Transports - Trains Intercités : les régions repartent à l'offensive
Région oubliée de la modernisation ferroviaire, la Normandie, gérée par la droite depuis les dernières élections régionales, vient de proposer au gouvernement, en échange de nouveau matériel, de prendre en charge la gouvernance des trains Intercités ou trains d'équilibre du territoire (TET) assurant les liaisons avec Paris. "Plus qu'aucune autre région, la Normandie a un besoin urgent de trains neufs", a écrit Hervé Morin (UDI), le nouveau président du conseil régional, au Premier ministre, Manuel Valls, dans une lettre récente qui a été communiquée à la presse. "Les Normands méritent des trains Intercités ponctuels, confortables et qui offrent une qualité de services et un cadencement correspondant à leurs besoins", a-t-il ajouté, estimant que la situation actuelle du trafic ferroviaire entre la Normandie et Paris est "insupportable", particulièrement sur les lignes Paris-Rouen-Le Havre et Paris-Caen-Cherbourg.
Pénalisée par la politique du tout TGV de la SNCF, subissant les travaux de rénovation tardive de ses lignes ainsi que les ralentissements autour de Mantes et à l'approche de la gare Saint-Lazare, la Normandie a vu ces dernières années une nette détérioration du service ferroviaire vers et à partir de la capitale. Sur toutes les lignes menant à Paris ont été créés des comités d'usagers en colère.
"Plan de rattrapage"
Hervé Morin réclame à l'Etat un achat de matériel neuf spécifique pour la Normandie, qu'il qualifie de "plan de rattrapage". Il devait rencontrer le secrétaire d'Etat aux Transports, Alain Vidalies, le 18 février en fin de journée pour en parler. La Normandie est pour le moment la seule région ayant fait ce type de proposition au gouvernement, une proposition qui supposerait aussi de prendre en charge le déficit de ces lignes. Selon l'entourage du président de région, le sujet devrait aussi être évoqué lors de la réunion interministérielle programmée ce 19 février consacrée à la nouvelle feuille de route des TET. "Dans l'hypothèse où l'Etat financerait ce plan de rattrapage, je proposerai à l'assemblée régionale que la région Normandie se substitue à l'Etat comme autorité organisatrice de ces deux lignes", a précisé Hervé Morin.
En attendant, le point d'étape que doit faire le secrétaire d'Etat aux Transports sur la nouvelle feuille de route du TET suscite déjà l'irritation des régions. Dans un communiqué diffusé le 17 février, l'Association des régions de France (ARF) dénonce à la fois les "annonces sans lendemain" du gouvernement sur la "nouvelle donne Etat-régions" pour lutter contre le chômage et en appelle à l'arbitrage de Manuel Valls, notamment sur le dossier des trains Intercités.
Proposition de réutilisation des technologies utilisées pour les nouveaux TER
L'ARF reproche à Alain Vidalies de ne pas avoir consulté son président, "malgré ses nombreuses demandes de rendez-vous". "Pourtant, n'est-ce pas les régions qui sont en charge de l'ensemble des transports non urbains sur les territoires", s'interroge l'association selon laquelle "les annonces envisagées par l'Etat apparaissent en décalage total" avec les propositions des régions. Celles-ci proposaient de renouveler les trains Intercités en commandant des versions spécifiquement développées pour eux sur la base des trains régionaux Regiolis et Regio 2N produits par Alstom et Bombardier, dont les premières rames viennent d'être livrées aux régions.
"Cette proposition apportait à la fois une amélioration considérable des conditions dans lesquelles les centaines de milliers de voyageurs des TET sont transportés tous les jours, et à un moindre coût en passant par la réutilisation des technologies existantes développées pour les TER de dernière génération, estime l'ARF. Elle permettait également de répondre au risque de baisse de charge de travail chez Alstom et Bombardier qui mettrait en péril des milliers d'emplois si la décision du secrétaire d'Etat aux Transports devait être de relancer une procédure d'appel d'offres qui induirait un délai supplémentaire de près de trois ans."
Philippe Richert, président de l'ARF et de la région Grand Est, a donc décidé d'"en appeler à l'arbitrage du Premier ministre pour faire en sorte que cette 'nouvelle donne' soit réellement suivie d'effet" et "ne soit pas prise en otage par l'attitude d'un membre du gouvernement".