Fiscalité - Taxe professionnelle : dans l'attente des derniers arbitrages, un scénario se dessine
Il faudra patienter au moins jusqu'à la fin du mois pour connaître le scénario définitif que le gouvernement choisira concernant la réforme de la taxe professionnelle. Si les rencontres que Christine Lagarde, ministre de l'Economie, et Brice Hortefeux, ministre de l'Intérieur, ont organisées ce 8 juillet avec les représentants des élus locaux d'abord, puis avec ceux des entreprises, ont permis d'en savoir un peu plus sur les options que le gouvernement entend privilégier, l'impression laissée est en effet que la réforme est encore loin d'être bouclée.
Cependant, plusieurs principes semblent acquis au sujet des ressources qui se substitueront à la part de la taxe professionnelle assise sur les investissements. Cher aux associations d'élus locaux, l'impôt sur la valeur ajoutée serait bien institué et dissocié de l'impôt foncier. Mais son taux fixé nationalement serait progressif. Il serait nul pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 500.000 euros. A partir de ce seuil et jusqu'à 3 millions d'euros, le taux d'imposition serait compris entre 0 et 0,5% de la valeur ajoutée de l'entreprise. Entre 3 millions et 10 millions de chiffre d'affaires, il varierait de 0,5% à 1,4%. Enfin, pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est compris entre 10 millions et 50 millions d'euros, la variation du taux serait minime : de 1,4 à 1,5%.
Liaison des taux
Bercy étant opposé à un taux unique de 1,5% pour toutes les entreprises quelle que soit leur taille, les associations d'élus locaux avaient dû se résigner à accepter un taux progressif. Mais Bercy est allé au-delà de ce qu'elles avaient suggéré. "On voulait qu'un taux progressif s'applique entre 150.000 euros et 7,6 millions d'euros de chiffre d'affaires", indique Philippe Laurent, président de la commission des finances de l'Association des maires de France.
Réclamé par les associations d'élus, l'impôt économique sur le foncier verrait lui aussi le jour à partir de l'actuel impôt foncier et de la part de la taxe professionnelle assise sur le foncier. Les valeurs locatives des entreprises seraient par conséquent révisées, les établissements industriels bénéficiant cependant d'un régime de faveur avec une minoration de 15% de leur valeur locative. En contrepartie des nouveaux impôts, un certain nombre de gages sont donnés au Medef et à la Confédération générale des PME. L'impôt sur la valeur ajoutée et la taxe foncière acquittés par les entreprises ne pourront ainsi pas dépasser 3,5% de leur valeur ajoutée. De plus, la liaison des taux entre les impôts des ménages et ceux des entreprises serait renforcée.
Quelle répartition ?
Pour parvenir à compenser les 22 milliards d'euros de taxe professionnelle perçus par les collectivités au titre de la part sur les investissements, le gouvernement prévoit de transférer à leur profit une kyrielle de ressources fiscales déjà présentes, pour la plupart, dans le scénario dévoilé le 10 avril : taxe spéciale sur les conventions d'assurance (2,8 milliards), taxe sur les surfaces commerciales (600 millions), droit de mutation à titre onéreux (300 millions). Les recettes de TIPP, dont les élus locaux ne veulent surtout pas, ne figurent plus dans ce paquet. On y trouve à présent le transfert des frais d'assiette et de recouvrement (2,1 milliards d'euros). Viendraient s'y ajouter des taxes sectorielles pesant notamment sur les entreprises de l'énergie (1,2 milliard d'euros). Le reste serait compensé par des dotations de l'Etat dont le montant total atteindrait 4,8 milliards d'euros.
Il n'a en revanche pas été précisé quelle serait la répartition de l'impôt sur la valeur ajoutée. On ignore sur ce point si les agglomérations rejoindront les départements et les régions au rang des bénéficiaires. Une autre interrogation concerne la redistribution entre les collectivités territoriales des impôts payés par les ménages, sur laquelle aucune information nouvelle n'a filtré. Des questions techniques se posent aussi, comme la localisation de l'assiette des ressources fiscales attribuées aux collectivités.
Face à toutes ces questions restant à résoudre, plusieurs élus présents ont indiqué être restés sur leur faim. "On nous a donné l'épure sur la compensation de la taxe professionnelle, mais on ne nous dit pas comment elle va être répartie. Comment voulez-vous porter un jugement ?", a ainsi déclaré Claudy Lebreton, président de l'Assemblée des départements de France, à l'issue de la réunion - laquelle a finalement eu lieu au ministère de l'Intérieur et non à Bercy. Selon le nouveau calendrier présenté ce 8 juillet, la réforme, qui serait toujours intégrée à la loi de finances pour 2010, serait présentée en Conseil des ministres avant la fin du mois de septembre.
Thomas Beurey / Projets publics