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Finances locales - Réforme de la DGF: les parlementaires dévoilent leurs propositions

Les groupes de travail de l'Assemblée nationale et du Sénat qui planchent sur la réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF) proposent un toilettage dans le projet de loi de finances pour 2017. Et définissent, dans un deuxième temps, les principes de la réforme globale qui entrerait en vigueur en 2018.

Les groupes de travail pluralistes que l'Assemblée nationale et le Sénat ont créés au début de l'année (voir nos articles des 15 février et 12 avril 2016) sur la dotation globale de fonctionnement (DGF) ont présenté le 29 juin à la presse les résultats de leurs réflexions communes. Ces analyses assorties de propositions figureront dans un rapport d'étape qui sera remis en juillet. Il est proposé une réforme en deux temps.
Tout d'abord, les parlementaires préconisent de remédier, via le projet de loi de finances pour 2017, à quatre "problèmes urgents" posés par la DGF actuelle.

Quatre questions à traiter dans le projet de loi de finances pour 2017

- Le prélèvement de la contribution au redressement des finances publiques sur les recettes fiscales des communes et des EPCI à fiscalité propre lorsque la dotation forfaitaire n'est plus suffisante (la fameuse "DGF négative"). 168 communes ont été concernées en 2016 pour un montant de 9 millions d'euros.

- Le nécessaire recalibrage de l'écrêtement de la dotation forfaitaire des communes (151 millions d'euros en 2015) qui finance notamment la moitié de la progression des dotations de péréquation communales. Le dispositif s'applique à quelque 17.000 communes et, pour 10.000 d'entre elles, il est plafonné à 3%. De l'existence de ce plafond, il résulte un report de charges de 51 millions d'euros en 2016 des communes les plus aisées vers des communes qui le sont moins. Une somme qui pourrait croître en 2017 du fait de la nouvelle baisse de la DGF. Pour les parlementaires, la solution consiste à supprimer le plafonnement, ou à augmenter progressivement son taux.

- La réforme de la dotation de solidarité urbaine (DSU). L'article 150 de la loi de finances pour 2016 qui rénove la DGF prévoit un recentrage de cette dotation de péréquation d'un montant total de 1,8 milliard d'euros. 667 communes de plus de 10.000 habitants, au lieu de 751, seraient éligibles. Les parlementaires confirment cette option. Ils proposent par ailleurs - comme s'apprête à le faire le Comité des finances locales - d'affecter la croissance de la DSU non plus uniquement aux 250 communes les plus défavorisées, mais à l'ensemble des communes bénéficiaires, en faisant varier (dans des proportions à définir) les montants alloués en fonction des ressources et des charges.
A noter : le sort de la dotation nationale de péréquation (DNP) n'est désormais plus scellé. Alors que la dernière loi de finances envisageait sa suppression en 2017, les parlementaires penchent pour la conserver.

- La réduction de l'enveloppe de la dotation d'intercommunalité consacrée aux communautés d'agglomération. Avec la transformation en 2015 et 2016 de plusieurs d'entre elles en communautés urbaines et métropoles, les communautés d'agglomération restantes ont enregistré cette année une perte de 4,3% de leur dotation d'intercommunalité par rapport à 2015 (sans tenir compte de la réduction de la DGF). Le problème est d'autant plus sérieux qu'il pourrait s'aggraver en 2017.

Certaines de ces questions font l'objet de discussions dans le cadre des travaux du Comité des finances locales (CFL) et d'autres seront au menu de l'instance dans les mois qui viennent. Nul doute qu'elles donneront lieu à des mesures dans le projet de loi de finances pour 2017.

Les principes d'une réforme globale de la DGF

S'agissant de la réforme globale de la DGF, Christine Pires Beaune, rapporteure du groupe de travail de l'Assemblée nationale, a "regretté" la décision du président de la République de la reporter à 2018. Mais, avec ses collègues, elle en prend acte et fait donc des propositions dans la perspective de la discussion qui aura lieu en principe en 2017. Les parlementaires s'attachent à revoir les grands principes de la réforme, en annonçant que ceux-ci seront adaptés pour l'Outre-Mer afin de prendre en compte ses spécificités.
La dotation forfaitaire des communes resterait organisée en trois parts : dotation de base, dotation de centralité et dotation de ruralité. Mais les paramètres de chacune de ces dotations seraient modifiés.

