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Logement - Construction de logements : que sont les 500.000 devenus ?

Emmanuelle Cosse se défend de devoir "faire du chiffre". C'est pourtant à elle qu'il incombera de rendre des comptes sur l'objectif de 500.000 nouveaux logements créés, objectif fixé par François Hollande pour la dernière année de son quinquennat. Dans le contexte très favorable de reprise de la construction, elle devrait au mieux dépasser la barre des 400.000. Mais attention, pas n'importe où et pas à n'importe quel prix, prévient la ministre du Logement et de l'Habitat durable.

C'est à Emmanuelle Cosse, troisième - et a priori dernière – ministre du Logement de l'ère Hollande, que revient la tâche de répondre à l'objectif de 500.000 nouveaux logements construits la dernière année du quinquennat, ainsi que l'avait fixé le président de la République, début 2013, lors d'un déplacement qui a fait date à Ermont-Eaubonne (voir notre article ci-contre du 4 février 2013).
Pour rappel, le candidat Hollande avait un an plus tôt promis que "lui Président" 500.000 nouveaux logements seraient mis chaque année sur le marché, pour parvenir à la production de 2,5 millions de logements sur toute la durée du quinquennat.

Les 500.000 ne seront pas atteints

Ces promesses, Emmanuelle Cosse les assume. Elle "a fait la campagne de François Hollande" en son temps, a-t-elle rappelé le 18 mai lors d'un petit-déjeuner avec des journalistes de l'Ajibat (Association des journalistes de l’habitat et de la ville). Et au moment de la campagne présidentielle, les 500.000 logements par an étaient "partagés par tout le monde : l'Unpi, la FFB, la Fondation Abbé-Pierre..." et même "validés par des économistes du logement" qui avaient calculé que cet objectif permettrait de rattraper le retard.
Il n'empêche, malgré la reprise de la construction après plusieurs années de déprime, les 500.000 ne seront pas atteints. La ministre ne le dit naturellement pas comme ça. "Aujourd'hui, on serait plutôt à 400.000 par an", répond-elle en se référant aux derniers chiffres (chiffres couvrant les 12 mois d'avril 2015 à avril 2016, voir notre article du 29 mars 2016). Une tendance héritée de sa prédécesseure Sylvia Pinel, grâce notamment à son dispositif fiscal, et qu'elle entend bien poursuivre.
Et puis 400.000, c'est toujours mieux que les 300.000 mises en chantier de 2012...

"Cela ne m'intéresse pas de faire du chiffre avec de l'investissement locatif dans des zones sans intérêt"

De toute façon, "cela ne m'intéresse pas de faire du chiffre avec de l'investissement locatif dans des zones sans intérêt", souligne la ministre du Logement et de l'Habitat durable, citant en exemple le marché du logement de Saint-Gaudens (*).
Pour autant, elle se dit consciente que des territoires dits "détendus", accusant un fort taux de vacance dans leur parc, peuvent avoir de légitimes besoins en nouveaux logements, notamment de logements sociaux ou pour le moins de logements de qualité et "abordables". Elle indique d'ailleurs que des services de l'Etat en régions sont saisis par des communes très rurales qui souhaitent créer "un, deux ou trois logements sociaux pour loger des publics souvent âgés, ou jeunes" (la solution serait alors de passer par de la maîtrise d'ouvrage d'insertion ou de l'intermédiation locative...).
La ministre évoque également les bourgs-centres dévitalisés, accusant un fort taux de vacance et du bâti ancien nécessitant des travaux de rénovation, mais aussi une échappée des commerces à la périphérie. Pour ces territoires, l'appel à projets "revitalisation des centres-bourgs" lancé il y a deux ans a été un tel succès (voir nos articles ci-contre du 23 juin 2014 et du 6 novembre 2015 notamment) que d'autres demandes affluent.

"Construire, oui, mais pas pour s'étaler un peu plus"

Pour autant, évidemment que "nous restons mobilisés sur la production en zones très tendues", précise-t-elle en signifiant sa préoccupation sur le coût du prix de sortie, y compris dans le parc social.
Et puis, "construire, oui, mais pas pour s'étaler un peu plus", précise la ministre du Logement et de l'Habitat durable. Elle se félicite à ce sujet des PLU et PLUI qui s'inscrivent résolument dans une optique de limiter l'étalement urbain. "Il faut que les territoires se bougent sur leurs outils d'urbanisme, et pas que les agglos", lâche-t-elle. Faisant référence au Sdrif (Schéma directeur de la région Ile-de-France) qu'elle connaît bien en tant qu'ex-élue au logement de la région Ile-de-France, Emmanuelle Cosse invite toutes les régions à se saisir du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet). Institué par la loi Notr en remplacement du Sraddt, le Sraddet verra bientôt le jour (la concertation sur son décret de création vient tout juste de s'achever, voir notre article du 28 avril 2016). Il permettra aux conseils régionaux d'élaborer et de formaliser une stratégie régionale d'aménagement sur le territoire régional en intégrant les besoins en logements y compris dans leur dimension économique.

Valérie Liquet

(*) Dans cette communes de 11.200 habitants de la Haute-Garonne, la création de plus d'un millier de logements "Robien" entre 2002 et 2008 (contre 20 par an précédemment) a porté le taux de vacance du parc privé de 8 à 14% (soit un millier de logements vides), a fait chuter de 50% les prix de vente et entre 30% et 50% les loyers, attirant une population de locataires de plus en plus déshérités.
 

 

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