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Environnement - Un rapport sénatorial sur la sécheresse de 2003 propose d'améliorer le régime des catastrophes naturelles

La canicule de 2003 n'a pas seulement été dramatique par son bilan humain. La sécheresse a aussi provoqué environ 138.000 sinistres dans 8.022 communes, du fait du phénomène de retrait-gonflement des sols argileux ou subsidence qui a affecté l'intégrité des bâtiments. Mais seules 4.441 communes ont fait l'objet d'un classement en état de catastrophe naturelle (CAT-NAT) et malgré les aides complémentaires mises en place par l'Etat (218,5 millions d'euros pour les ressortissants des communes non reconnues en état de catastrophe naturelle), de nombreuses victimes ont été peu ou pas indemnisées du tout.

Face aux difficultés persistantes de ces dernières, le Sénat a constitué un groupe de travail en février dernier pour tirer les leçons de cette sécheresse exceptionnelle et proposer des pistes de réforme du régime des catastrophes naturelles. Jean-Claude Frécon, sénateur socialiste de la Loire, et Fabienne Keller, sénateur UMP du Bas-Rhin, viennent de publier un rapport d'information faisant état de ces réflexions.

 

Une procédure d'alerte pour les communes les plus exposées au risque de subsidence

Tout d'abord, ils proposent "de solder un passé qui ne passe pas et de ne plus différer l'adaptation d'un cadre législatif et réglementaire dont l'insuffisance est patente". "L'ampleur exceptionnelle du phénomène climatique observé en 2003, associée aux modifications successives des critères de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, ont suscité un profond désarroi chez les familles sinistrées comme chez les élus des communes et départements particulièrement touchés", soulignent-ils. Dès lors, ils estiment que la situation des sinistrés "doit faire l'objet d'un réexamen et, le cas échéant, d'indemnisations complémentaires". Pour l'avenir, ils avancent plusieurs pistes d'amélioration car ils craignent une augmentation de la fréquence des épisodes de canicule et de sécheresse. "Les maires des communes situées en zone d'aléa argileux fort doivent être rapidement et systématiquement alertés des enjeux liés au phénomène de subsidence", affirment les sénateurs qui proposent de mettre en œuvre avant fin 2010 une procédure d'alerte spécifique des élus, assortie de recommandations leur permettant de mieux prendre en compte ce risque dans l'exercice de leurs compétences d'urbanisme et d'instruction et de délivrance des permis de construire.

Ils préconisent aussi de rendre obligatoire la réalisation d'une étude de sol, à la charge des maîtres d'ouvrage, pour toute construction nouvelle en zone à risque argileux élevé. Selon eux, l'achèvement de la cartographie de l'aléa argileux, en préalable à l'édiction de nouvelles normes de construction, doit constituer une mission prioritaire du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). Le cas échéant, les collectivités territoriales particulièrement exposées à cet aléa pourraient être aidées, via le Fonds de prévention des risques naturels majeurs, à affiner cette cartographie de manière à disposer d'une information fiable à l'échelle des parcelles.

Les sénateurs souhaitent aussi que la réforme envisagée du régime des catastrophes naturelles s'accompagne du maintien des sinistres dus au retrait-gonflement au sein du périmètre d'indemnisation. "Les exclusions partielles de la couverture CAT-NAT visant notamment les dégâts superficiels ou les bâtiments couverts par l'assurance décennale ou bien par la garantie dommages-ouvrages ne doivent pas conduire à fragiliser la situation des sinistrés à l'égard des constructeurs ou des compagnies d'assurance", soulignent les sénateurs. "Dans l'hypothèse où une évolution de la réglementation aboutirait à des nouvelles prescriptions en matière d'études de sol ou de profondeur maximale des fondations, le non-respect de ces prescriptions pourrait être sanctionné par une exclusion de la couverture CAT-NAT, sous réserve d'informer en amont et de façon très circonstanciée les maîtres d'ouvrage de la sanction encourue", ajoutent-ils.

 

Des aménagements au régime des catastrophes naturelles

La deuxième partie du rapport est entièrement consacrée aux propositions concernant la réforme globale du régime CAT-NAT. D'emblée, le groupe de travail souhaite que cette réforme ne bouleverse pas l'équilibre général d'un régime qui a "largement fait ses preuves". Mais il estime que la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle doit être "plus transparente". "Les critères et seuils élaborés par la commission interministérielle doivent faire l'objet d'une traduction normative et d'une présentation accessible aux salariés, avancent-ils. Cette traduction permettrait également une meilleure anticipation des assureurs s'agissant de la charge de sinistralité à indemniser. Elle pourrait aussi conduire au développement d'une offre complémentaire de couverture pour les sinistres situés en deçà des seuils applicables dans le cadre du régime CAT-NAT."

Les sénateurs ne souhaitent pas que l'arrêté interministériel soit supprimé car pour eux, l'absence d'intermédiation des pouvoirs publics serait susceptible de fragiliser la position des assurés face aux assureurs. Par contre, ils proposent de renforcer la proximité du circuit de décision présidant à la déclaration de l'état de catastrophe naturelle en décentralisant cette décision "à l'échelon local pertinent". "Assureurs et assurés seraient présents lors de l'examen des demandes et la cohérence de l'application des critères et des seuils serait garantie par un mécanisme d'appel devant la commission interministérielle, qui intervient au niveau national", détaillent-ils. Les sénateurs jugent en outre nécessaire d'accélérer le rythme de prescription et d'approbation des plans de prévention des risques naturels majeurs qui doivent comporter des dispositions concrètes de prévention et être conçus "à un niveau adapté à la réalité de l'exposition au risque". Enfin, ils estiment indispensable de rationaliser et de mettre en cohérence les missions du Fonds de prévention des risques naturels majeurs dont les dépenses ont fortement augmenté ces dernières années.
 

Anne Lenormand
 

 

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