on sait que la loi prévoyait (dans son annexe) que les moyens alloués à l'affectation d'un maître supplémentaire dans des écoles seront concentrés dans les "zones scolaires les plus en difficulté". Par ailleurs, le nombre de maîtres supplémentaires n'est toujours pas connu, ces maîtres supplémentaires correspondent à une partie seulement des 7.000 postes créés pour "renforcer l'encadrement pédagogique dans les zones difficiles", dans lesquelles on trouve également le renforcement des Rased (réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté).
Pour ces deux dispositifs, la convention d'objectifs précise que le respect de ces engagements s'appréciera à l'échelle nationale, "sur le périmètre des zones urbaines sensibles à la date de la signature de la présente convention", mais qu'une "adaptation de ces dispositions sera, le cas échéant, effectuée par avenant, après publication de la liste des quartiers prioritaires de la politique de la ville se substituant aux ZUS".
Des objectifs bien vagues
Pour les autres dispositifs, les objectifs sont encore plus vagues. La convention rappelle ainsi que les emplois créés d'ici cinq ans au profit des collèges en difficulté et des lycées professionnels, pour lutter contre le décrochage, "seront encouragés dans les établissements accueillant majoritairement des élèves des quartiers de la politique de la ville". Concernant les emplois médicosociaux, ils devront être affectés, "en priorité", aux établissements relevant de l'éducation prioritaire. Quant à la volonté de "faire droit au principe de co-éducation", de nouvelles pistes de coopération avec les familles seront développées "prioritairement" dans les établissements scolaires accueillant majoritairement des élèves des quartiers de la politique de la ville.
Si, dans l'esprit de Jean-Marc Ayrault, l'idée de ces conventions étaient de puiser dans le droit commun des moyens financiers pour la politique de la ville, l'Education nationale se fait ici confirmer un certain nombre de dispositifs financés par la politique de la ville sur son terrain : programmes de réussite éducative, mais aussi plateformes de soutien et d'appui aux décrocheurs. Par ailleurs le ministère de la Ville s'est engagé à donner son "appui" aux formations "prise de poste" et "connaissance de l'environnement" pour les personnels du ministère de l'Education nationale nommés dans les quartiers de la politique de la ville.