- Dans le schéma prévu par les groupes de travail de l'Assemblée nationale et du Sénat, la dotation de centralité, qui fait l'objet de nombreuses critiques de toutes parts, est "profondément remaniée". On se souvient qu'en l'état de la législation, elle doit être en partie territorialisée, c'est-à-dire déterminée selon des critères calculés à l'échelle du territoire intercommunal. Les parlementaires acceptent, "à contrecœur" pour certains, de reculer sur ce point. La dotation serait donc attribuée aux seules communes. En parallèle, l'utilisation de la "puissance 5" pour calculer la dotation serait abandonnée. C'est "sans regrets", a confié Christine Pires Beaune. En expliquant que ce paramètre est inadapté, en particulier dans le cas des territoires polycentriques.
La dotation de centralité serait attribuée essentiellement en fonction de critères démographiques. En sachant que l'ajout d'une enveloppe indépendante permettrait de prendre en compte les charges de centralité des bourgs-centres en milieu rural.

- La dotation de ruralité serait modifiée "à la marge". Elle varierait en fonction de la population et de la densité.

- Enfin, la dotation de base serait non plus déterminée dès le départ, mais "serait considérée comme le solde de l'enveloppe restant après le calcul des enveloppes dédiées à la centralité et à la ruralité".

Quant à la dotation d'intercommunalité, elle serait répartie en trois parts, avec une dotation d'intégration et une dotation de péréquation. Une troisième part représentant 20% de la dotation d'intercommunalité serait territorialisée. "Il s'agirait notamment de prendre en compte les charges propres de l'EPCI au regard de son territoire", a expliqué Charles Guené, l'un des deux rapporteurs du groupe de travail du Sénat.

Conserver certaines garanties, en particulier au bénéfice des communes rurales

Ce schéma serait complété par une dotation globale de péréquation. Alimentée notamment par l'actuelle dotation nationale de péréquation, elle bénéficierait aux communes pauvres et à celles qui sont "moyennement pauvres". Cette modification est de nature à améliorer l'acceptation de la réforme. De même que la nouvelle approche qu'ont les parlementaires au sujet des garanties de DGF. Ils estiment qu'une partie de la part garantie de la dotation forfaitaire devra être conservée, alors que la réforme votée à l'automne dernier prévoit sa suppression intégrale. Certaines de ces garanties sont "justes", reconnaît le groupe de travail. Celui-ci mentionne les garanties perçues par des communes rurales, dont certaines correspondent à des charges de voirie particulièrement lourdes. "Si vous faites tomber ces garanties, les communes ne peuvent plus fonctionner", souligne Claude Raynal, l'un des deux rapporteurs du groupe de travail du Sénat. Les garanties bénéficiant au monde rural visent aussi à compenser la suppression de dotations de péréquation intervenue lors de la réforme de la DGF décidée en 2003. Elles doivent donc être préservées.

Autre question technique abordée par les parlementaires : la durée de la transition entre le système actuel et le nouveau. Ils veulent réduire cette phase de 40 ans à 10 ans. "La première année, la réforme serait appliquée sur 10% du montant total, puis sur 20%, etc.".

Côté agenda, les rapporteurs des groupes de travail souhaitent que la réforme ne soit désormais plus différée. Ils soutiendront par conséquent un amendement qui reportera à 2018 l'application de l'article 150 de la loi de finances pour 2016. De cette manière, le Parlement "continuera à débattre du sujet en 2017", souligne Claude Raynal. En effet, sans nouvelle discussion, l'article de loi entrera en vigueur. En revanche, supprimer l'article pourrait être compris comme le renoncement à cette réforme. Ce serait "le pire" des scénarios, commente Claude Raynal, qui considère que le choix de l'année 2018 pour l'entrée en vigueur de la réforme facilitera son acceptation. La baisse des dotations - qui ajoute une difficulté à la conduite de la réforme -, rappelle-t-il, doit en effet s'arrêter en 2017.