Le ministère de la Justice fixe les clés de répartition 2020 des MNA entre les départements
Le Journal officiel du 22 juillet 2020 publie une décision du ministre de la Justice du 2 juillet "fixant pour l'année 2020 les objectifs de répartition proportionnée des accueils des mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille". Cette décision annuelle – mais tardive – résulte de l'application de l'article 48 de la loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfant, précisée ensuite par le décret du 24 juin 2016 relatif à l'accueil et aux conditions d'évaluation de la situation des mineurs non accompagnés (article R.221-13 du Code de l'action sociale et des familles). Ces textes prévoient la fixation d'une clé annuelle pour la répartition des mineurs non accompagnés (MNA) entre les départements de métropole.
Cette clé était jusqu'alors calculée sur la base d'un double critère. D'un côté, la part des jeunes de 19 ans et moins dans le département rapportée à leur part dans l'ensemble de la population métropolitaine. De l'autre, le rapport entre, d'une part, la différence entre le nombre de MNA que le département aurait dû accueillir au 31 décembre précédent et le nombre de mineurs effectivement pris en charge et, d'autre part, le nombre de mineurs accueillis dans l'ensemble des départements concernés au 31 décembre de l'année précédente. Dans ces conditions, les clés évoluaient assez peu d'une année sur l'autre, comme le montre la précédente décision de 2019 (voir notre article ci-dessous du 19 juin 2019).
Les choses changent cette année puisque, prenant conscience que le premier critère pénalise sans raison les départements jeunes (qui ont donc en outre des dépenses d'ASE a priori plus importantes), le ministère a modifié le critère populationnel, en passant de la population des 19 ans et moins à l'ensemble de la population du département. Ce premier critère reflète donc désormais la part du département dans la population française.
Conséquence : les clés de répartition des MNA connaissent cette année des différences significatives par rapport à la répartition de 2019, au bénéfice des départements avec des populations jeunes. Le Nord passe ainsi de 4,53 à 3,98%, la Seine-Saint-Denis de 2,96 à 2,28%, le Val-d'Oise de 2,29 à 1,81%... A l'inverse, un département comme le Cantal passe de 0,18 à 0,23%, la Creuse de 0,13 à 0,19%, tandis que Paris, qui compte peu de mineurs dans sa population, passe de 2,59 à 3,38% et les Alpes-Maritimes de 1,54 à 1,74%. Ce changement de critère a aussi pour effet de réduire l'écart entre les départements. Alors qu'en 2019, les clés de répartition allaient de 0,10% pour la Lozère à 4,53% pour le Nord, elles vont cette année de 0,12% à 3,98% entre ces deux départements, qui demeurent aux deux extrémités du classement.
Il reste que ce nouveau critère pourrait, lui aussi, être contesté dans la mesure où il défavorise les départements âgés, qui sont souvent – mais pas toujours – des départements pauvres. Seule l'introduction d'un critère fondé sur le taux de pauvreté ou la richesse fiscale pourrait introduire davantage d'équité, comme cela se fait pour d'autres mécanismes de péréquation entre territoires. Le gouvernement y songe sérieusement, puisque lors de l'introduction du critère populationnel en décembre dernier, il avait évoqué la possibilité d'introduire d'autres critères comme le potentiel économique et financier des départements ou le nombre de jeunes majeurs pris en charge.
Références : ministère de la Justice, décision du 2 juillet 2020 fixant pour l'année 2020 les objectifs de répartition proportionnée des accueils des mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille (Journal officiel du 22 juillet 2020). |