Finances locales - Dexia : malgré la hausse des impôts, les collectivités ne parviennent pas à reconstituer leurs marges de manoeuvre
La hausse de 7,7% du produit de la fiscalité directe locale enregistrée en 2009, presque deux fois plus importante qu'en 2008, procure des marges de manœuvre aux collectivités locales. Mais celles-ci sont sérieusement entamées, sous l'effet de la crise, par le moindre rendement de certaines ressources et la progression des dépenses sociales, révèle la note de conjoncture de Dexia présentée ce 24 novembre à l'occasion des Rencontres financières des décideurs locaux.
Du côté des recettes des collectivités, les dotations de l'Etat connaissent une évolution limitée, certes, mais positive (+ 0,8%). Le produit des droits de mutation, lui, devrait plonger de 26% sur l'année, après une première baisse de 9,4% en 2008. Cela représente 600 millions d'euros en moins pour les communes, soit 2% de leurs recettes fiscales directes. Pour les départements, le choc est plus sérieux. Ils enregistrent 1,9 milliard d'euros de rentrées en moins par rapport à l'année dernière. Les départements sont donc fragilisés, d'autant que leurs dépenses en matière sociale progressent à un rythme soutenu du fait de la progression du nombre des bénéficiaires de minima sociaux et de la mise en place du RSA. L'impact de ce phénomène varie toutefois d'un département à un autre, puisque le poids des dépenses sociales dans l'ensemble des dépenses va de 36% à 67% selon les départements, observe Thomas Rougier, directeur des études de Dexia Crédit local. Les communes et leurs groupements subissent, eux aussi, une pression sur leurs dépenses sociales, car avec la crise, les centres communaux et intercommunaux d'action sociale voient les demandes d'aide affluer.
L'effet de ciseaux subi par les collectivités se reflète dans le recul de 4,6%, cette année, du niveau de leur épargne de gestion (à savoir la différence entre les recettes et les dépenses de fonctionnement). Le repli avait été, l'année dernière, de 3,8%. 2009 est à cet égard "atypique", explique Thomas Rougier : "Les années de forte hausse du produit fiscal – 1993, 1996, 2005 – s'accompagnaient toujours d'un rebond de l'épargne de gestion des collectivités locales."
Optimiser les dépenses
L'épargne brute (c'est-à-dire l'épargne de gestion diminuée des frais liés aux intérêts de la dette) se réduit, du coup, de 4,4% en 2009, malgré la réduction des charges d'intérêt. Ce sont les départements qui, en fait, tirent l'épargne brute de l'ensemble des collectivités vers le bas. Leur épargne brute recule en effet de 20,6%, alors que pour les communes et les régions, elle est légèrement positive. Pour les groupements à fiscalité propre, elle s'améliore même de 4,1%.
La réduction de leur capacité d'autofinancement n'empêche pas les collectivités de continuer à investir à un rythme relativement soutenu. Certes, à 50,9 milliards d'euros, l'investissement public local doit ralentir de 2,7% en 2009 par rapport à l'année passée. Mais cette baisse est à relativiser, dans la mesure où la seconde année du mandat municipal est, en général, celle au cours de laquelle les nouvelles réalisations débutent ou sont encore à l'étude. En matière d'investissement, 2009 serait même un assez bon cru, malgré le ralentissement économique. "C'est la traduction de la volonté des élus locaux de mener des politiques volontaristes pour lutter contra la crise", commente Thomas Rougier. Un volontarisme encouragé par l'Etat au travers du versement, à près de 20.000 collectivités, de 3,8 milliards d'euros au titre du FCTVA anticipé. La mesure s'est donc montrée particulièrement efficace. Elle a aussi permis de limiter le recours à l'emprunt, qui, en atteignant cette année 5,1 milliards – contre 7,7 milliards l'année dernière – finance, donc, 10% de l'investissement public local.
En 2010, l'investissement local devrait "retrouver des évolutions positives", mais "dans des proportions moindres que celles attendues généralement en troisième année de mandat municipal", annonce Dexia. La suppression de la taxe professionnelle empêcherait les collectivités d'avoir "une vision claire de l'évolution de leur ressources fiscales futures" et, du coup, les conduirait à "repousser certains programmes d'investissement".
Les contraintes qui pèsent aujourd'hui sur les recettes des collectivités ne devraient pas se desserrer, obligeant les décideurs locaux à trouver des marges de manœuvre sur les dépenses. "L'optimisation, la mutualisation, l'externalisation..." seront par conséquent, ces prochaines années, "au cœur de la conception des budgets des collectivités locales", assure le directeur des études de Dexia Crédit local.
Thomas Beurey / Projets publics