Enfance / Famille - Proposition de loi Famille : l'autorité parentale fait débat
Après le passage du texte en commission de lois (voir notre article ci-contre du 7 mai 2014), l'Assemblée nationale a entamé, le 19 mai, l'examen de la proposition de loi relative à l'autorité parentale et à l'intérêt de l'enfant, présentée par Bruno Le Roux, le président du groupe socialiste, et Barbara Pompili, la co-présidente du groupe écologiste, et signée par l'ensemble des parlementaires socialistes et apparentés. Ce texte reprend certaines dispositions du projet de loi Famille, dont le Premier ministre a annoncé l'abandon en février dernier.
La double domiciliation vaut-elle garde alternée ?
Malgré un large consensus sur plusieurs aspects du texte - comme les dispositions relatives à la médiation familiale -, la discussion s'annonce plutôt animée. Si le texte ne reprend pas les dispositions controversées de l'ancien projet de loi Famille sur l'ouverture de la PMA aux couples de lesbiennes et sur la GPA (gestation pour autrui) - Manuel Valls a donné l'assurance qu'il n'en serait pas question avant la fin de la législature -, une nouvelle disposition fait désormais polémique : la question du domicile parental en cas de séparation, derrière laquelle se profile en réalité celle de l'autorité parentale (l'un des deux éléments du titre de la proposition de loi).
L'UMP a ainsi déposé pas moins de 600 amendements sur le texte, sur un total de 700. Dans un entretien au Parisien, Laurence Rossignol, la secrétaire d'Etat chargée de la Famille, a jugé ce nombre d'amendements "totalement disproportionné", au regard d'un texte de 20 articles.
La crainte exprimée par l'opposition est que l'instauration de la double domiciliation prévue par le texte - et qui devrait remplacer la notion de droit de visite et d'hébergement - débouche rapidement sur une résidence alternée systématique et paritaire (l'enfant passant successivement de l'un à l'autre parent pour des périodes identiques). Une telle perspective est également critiquée par la plupart des pédopsychiatres, qui y voient un facteur de perturbation supplémentaire pour l'enfant.
Oui à "une évolution du texte pour le clarifier"
Lors de la discussion générale, Laurence Rossignol s'est donc voulue à la fois très claire et rassurante. Elle a ainsi affirmé "qu'il ne s'agit en aucun cas d'imposer la résidence alternée paritaire par défaut. Ce serait une facilité intellectuelle et un raccourci que de faire croire que l'on réalisera l'égalité entre les femmes et les hommes en imposant une égalité du temps d'accueil des enfants". Elle s'est dite ouverte à des clarifications sur ce point : "S'il faut une évolution du texte pour le clarifier, le débat se poursuivra au cours des navettes parlementaires".
Ces arguments n'ont toutefois pas dissuadé l'UMP - qui ne votera pas le texte - de déposer une motion de renvoi en commission (écartée par les députés) et l'UDI de s'orienter vers une "abstention négative".
Des nouvelles de la proposition de loi sur la protection de l'enfance et l'adoption
Un amendement du groupe EELV (Ecologistes) proposant une interdiction de la fessée - finalement retiré en contrepartie de l'engagement de le rattacher à un texte plus approprié - a permis d'en apprendre un peu plus sur la seconde proposition de loi qui devrait être issue du défunt projet de loi Famille. Marie-Anne Chapdelaine, la rapporteure (PS) du texte en discussion, a en effet confirmé qu'une proposition de loi devrait être déposée prochainement au Sénat sur la protection de l'enfance et l'adoption, deux domaines qui concernent au plus haut point les départements. Le dépôt éventuel d'une telle proposition de loi est toutefois suspendu aux conclusions, d'ici à l'été, d'une mission d'information sénatoriale sur la protection de l'enfance.
Après l'examen de la proposition de loi à l'Assemblée nationale du 19 au 21 mai, le vote sur le texte devrait intervenir le 28 mai.
Jean-Noël Escudié / PCA
Référence : proposition de loi relative à l'autorité parentale et à l'intérêt de l'enfant (examiné en première lecture à l'Assemblée nationale du 19 au 21 mai, scrutin prévu le 28 mai 2014).