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Economie - Travaux publics : beaucoup d'incertitudes pour 2010

Le chiffre d'affaires des entreprises de travaux publics a enregistré une baisse de 6% en 2009 tandis que l'emploi permanent du secteur est en repli de 2% seulement, a annoncé la Fédération nationale des travaux publics (FNTP) ce 17 décembre. "Nous avons fait le choix de maintenir l'emploi des jeunes que nous avons formés et embauchés ces dernières années, a justifié Patrick Bernasconi, président de la FNTP. En contrepartie la forte pression pour remplir le carnet de commandes et son corollaire, le sacrifice sur les prix, expliquent le recul de notre activité. Cette stratégie du "dos rond" nous fragilise et ne sera supportable que si la crise n'est pas durable."

Face à une commande privée atone et au retard des grands projets annoncés par l'Etat, c'est surtout grâce aux investissements des collectivités locales que le secteur a pu résister. Le remboursement anticipé du FCTVA prévu dans le plan de relance a véritablement joué le rôle d'"amortisseur de crise", selon l'expression de Patrick Bernasconi. Alors que plus de 19.500 collectivités ont signé une convention FCTVA, pour un volume global d'investissements de 54 milliards d'euros, la FNTP estime à 20 milliards d'euros les retombées de cette mesure sur le secteur des travaux publics.

Dérives sur les prix

Mais la fédération professionnelle met en garde contre la course aux bas prix. Depuis la crise du milieu des années 90, jamais le secteur n'avait connu pareille chute des prix. Aux effets de la concurrence exacerbée s'ajoutent selon la FNTP des "déviances" dans les modalités d'attribution des marchés passé en procédures adaptés (Mapa) conduisant parfois à attribuer les marchés après des négociations répétées à la baisse. "Nous avons eu connaissance de pratiques s'apparentant à du marchandage, ce qui est pourtant interdit par la loi", assure Patrick Bernasconi. Pour le président de la FNTP, cette dérive affecte surtout les petites entreprises qui risquent ainsi l'asphyxie. "Nous appelons à la raison les collectivités car l'emploi local peut en pâtir et cela peut aussi conduire à des dérapages en termes de sécurité et de qualité des travaux".

Pour 2010, la fédération ne masque pas son inquiétude. Les conditions d'une reprise franche de l'investissement privé ne sont pas encore réunies, estime-t-elle. Elle s'attend à un repli de 2% sur ce marché. L'Etat et les grands opérateurs devraient investir davantage dans les travaux publics (+2%) avec notamment la mise en place des programmes de développement et de modernisation d'itinéraires routiers (PDMI) qui se chiffrent à 500 millions d'euros, et le démarrage en fin d'année de la phase 2 de la LGV Est.

Une demande tirée par les communes

Mais beaucoup d'incertitudes demeurent sur les commandes des collectivités locales, qui représentent la moitié de l'activité et de l'emploi du secteur. Globalement, la FNTP s'attend à ce que leur demande diminue de 1,5%. Certaines dispositions peuvent contribuer à soutenir l'activité comme l'assouplissement pour 2009 et la reconduction pour 2010 de la mesure concernant le remboursement anticipé du FCTVA ou le déblocage d'un milliard d'euros de prêts à taux bonifié par les organismes professionnels et Dexia qui pourrait générer 4 milliards d'euros de travaux. Mais l'inquiétude liée à la réforme territoriale et à la taxe professionnelle et la dégradation financière de certains départements peuvent conduire à différer les projets, même si les besoins demeurent en termes de mobilité, d'environnement, de sécurisation du patrimoine, etc. La FNTP compte surtout sur les communes pour remplir les carnets de commandes car selon ses estimations la demande des régions devrait reculer de 3% et celle des départements de 7%.

Impasse sur les financements du Grenelle

Pour l'après 2010, la FNTP déplore une "absence totale de visibilité". "2009 aurait dû être une année donnant des perspectives en matière de réalisation d'infrastructures après les annonces du Grenelle de l'environnement prévoyant près de 100 milliards d'investissements d'ici à 2020 et celles du président de la République sur la construction simultanée de quatres lignes à grande vitesse, sans parler du grand emprunt. Force est de constater que l'horizon s'est plutôt assombri", a regretté Patrick Bernasconi. Le président de la FNTP juge que les infrastructures sont les "grandes oubliées" du grand emprunt alors que la commission Rocard-Juppé avait pourtant souligné leur importance. L'absence de publication du schéma national des infrastructures de transport, prévu par le Grenelle de l'environnement, qui aurait pourtant dû être présenté au Parlement avant la fin de l'année et l'insuffisance des ressources de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) font peser de lourdes incertitudes sur la volonté de l'Etat de mener à bien les projets. "Le financement des infrastructures est aujourd'hui dans l'impasse, estime Patrick Bernasconi. Si l'on n'y apporte pas de solutions, on ne pourra pas répondre aux exigences du développement durable. Nous allons saisir le Premier ministre à ce sujet."

Anne Lenormand

 

 

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