Enfance - L'adoption par un couple homosexuel n'est pas possible si l'enfant est né d'une PMA à l'étranger
Après un récent jugement du tribunal de grande instance (TGI) de Nantes mettant en évidence les failles du dispositif juridique de l'accouchement secret (voir notre article ci-contre du 25 avril 2014), c'est au tour d'un autre jugement - émanant du TGI de Versailles - de soulever des questions juridiques sur l'adoption, compliquant encore un peu plus la tâche des départements en la matière.
Une décision incertaine
En l'occurrence, le TGI de Versailles a refusé, dans un jugement du 29 avril, l'adoption, par deux couples de femmes homosexuelles, de l'enfant de l'une d'entre elles né par le biais d'une procréation médicalement assistée (PMA) réalisée à l'étranger. En l'absence du texte du jugement, il convient de rester prudent, étant donné que seuls les avocats de la défense et les associations ont commenté la décision. Il semble toutefois que le jugement du TGI s'appuie sur un supposé détournement de la loi française, dans la mesure où les deux mères concernées (pour lesquelles il n'y a pas de problème de filiation) se sont rendues à l'étranger pour bénéficier d'une PMA, alors que celle-ci n'est pas ouverte en France aux couples de femmes.
Cette décision - dont il reste à connaître le sort en appel, voire en cassation - ne clarifie pas vraiment la situation. La loi du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe - dite aussi loi "mariage pour tous" - est sans ambiguïté sur le principe : l'adoption par un couple homosexuel relève du même régime de droit commun et des mêmes droits que celle portée par un couple hétérosexuel.
Aux juges de trancher
Mais, si elle a ainsi posé le principe, la loi du 17 mai 2013 a laissé un certain nombre de zones d'ombre sur les modalités de mise en œuvre de ce droit. Ainsi, la loi visait à ouvrir aux couples homosexuels la procédure classique d'adoption (avec en particulier le passage par l'agrément du candidat à l'adoption par le président du conseil général), mais aussi à régulariser la situation de fait de nombreux couples homosexuels vivant avec un ou plusieurs enfants issus de l'un des membres de ce couple.
En revanche, la loi est restée muette sur le cas des enfants conçus par PMA, puisque cette dernière - qui a jusqu'à présent le caractère d'un traitement médical de l'infertilité - n'était pas ouverte aux couples de femmes. L'idée était alors de renvoyer à un texte ultérieur traitant de la PMA, voire de la gestation pour autrui (GPA), mais chacun sait ce qu'il en est advenu. Dès lors, il revient aux juges de combler le vide juridique.
Mais le problème est que la jurisprudence demeure pour le moment divergente. Il semblerait en effet que plusieurs tribunaux ont discrètement rendu des décisions autorisant l'adoption dans des cas similaires. Le précédent gouvernement ayant exclu, le 25 février dernier, d'apporter des instructions aux parquets par circulaire et Manuel Valls ayant affirmé, le 28 avril, que le gouvernement s'opposera à tout texte ou tout amendement sur l'extension de la PMA "jusqu'à la fin de la législature", seule une jurisprudence de la Cour de cassation pourrait dégager une ligne claire. Mais une telle hypothèse semble peu probable avant 12 à 18 mois.