Agenda social - Cinquième risque : vers un report à 2011
La réunion sur l'agenda social 2010, organisée à l'Elysée le 15 février, a fait une victime inattendue. Le chef de l'Etat a en effet annoncé aux partenaires sociaux son intention de s'atteler à la mise en place du cinquième risque de la protection sociale - dédié à la prise en charge de la dépendance -, une fois achevé le chantier de la réforme des retraites. Or, le calendrier prévu pour ce dernier laisse a priori peu de place pour le dépôt d'un texte sur le cinquième risque en 2010, et encore moins pour son adoption. Nicolas Sarkozy a en effet annoncé son intention de ne pas "passer en force" dans le cadre de la négociation sur les retraites qui doit débuter en avril. Il entend donner "tout le temps nécessaire pour dialoguer pour que les positions de chacun soient parfaitement comprises, pour que les Français soient clairement informés des enjeux et des solutions". En pratique, le gouvernement ne devrait donc pas déposer de projet de loi sur la réforme des retraites avant le début de l'automne. La fin de l'année étant occupée par les projets de loi récurrents (loi de finances et loi de financement de la sécurité sociale), il ne devrait pas rester de créneau dans l'agenda parlementaire pour examiner un éventuel projet de loi sur le cinquième risque. Conséquence : ce dernier devrait donc être reporté à 2011, même si des annonces peuvent intervenir avant cette échéance. Cette éventualité constitue une demi-surprise. Certes, à l'occasion des voeux aux représentants des salariés et des employeurs le 15 janvier, Nicolas Sarkozy avait à nouveau cité le "cinquième risque social" comme l'un des chantiers majeurs de 2010. Mais il est vrai que le contenu de la réforme est loin d'être arbitré. Si les grands principes en semblent acquis - combinaison entre solidarité nationale et développement de l'assurance (mutuelles et compagnies d'assurance), mise en place d'un "gage patrimonial" et d'un choix pour le bénéficiaire... -, les modalités de mise en oeuvre restent encore à affiner. La question centrale est celle de "l'emplacement du curseur", autrement dit de l'ampleur financière de la réforme. Sur ce point, les perspectives budgétaires laissent plutôt augurer une solution a minima.
Ce - nouveau - report du dossier risque également de remettre en cause la "concertation nationale" qui devait précéder le dépôt d'un projet de loi sur le sujet (voir notre article ci-contre du 4 février 2010). Le gouvernement avait d'ailleurs déjà réduit la voilure sur les modalités pratiques de cet exercice, passant d'une multiplication de forums locaux - sur le modèle des Etats généraux de la sécurité sociale - à un "rendez-vous parisien avec une série de tables rondes". Lors des voeux des ministères sociaux, la secrétaire d'Etat chargée des Aînés s'était d'ailleurs montrée très prudente - et pour cause - sur l'agenda de cette concertation. Nora Berra avait en effet renvoyé la question à la réunion du 15 février à l'Elysée. Le chef de l'Etat vient d'apporter la réponse.
Jean-Noël Escudié / PCA
Fin de droits : des formations rémunérées plutôt qu'une allocation
La question des chômeurs en fin de droits a également été abordée à l'occasion de la réunion à l'Elysée. Sur ce point, le chef de l'Etat semble s'orienter vers la mise en place de formations rémunérées - pour faciliter le retour à l'emploi -, plutôt que vers la création d'une allocation ou la modification des règles actuelles de l'allocation de solidarité spécifique (ASS). Nicolas Sarkozy a ainsi indiqué qu"'on ne peut pas lutter contre l'exclusion par l'assistance uniquement. Il ne s'agit donc pas de créer une allocation d'assistance de plus pour ceux qui arrivent en fin de droits, mais de donner à chacun d'entre eux une formation rémunérée qui leur permette de retrouver un emploi". La porte n'est toutefois pas entièrement fermée sur l'idée d'un éventuel mécanisme financier, puisque le chef de l'Etat a indiqué que "ça sera une formation pour ceux qui le peuvent, ce sera une allocation avec une contrepartie pour les autres". Il reste néanmoins à savoir si cette allusion à une "allocation avec une contrepartie" vise la mise en place d'un dispositif spécifique ou un simple basculement sur le RSA. Par ailleurs, selon les indications fournies par les organisations syndicales à la sortie de la réunion, le chef de l'Etat aurait laissé entendre - sans surprise car la mesure était annoncée - que l'allocation équivalent retraite (AER) sera prolongée en 2010. Cette nouvelle prolongation, après celle décidée pour 2009 en raison de la crise économique, devrait permettre à environ 25.000 chômeurs en fin de droits ayant suffisamment cotisé pour une retraite à taux plein de percevoir une indemnité d'un peu moins de 1.000 euros par mois, en attendant de pouvoir liquider leur retraite.