Archives

Cinquième risque - Dépendance : les assurances entrent dans la danse

Les assureurs proposent depuis plus de vingt ans des contrats couvrant le risque dépendance. Avec deux millions de personnes couvertes par les sociétés d'assurances (auxquelles il faut ajouter un million de personnes couvertes par les mutuelles et les institutions de prévoyance), la France est même le second marché mondial en la matière, après les Etats-Unis. L'apport pour les personnes couvertes est loin d'être négligeable puisque les prestations moyennes servies sont actuellement de l'ordre de 600 euros par mois au titre des contrats à adhésion individuelle, en contrepartie de cotisations annuelles moyennes de l'ordre de 360 euros. Mais, jusqu'à présent, les sociétés d'assurance se faisaient discrètes dans le débat public. A l'approche des décisions sur la mise en place éventuelle d'un cinquième risque de la protection sociale (voir notre article ci-contre du 30 novembre 2009), les choses sont en train de changer. Il n'a pas échappé à la Fédération française des sociétés d'assurances (FFSA) que "les dernières orientations gouvernementales rejoignent les propositions de la FFSA, qui milite pour un partenariat mixte 'public-privé' du risque dépendance, associant assurance volontaire et solidarité nationale". En juin 2009, la revue "Risques - Les cahiers de l'assurance" a ainsi publié un numéro, fort bien fait, entièrement consacré au risque dépendance, avec en particulier des contributions de Jean-Louis Bianco - ancien ministre des Affaires sociales, député et président du conseil général des Alpes-de-Haute-Provence - et de Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances du Sénat. Le 18 décembre, le Cora (Conseil d'orientation et de réflexion de l'assurance, créé à l'automne 2008 par Bernard Spitz, président de la FFSA) organise ses premières rencontres sur le thème "La couverture de la dépendance, un choix de société". Xavier Darcos, le ministre du Travail et des Relations sociales, doit clôturer cette manifestation.
De son côté, l'Association des professionnels de la réassurance en France (Apref) a présenté, le 7 décembre, son projet de réforme de la prise en charge de la dépendance. La réassurance est en effet un acteur essentiel en la matière, compte tenu de l'étroitesse du marché, de la nature du risque et de la dispersion des assureurs dépendance. L'Apref propose ainsi de distinguer deux catégories. Les personnes correspondant à la demande "solvable" - la majorité de la population française - se verraient proposer un système assurantiel. Selon l'Apref, la cotisation pour un contrat dépendance à 60 ans serait de l'ordre de 900 euros par an pour une personne seule et de 1.200 euros pour un couple. Facultative, la souscription d'un contrat d'assurance dépendance bénéficierait cependant d'une incitation fiscale (crédit d'impôt remboursable et cotisations en franchise d'impôts et de cotisations sociales). Les personnes correspondant à une demande "moins solvable" continueraient de bénéficier d'une allocation personnalisée d'autonomie (APA), recentrée et améliorée sur la dépendance la plus lourde, qui n'est aujourd'hui que partiellement couverte. Les personnes ayant fait le choix de ne pas s'assurer et ne relevant pas du dispositif de solidarité pourraient être prises en charge si nécessaire, mais avec une récupération sur succession. Selon l'Apref, une telle réforme ramènerait le coût pour l'Etat - l'association semble ignorer le rôle des départements dans la prise en charge de la dépendance - d'environ 5 milliards d'euros (chiffres 2009) à 1,25 milliard (à profil de population comparable), au terme d'une période de transition d'une quinzaine d'années. Cette économie de 3,75 milliards d'euros - 1,5 milliard pour le recentrage sur les personnes les plus dépendantes et 2,25 milliards pour le transfert sur l'assurance - déboucherait toutefois sur un gain réel sensiblement plus réduit. L'Apref chiffre en effet à environ 3,5 milliards d'euros le coût des incitations fiscales nécessaires. Avec un solde net de 250 millions d'euros, on peut donc considérer plutôt qu'une telle réforme se ferait à coût nul.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis