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Finances locales - La réforme de la DGF préoccupe les maires des villes-centre de taille intermédiaire

Le congrès de Villes de France s'est conclu le 24 juin par un débat consacré aux finances locales et, notamment, à la réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF). Malgré le report annoncé par François Hollande, les maires restent mobilisés sur ce chantier aux enjeux multiples pour leurs villes-centre dont les charges restent insuffisamment prises en compte. Alors que le groupe de travail parlementaire consacré à la réforme doit présenter ses premières conclusions ce 29 juin, Estelle Grelier a apporté des éléments de réflexion sur cette mise à plat qui devrait s'opérer en deux temps.

C'était le premier congrès d'élus locaux depuis les annonces de François Hollande le 2 juin en clôture du Congrès des maires - annonce d'une réduction de moitié de la baisse des dotations et annonce d'un report de la réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF) qui ne sera plus noyée dans le prochain projet de loi de finances (PLF). Il s'agissait cette fois du congrès de Villes de France, l'ex-Fédération des villes moyennes, qui se tenait ces 23 et 24 juin à Beauvais, la ville de Caroline Cayeux, la présidente de cette association qui entend représenter "les villes et agglomérations de taille infra-métropolitaine".
Villes de France avait cette année fait le choix d'un congrès thématique, en consacrant les échanges aux champs du sport et de la culture (Localtis y reviendra dans une prochaine édition). Et notamment aux difficultés et solutions qui font aujourd'hui le quotidien des élus souhaitant continuer à développer (ou du moins à maintenir…) l'offre sportive et culturelle de leur territoire malgré des ressources financières de plus en plus contraintes.
La dernière séquence du congrès s'est toutefois recentrée sur l'actualité des finances locales : les récentes annonces du chef de l'Etat, donc, mais aussi les travaux sur la réforme de la DGF qui se poursuivent malgré tout. Ces travaux sont en effet à l'honneur ces jours-ci, que ce soit du côté du comité des finances locales (CFL), qui doit se réunir ce mardi 28 juin, ou du côté du Parlement avec la présentation le 29 juin, devant les commissions des finances de chacune des deux assemblées, des premières conclusions du groupe de travail conjoint Assemblée-Sénat.

Une réforme en deux temps

Lors de cette séquence, diverses voix se sont exprimées quant à l'articulation des divers calendriers. Ainsi, Jean-François Debat, président délégué de Villes de France, s'est réjoui que le président de la République ait décidé de "donner du temps" à la réforme de la DGF, souhaitant que ce temps soit mis à profit pour mener "une discussion de fond" sur les objectifs et les critères et pour aboutir à une réforme pérenne. Avec certes encore une inconnue, à savoir le devenir de la courbe des dotations au-delà de 2017. Or il n'est évidemment pas facile de "parler de la répartition d'une enveloppe" dont on ne connaît pas le volume… "Avoir voulu en même temps baisser les dotations et réformer la DGF, c'était la double peine pour certaines communes", a pour sa part témoigné Jacques Lamblin, député-maire de Lunéville, lui aussi satisfait qu'il y ait désormais "18 mois pour avancer".
Pour la secrétaire d'Etat Estelle Grelier, venue le 24 juin participer à ces échanges, pas question toutefois de temporiser éternellement sur cette réforme : "Je pense qu'il y a précisément urgence quand il y a raréfaction des ressources." La représentante du gouvernement a d'ailleurs confirmé l'hypothèse d'une réforme en deux temps : "Il n'est pas exclu qu'un certain nombre de dispositions soient retenues dès le PLF 2017 par voie d'amendements" même si l'essentiel de la réforme fera l'objet d'un texte spécifique, a en effet dit Estelle Grelier.
Les élus qui travaillent actuellement sur le sujet, on le sait, envisagent en effet que le volet péréquation de la réforme puisse être inscrit dans le PLF : la dotation de solidarité urbaine (DSU), peut-être aussi le fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic)... mis à part sans doute la dotation de solidarité rurale (DSR), très liée à la dotation forfaitaire (lire notre article du 9 juin). Charles Guené, copilote du groupe de travail pour le Sénat, considère lui aussi que "des choses peuvent être regardées et modifiées tout de suite". Le rapport dont les conclusions seront présentées mercredi 29 juin sera estampillé "rapport d'étape", a précisé le sénateur.
Eric Julla, directeur Sud de Ressources consultants finances, qui œuvre en appui au groupe de travail parlementaire, a toutefois fait valoir un autre point de vue : "La péréquation peut-elle être traitée séparément du reste de la réforme ? Je ne le crois pas. La péréquation, cela doit venir à la fin, une fois considérées les conséquences de la réforme de la dotation forfaitaire."
Le consultant a au passage livré à l'auditoire quelques formules clefs sur l'enjeu de la réforme. Il s'agit notamment de savoir "comment arbitrer entre une dotation forfaitaire, centrée sur des critères de charges, et une péréquation, qui traite de l'inégalité des moyens pour faire face à ces charges". Et Eric Julla d'estimer nécessaire "qu'on ait à l'avenir trois dotations de péréquation", au lieu des seules DSU et DSR dont sont exclues un nombre non négligeable de communes. Ou bien encore, par exemple, que l'on "intègre la compensation de la taxe professionnelle dans la dotation forfaitaire".

Faut-il aller au-delà de l'article 150 ?

Du côté des élus, plusieurs exigences ont été exprimées, par Caroline Cayeux au nom de Villes de France comme par d'autres. Tous ont mis en avant la nécessité d'un "rebasage". Le rapport des parlementaires comprendra des propositions en ce sens et Estelle Grelier a acquiescé. Ils ont naturellement insisté sur une meilleure prise en compte des charges de centralité et donc sur la dotation de centralité – une constante dans les préoccupations de ces maires de villes-centre. Tout comme sur l'introduction d'un "effort fiscal rénové". Jean-François Debat a pour sa part mis l'accent sur "l'attribution de compensation dégressive" permettant de "transférer un équipement de manière douce de la commune vers l'EPCI". En relevant d'ailleurs au passage qu'il faudrait assouplir la règle de l'unanimité des maires pour ces transferts d'équipements afin d'éviter que "la voix d'un seul maire suffise à tout bloquer".
"Toute réforme devrait passer par une prise en compte des ressources totales des collectivités. Et au niveau des charges, on a aujourd'hui des indices synthétiques qui ne satisfont personne", a résumé Charles Guené. Selon le sénateur, la question sera de savoir si l'on se contente d'une réforme restant "dans le cadre de l'article 150" de la loi de finances pour 2016, qui a posé les principes de cette réforme, ou s'il n'est pas plutôt préférable d'opter pour une réforme "beaucoup plus audacieuse".
Pour Estelle Grelier, "l'article 150 a le mérite d'apporter une simplification". Même si un certain nombre de sujets restent effectivement en suspens : "la polycentralité", "le recyclage des parts figées", "les DGF négatives"… "Si on ne prend pas de DGF négative, on renonce à prendre aux plus riches", a toutefois relevé Charles Guené.
La secrétaire d'Etat a en outre abordé le débat sur la "DGF territorialisée", estimant qu'il faut "apaiser la question". L'idée est bien, a-t-elle rappelé, de "faire confiance aux élus pour répartir au mieux la DGF sur le territoire intercommunal", en prévoyant certes des mécanismes de régulation. Jean-François Debat a émis quelques réserves : "Philosophiquement, on peut y souscrire. Mais dans les faits, si cela revient à une discussion entre un élu, celui de la ville-centre, seul face aux dizaines d'autres élus de l'agglomération… Il faut en tout cas que l'Etat garde la possibilité de fixer des règles". "La DGF territorialisée pose encore des problèmes", a souscrit Caroline Cayeux.
Enfin, en matière de péréquation, Estelle Grelier a évoqué la hausse de la DSU qui, parce qu'elle est "financée par les autres collectivités", pourrait finir pas poser "la question de son acceptabilité". Quant au Fpic, elle a reconnu que "l'absence de prévisibilité" de ce fonds, avec des notifications intervenant après le vote des budgets locaux, pouvait poser problème. Et la secrétaire d'Etat d'ajouter : "Je pense qu'il faut refondre le Fpic" et, alors que sa trajectoire prévoit de le porter à 1,2 milliard, "je pense qu'il faut le maintenir à 1 milliard d'euros".

 

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