Réforme fiscale - Les associations d'élus demandent le partage d'impôts nationaux
Les élus locaux doivent remettre à la ministre de l'Economie leurs propositions communes sur la réforme de la fiscalité locale, à l'occasion, ce mercredi 27 mai, d'une réunion à Bercy. S'il n'est peut-être "pas capital", ce rendez-vous n'en est pas moins "important", estime Claudy Lebreton, le président de l'Assemblée des départements de France (ADF), qui présentait ce 26 mai à la presse les sept pages du document récemment adopté par les bureaux des trois principales associations d'élus (AMF, ADF, ARF). Isolée, cette initiative contraste avec la conférence de presse conjointe que les trois partenaires avaient organisée en novembre 2007 lorsque ceux-ci avaient présenté un premier socle de propositions communes sur la réforme de la fiscalité locale (lire notre article du 14 novembre 2007 ). Que ressort-il de ces nouvelles propositions, affinées depuis le début de l'année au sein d'un groupe de travail conjoint aux trois associations placé sous la houlette de Philippe Laurent, président de la commission finances de l'AMF ?
Concernant la suppression de la taxe professionnelle, dont il sera avant tout question lors de la réunion de ce mercredi, les associations confirment leur souhait d'un nouvel impôt économique assis sur la valeur ajoutée et le foncier bâti des entreprises. La nouvelle imposition sur le foncier étant le résultat de la fusion de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la part de la taxe professionnelle fondée sur le foncier. Ce nouvel impôt économique local pourrait être affecté aux trois échelons de collectivités : les communes et leurs groupements, les départements et les régions. Les associations d'élus préféreraient cependant un second scénario prévoyant, d'une part, l'affectation de cet impôt aux seuls départements et régions et, d'autre part, la création d'une "contribution au développement de l'activité" au bénéfice des communes et de leurs groupements. Cet impôt reposerait sur une assiette "mixte" combinant la superficie occupée par l'activité et le nombre de salariés y travaillant et s'appliquerait aussi bien aux entreprises qu'aux administrations, selon des taux différents suivant les secteurs.
L'autonomie fiscale reste non négociable
En matière de fiscalité sur les ménages, peu de changements pour les communes, qui conserveraient les taxes foncière et d'habitation. La principale innovation résiderait dans la prise en compte des revenus dans la taxe d'habitation - à hauteur de 30% dans un premier temps, et dans une proportion plus importante par la suite.
Du côté des départements et des régions, la piste du partage des impôts nationaux, qui figurait déjà dans les propositions faites en 2007, est reconduite. Une part de CSG (d'un montant qui pourrait être de l'ordre de 2,15 milliards d'euros, selon l'ADF) reviendrait aux départements, tandis qu'une part de l'impôt sur le revenu (1,76 milliard d'euros) serait affectée aux régions. Les deux échelons demandent la possibilité de moduler les taux de ces parts d'impôts nationaux, même si les modalités techniques de cette possibilité n'ont pas été établies précisément.
D'autres ressources viendraient en complément : les droits de mutation actuellement perçus par les communes (soit 2,24 milliards d'euros) seraient affectés aux départements et un versement transport serait créé au profit des régions (d'un montant de 2,85 milliards d'euros). Celles-ci sont aussi intéressées par une taxe sur les activités numériques. Enfin, une fiscalité de nature écologique pourrait être instaurée par les collectivités, mais seulement celles qui le souhaitent.
La réforme que les associations d'élus appellent de leurs vœux devra renforcer l'autonomie fiscale des collectivités : les ressources propres de chaque échelon devront constituer au moins 50% de ses ressources. Pour le président de l'ADF, le principe de l'autonomie fiscale "n'est pas négociable". Claudy Lebreton rejette donc les propositions faites le 10 avril dernier par la ministre de l'Economie, qui ramènent selon lui l'autonomie fiscale des départements à "moins de 10%" de leurs ressources. Pour lui, l'autonomie fiscale et la libre administration des collectivités locales vont de pair et c'est ce cocktail qui a fait "le succès de la décentralisation à la française".
Face au gouvernement, les associations d'élus locaux "parleront d'une seule voix", assure Claudy Lebreton. "Si on se divise, nous sommes morts, confie-t-il. Le gouvernement imposera ses vues."
Pour l'heure, la suppression de la taxe professionnelle et son remplacement, qui doivent prendre place dans le projet de loi de finances pour 2010, constituent "la priorité", a rappelé le président de l'association. Sur la réforme d'ensemble de la fiscalité locale, "on n'a pas d'assurance", affirme Claudy Lebreton, pour qui celle-ci peut très bien "être reportée quand la réforme de la TP aura été faite".
Thomas Beurey / Projets publics