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Finances locales - La situation des collectivités reste dégradée malgré une embellie

Selon l'état des lieux dressé par l'Observatoire des finances locales, la situation financière des collectivités a connu une embellie en 2010. En atteste la progression de leur autofinancement. Mais cette amélioration est fragile du fait, d'une part, de la dépendance de certaines recettes fiscales à la conjoncture et, d'autre part, de la progression des dépenses sociales. Prudentes, les collectivités ont moins investi.

L'Observatoire des finances locales constatait, depuis 2007, un resserrement des marges de manœuvre des collectivités locales. L'année dernière, l'instance rattachée au Comité des finances locales (CFL) jugeait que le phénomène "s'amplifiait" et devenait "préoccupant". Dans le rapport sur la situation des finances des collectivités en 2011 présenté au CFL le 12 juillet (voir ci-contre nos articles des 12 et 13 juillet) et qui vient d'être mis en ligne, l'observatoire est moins alarmant. La cause de ce changement de ton : le redressement de l'excédent de fonctionnement des collectivités, autrement dit de l'épargne brute. D'un montant de 30,2 milliards d'euros en 2010, cet excédent est en hausse de 13,6%, après trois années consécutives de baisse. Stable dans les régions, l'excédent de fonctionnement s'est accru de 14% pour le secteur communal et de 24,6% pour les départements (alors qu'en 2009, il avait reculé de 19% pour ces mêmes départements).
Ces nouvelles marges de manœuvre s'expliquent par la préservation des recettes de fonctionnement. Totalisant 178,8 milliards d'euros en 2010, celles-ci ont progressé de 3,9%, après avoir augmenté de 3% en 2009. Il faut y voir la conséquence de la bonne santé des recettes fiscales (108,3 milliards d'euros), puisque celles-ci ont connu, l'année dernière, une progression de 6%. Les recettes de la taxe d'habitation et des taxes foncières sur les ménages ont crû de 4,7% (en raison du dynamisme des bases plutôt que de la hausse des taux), tandis que la compensation relais versée par l'Etat aux collectivités locales en remplacement de la taxe professionnelle a procuré à celles-ci des recettes supérieures de 3,6% au produit de taxe professionnelle perçu en 2009. Certes, pour les départements, le montant de la compensation relais n'a été supérieur que de 1,6% à celui des recettes de taxe professionnelle de l'année précédente. Mais les départements ont profité du redémarrage du marché de l'immobilier, qui s'est traduit par une croissance des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) de 35%. Au final, ils ont perçu 7,2 milliards d'euros de DMTO l'année dernière. Cette bonne surprise explique, d'ailleurs, le redressement de l'épargne brute des départements.

Envolée des dépenses sociales

Autre facteur d'explication des marges de manœuvre retrouvées par les collectivités : en même temps qu'elles préservaient leurs ressources, les collectivités locales ont su maîtriser leurs dépenses de fonctionnement. Globalement, les dépenses de fonctionnement des collectivités se sont élevées, l'année dernière, à 148,7 milliards d'euros. Elles ont ainsi augmenté de 2,2% par rapport à 2010, soit nettement moins qu'en 2008 et 2009. Cette modération a concerné en particulier les dépenses de personnels, dont la hausse a été limitée à 2,9% (après une progression de 4,7% en 2009). Dans le même temps, les collectivités ont profité de taux d'intérêt bas, qui leur ont permis de financer leurs investissements à moindre frais.
Cette amélioration de la santé financière des collectivités est-elle une simple éclaircie ou le prélude d'un nouveau temps de ciel bleu ? Pour Philippe Laurent, maire de Sceaux et vice-président de la commission des finances de l'Association des maires de France, l'orage gronde déjà. "Les taux d'intérêt progressent et les droits de mutation restent une recette très volatile, comme on l'a vu par le passé", relève-t-il, en soulignant que, par ailleurs, "la pression à la dépense contrainte reste extrêmement forte, notamment dans le domaine social". Comme on le sait, les départements sont les premiers concernés : les dépenses d'action sociale (35 milliards d'euros) représentent aujourd'hui 65% de leurs dépenses d'intervention. En 2011, les dépenses de fonctionnement des collectivités devraient aussi subir une pression à la hausse du fait du renchérissement des coûts de l'énergie.

Les régions et les départements moins généreux avec les communes

A ces menaces s'ajoute un fort défaut de visibilité sur les ressources fiscales futures. 2011 est, en effet, la première année de mise en œuvre de la réforme de la fiscalité locale, qui s'est traduite par une relative spécialisation fiscale des collectivités et une réduction significative de l'autonomie fiscale des départements et des régions.
Dans ce contexte, les collectivités ont eu moins recours à l'emprunt (-17% en 2010 avec 16 milliards d'euros de nouveaux emprunts). Elles ont aussi moins investi. En 2010, l'investissement public local a, en effet, baissé de 7,8% - mais il constituait encore 71% de l'investissement public civil. L'investissement communal et intercommunal, qui aurait dû progresser du fait de la mise en oeuvre des projets programmés après les élections municipales de 2008, a connu un repli de 3,7%. On peut, cependant, relativiser ce chiffre, comme le fait l'Observatoire des finances locales, en se souvenant que le secteur communal a anticipé certaines opérations en 2009, dans le cadre du plan de relance. Pour les départements et les régions, la baisse de l'investissement est plus nette, puisqu'elle atteint respectivement 13,6% et 17,6%.
D'après les budgets primitifs adoptés au printemps dernier, les deux niveaux de collectivités devraient continuer, en 2011, de réduire leurs investissements. Mais de manière plus modérée : -6,3% pour les départements et -1,6% pour les régions. Qu'en sera-t-il pour les communes et leurs groupements ? A ce sujet, aucune indication ne figure dans le rapport. Mais il est certain que des effets contradictoires joueront. D'un côté, le rapprochement des élections de 2014 incite les communes à accélérer leurs investissements. C'est la règle du fameux "cycle électoral". D'un autre côté, la baisse des subventions d'équipement accordées par les départements et les régions (en 2010 : -14,3% pour les départements et -11,1% pour les régions) pourrait constituer un sérieux frein, comme s'en inquiète l'Association des petites villes de France.

 

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