Petite enfance - Mobilisation contre le projet de décret assouplissant les modes de garde
La tension monte autour du projet de décret assouplissant les modalités d'encadrement des modes de garde. Le collectif "Pas de bébés à la consigne" - qui regroupe une quarantaine d'organisations syndicales ou d'associations spécialisées, dont le Collectif d'associations de directeurs et responsables d'établissement et services petite enfance, le Syndicat national des médecins de protection maternelle et infantile (SNPMI) ou la Fédération nationale des éducateurs de jeunes enfants - appelle ainsi à une manifestation nationale le 11 mars 2010. La Fédération CGT des services publics et la CFDT Interco ont d'ailleurs déposé des préavis de grève pour ce même jour dans les établissements d'accueil de la petite enfance. Parti du métro Glacière (à proximité du siège de la défenseure des enfants), le cortège rejoindra les abords de Matignon, tandis qu'une délégation demandera à être reçue par un conseiller du Premier ministre.
Sous l'accroche générale "Ni sardines, ni à la consigne, les bébés doivent garder bonne mine !", le collectif exige le retrait du projet de décret sur l'accueil collectif et entend dire "non à la grande braderie des modes d'accueil, non aux modes 'discount' de garde 'low cost'". Les signataires - qui ont déjà mal accepté l'intégration des structures d'accueil de la petite enfance dans le champ de la directive européenne Services (voir notre article ci-contre du 22 février 2010) - estiment que les mesures prévues par le projet de décret s'ajoutent à d'autres "régressions". Sont notamment citées la réduction de 60 à 30 heures du temps de formation initiale des assistantes maternelles agréées qui accueillent les enfants à leur domicile (les 30 heures restantes étant réalisées dans un second temps) ou encore la "suppression de milliers de postes d'enseignants et [la] fermeture de classes de tout-petits en école maternelle".
Le projet de décret a été soumis le 2 février au conseil d'administration de la Caisse nationale d'allocations familiales, qui a émis un avis largement favorable (22 voix pour, 7 voix contre, 2 abstentions et 3 "prises d'acte", selon les chiffres transmis par la Cnaf). Il est vrai qu'une première version du texte avait reçu un avis défavorable de la Cnaf en octobre dernier et que le gouvernement avait revu sa copie en conséquence. Le décret devrait être publié très prochainement, toute la question étant désormais de savoir s'il le sera avant le 11 mars. Le texte prévoit plusieurs mesures assouplissant les règles qui encadrent les modes de garde collectifs, dans le prolongement des mesures récemment adoptées par le Parlement. Ainsi, il abaisse de 50% à 40% la proportion minimale obligatoire de personnel qualifié (puéricultrices, éducateurs de jeunes enfants, auxiliaires de puériculture, infirmiers ou psychomotriciens) dans les établissements d'accueil des enfants de moins de 6 ans. A l'inverse, il accroît la possibilité d'accueil en surnombre pour faire face à des pointes d'activité. Jusqu'à présent limité à 10% quelle que soit la taille de la structure, ce surnombre pourra être de 15% pour les établissements de 21 à 40 places autorisées et de 20% au-delà de 40 places. Le taux d'encadrement - toutes catégories de personnels confondues - d'un adulte pour cinq bébés ou pour huit enfants qui marchent est en revanche maintenu.
Pour le gouvernement, il s'agit à la fois de "répondre aux besoins des familles" et d'atteindre l'objectif présidentiel de 200.000 places supplémentaires d'accueil de la petite enfance à l'horizon 2012. Mais pour les syndicats et les associations spécialisées - sceptiques sur la réalisation de cet objectif -, toutes ces mesures d'assouplissement se feront au détriment des conditions d'accueil des enfants de moins de six ans.
Jean-Noël Escudié / PCA