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Habitat - Manuel Valls présente son plan de relance du logement

Après un premier train de mesures annoncé par Sylvia Pinel le 25 juin dernier et centré sur l'accession à la propriété et la simplification des normes, Manuel Valls a pris les choses en main en présentant à Matignon, vendredi 29 août, "son" plan de relance du logement. Beaucoup d'incitations fiscales, pas mal de mesures de simplification et, au passage, la réduction à peau de chagrin des deux mesures phares de la loi Alur portée par Cécile Duflot : la garantie universelle des loyers et l'encadrement des loyers.

"Il est plus que temps de lutter avec détermination et pragmatisme contre la crise du secteur du logement", a déclaré Manuel Valls, vendredi 29 août, en préambule à la présentation de son "Plan de relance du logement". Il en fait "une priorité d'action". Convaincu que la crise du logement résulte du fait que "nous n'avons pas assez construit", il s'attaque dans ce plan à "simplifier les règles, assouplir les dispositifs, encourager la construction".
Sylvia Pinel, ministre du Logement, de l'Egalité des territoires et de la Ruralité - qui se trouvait à ses côtés - est chargée de réaliser un "tour de France de la construction" dès octobre 2014 au cours duquel elle réunira, dans chaque région, les acteurs qui peuvent contribuer à l'effort global en faveur de la construction de logements. Matignon les a identifiés : préfets et services de l'Etat dans les territoires, établissements publics fonciers et établissements publics d'aménagement, collectivités locales, promoteurs immobiliers et bailleurs sociaux, professionnels du bâtiment.

Simplification : "Nous devons aller plus loin"

Au chapitre de la simplification, Manuel Valls s'est inscrit dans la continuité des "50 mesures de simplification" que Sylvia Pinel avait présentées le 25 juin dernier, tout en insistant : "Nous devons aller plus loin !" Par exemple, les normes obligeant à construire des parkings devraient être assouplies dans les zones desservies en transport en commun et il faudrait créer un "bonus de constructabilité pouvant aller jusqu'à 50%" afin de favoriser les projets de construction de logements au sein des zones d'activité en entrée de ville ou dans les zones à dominante commerciale desservies par des transports publics réguliers. Ces deux mesures sont au menu du projet de loi habilitant le gouvernement à simplifier la vie des entreprises qui sera examiné au Parlement à l'automne 2014. Et Manuel Valls promet d'en lancer de nouvelles "d'ici la fin de l'année".
Il a par ailleurs confié au préfet Jean-Pierre Duport, ex-délégué de la Datar, ex-préfet de Paris, ex-président de RFF (Réseau ferré de France), une mission visant à trouver les moyens de simplifier et de raccourcir les procédures d'obtention des permis de construire. En attendant les conclusions de la mission, dans trois mois, Manuel Valls a décidé que la durée de validité des permis de construire en cours est portée de 2 à 3 ans.

Encadrement des loyers : à Paris uniquement et "à titre expérimental"

C'est au registre de la "simplification" que le Premier ministre a décidé que le dispositif d'encadrement des loyers, ardemment défendu par Cécile Duflot dans le cadre de sa loi Alur, "sera appliqué à titre expérimental à Paris". "Il ne sera pas étendu aux autres agglomérations concernées tant qu'un bilan sur sa mise en œuvre n'aura pas été réalisé", a-t-il déclaré, après avoir écouté "tous les acteurs (qui) disent : les conditions techniques ne sont pas réunies, et ne le seront pas avant des mois, voire des années. C'est notamment le cas pour la collecte des données des loyers. Cette situation complexe génère trop d'incertitude pour les investisseurs".
L'ombre de l'ex-ministre du Logement plane également dans le chapitre "assouplir". Concernant l'investissement locatif, le Premier ministre observe que "les objectifs fixés lors de la création du dispositif Duflot ne sont que partiellement remplis". Il veut "le modifier en profondeur en offrant aux investisseurs plus de souplesse et d'opportunités"… et au passage le débaptiser ! "J'imagine que, comme le veut la tradition, ce nouveau dispositif prendra le nom de la ministre qui l'a fortement amélioré : Sylvia Pinel", a-t-il glissé.

Avec le "Pinel", on pourra louer à ses enfants…

Le nouveau dispositif permettra de choisir parmi trois durées d'engagement de location : 6, 9 ou 12 ans. Sous certaines conditions, il sera désormais possible de louer à ses ascendants ou descendants. Cette formule devrait notamment séduire les parents qui souhaitent à la fois réaliser un placement immobilier et disposer d'un logement pour leurs enfants étudiants. Elle pourrait se révéler efficace, dans la mesure où l'âge moyen lors de la réalisation d'un investissement locatif correspond à celui où les parents commencent à financer les études supérieures de leurs enfants.
Par ailleurs, les conditions d'accès au dispositif des sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) seront alignées sur celles des particuliers, dans la mesure où "les SCPI contribuent en effet de manière importante à la production de logements locatifs intermédiaires".
Pour mémoire, le dispositif Duflot avait déjà fait l'objet d'un premier aménagement, annoncé le 25 juin et consistant - au contraire - à porter la durée de la période de location de neuf à douze ans, en contrepartie d'une amélioration de la déduction fiscale, passée de 18% à 21% de la valeur d'achat plafonnée du bien immobilier.
En revanche, le gouvernement n'a pas voulu sortir la déduction fiscale du Duflot du plafond global des niches fiscales, fixé depuis 2013 à 10.000 euros (alors qu'il était encore de 18.000 euros + 4% des revenus en 2012).

"Libérer les terrains ! Beaucoup plus de terrains !"

Enfin, Manuel Valls veut "encourager". Et d'abord "libérer les terrains ! beaucoup plus de terrains !" Terrains publics et terrains privés.
Côté public, il a rappelé avoir missionné cet été le sénateur et ancien ministre délégué du gouvernement Ayrault, Thierry Repentin, également ancien président de l'Union sociale pour l'habitat, pour "lever les obstacles qui retardent les cessions de foncier public" et surtout "faire remonter à (son) arbitrage les cas les plus difficiles". Il a peut-être sa petite idée sur la question des blocages, puisqu'il a ajouté "les grands opérateurs publics, les ministères et bien sûr France Domaine doivent pleinement assumer leurs responsabilités et jouer le jeu".
Côté privé, le Premier ministre veut sans surprise revoir la taxation des plus-values mobilières sur les terrains à bâtir avec des mesures qui "seront applicables immédiatement à toutes les ventes résultant de promesses conclues dès lundi 1er septembre".

Inciter fiscalement à vendre rapidement

La taxation des plus-values mobilières sur les terrains à bâtir prendra désormais la forme d'un abattement exceptionnel sur le montant de la plus-value réalisée sur la vente de ces terrains, sous réserve que leurs propriétaires les vendent dans les premières années de leur détention. L'objectif est en effet d'inciter les propriétaires qui se trouvent dans cette situation à vendre rapidement leurs terrains pour maximiser leur plus-value nette. "De manière temporaire, nous allons accorder un abattement exceptionnel de 30% de l'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux, lorsque les promesses de vente auront été conclues avant le 31 décembre 2015", a précisé le Premier ministre.
Afin d'élargir le vivier des terrains concernés, la mesure prévoirait que, pour le calcul de l'abattement, la durée de détention du terrain serait prise en compte à partir de moment où il devient constructible, quelle que soit la durée effective de détention.
Par ailleurs, les donations de terrains bénéficieront d'un abattement exceptionnel de 100.000 euros jusqu'à la fin de l'année 2015, "à la condition que ces terrains soient ensuite construits".

Sans oublier les logements sociaux

Pour relancer la production de logements intermédiaires, Manuel Valls a évoqué "une intervention exceptionnelle de l'Etat et de la Caisse des Dépôts" visant à financer la construction "de plus de 30.000 logements à loyers intermédiaires en zone tendue au cours des cinq prochaines années".
Pour encourager la production de logements sociaux, Manuel Valls a été ferme : "Les obligations prévues par la loi SRU, et renforcées par la loi Duflot en matière de construction de logements sociaux, seront respectées. Nous y veillerons" et "les pénalités prévues, c'est-à-dire multipliées par 5, seront donc appliquées dès le 1er janvier 2015". Consignes seront données aux préfets pour délivrer des permis de construire en lieu et place des "maires défaillants" dès 2015.
Il a par ailleurs promis qu'il annoncerait "prochainement" (peut-être au congrès HLM d'octobre ?) une "mesure de soutien aux maires bâtisseurs".

L'accession, toujours "priorité d'action"

Concernant l'accession à la propriété, qui "demeure une priorité d'action", des choses avaient déjà été faites et il les a rappelées : "Le PTZ a été renforcé sur les zones où son effet de levier est le plus grand pour les classes moyennes et populaires", "le PTZ a été ouvert à l'achat de logements anciens à réhabiliter, lorsqu'ils sont situés en milieu rural" et "le barème du prêt d'accession sociale a été harmonisé avec celui du PTZ afin de sécuriser les projets des accédants à la propriété". A l'occasion de ce plan de relance un effort supplémentaire sera fait sur les modalités de remboursement pour alléger l'endettement des ménages, a-t-il promis pour le 1er octobre.
Le Premier ministre a également annoncé que la TVA réduite sera appliquée aux constructions neuves pour les accédants à la propriété dans les nouveaux quartiers prioritaires de la politique de la ville à partir de 2015.
Pour les jeunes, un abattement exceptionnel de 100.000 euros sera par ailleurs ouvert en cas de donation à ses enfants ou petits-enfants d'un logement neuf. Les jeunes toujours, avec cette formulation pesée qui signe le démantèlement d'une des mesures-phares de la loi Alur : la GUL. "La garantie universelle des loyers sera recentrée sur les jeunes salariés avec l'appui des partenaires sociaux au sein d'Action Logement", a annoncé le Premier ministre. Les "personnes en situation précaire" pourraient également en bénéficier.
Enfin, il a rappelé que, en matière d'amélioration de l'habitat, le crédit d'impôt développement durable (CIDD) sera porté à 30% pour les travaux de rénovation énergétique engagés à partir du 1er septembre.

 

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