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PLFSS 2013 - Le contrat de praticien territorial, nouvelle arme contre les déserts médicaux

Avec un peu d'avance sur le calendrier prévu, l'Assemblée nationale a achevé l'examen en première lecture, le 26 octobre, du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2013 (voir aussi notre article ci-contre du 26 octobre 2012). Le vote sur l'ensemble du texte est prévu le 30 octobre. Si la partie sur les recettes contient de nombreuses mesures nouvelles - à travers la mise en place de divers prélèvements -, la seconde partie du PLFSS, relative aux mesures sectorielles (maladie, vieillesse, famille...), est nettement plus succincte - rigueur budgétaire oblige - que les années antérieures.
Un article a néanmoins particulièrement retenu l'attention des parlementaires : l'article 40, qui instaure le "contrat de praticien territorial de médecine générale". Ce contrat est conclu - sur une base volontaire - entre l'agence régionale de santé (ARS) et le médecin généraliste intéressé. Ce dernier s'engage "à exercer, pendant une durée fixée par le contrat, la médecine générale dans une zone définie par l'ARS et caractérisée par une offre médicale insuffisante ou des difficultés dans l'accès aux soins". Le contrat, qui devra être conforme à un document type défini par décret, comporte également un certain nombre d'engagements complémentaires, qui peuvent porter sur les modalités d'exercice, l'amélioration des pratiques, des actions de dépistage, de prévention et d'éducation à la santé, de coordination et de permanence des soins... En contrepartie, le médecin signataire "perçoit une rémunération complémentaire aux revenus de ses activités de soins exercées en qualité de praticien territorial de médecine générale". Le texte crée ainsi, pour la première fois, une nouvelle catégorie de généralistes mixant l'exercice libéral et le salariat (même si le terme n'est pas utilisé). Marisol Touraine, la ministre des Affaires sociales et de la Santé, a fait état lors de la présentation du PLFSS d'un objectif de deux cents contrats par an dans les prochaines années (voir notre article ci-contre du 2 octobre 2012).

L'Assemblée ouvre le dispositif aux médecins salariés

L'Assemblée a apporté plusieurs amendements à cet article. Ainsi, les députés ont ouvert explicitement le dispositif aux médecins libéraux qui choisissent d'exercer des remplacements plutôt que de s'installer (ils sont près de 10.000 et leur nombre croît régulièrement). Mais ils sont allés plus loin en ouvrant - avec l'accord du gouvernement - la possibilité de conclure un contrat avec un médecin assistant des hôpitaux "exerçant à mi-temps et ayant accompli moins de deux ans de services effectifs à temps plein au sein d'un établissement public de santé". Un long amendement du rapporteur, qui introduit cinq articles nouveaux dans le Code de la santé publique, va encore plus loin en adoptant la logique inverse de celle du texte initial. Egalement accepté par le gouvernement, il étend en effet le dispositif du contrat territorial en l'ouvrant aux médecins salariés des établissements publics de santé, des établissements privés d'intérêt collectif, des centres de santé et des organismes mutualistes. Dans ce cas de figure, les médecins salariés concernés ne seront pas, pour leur activité de médecine générale dans le cadre du contrat, rémunérés par l'ARS, mais continueront de l'être par leur établissement d'origine, les honoraires étant alors directement perçus par ce dernier (un système qui pourrait se révéler peu incitatif).
Au-delà de la mise en oeuvre réglementaire de ces dispositions - la rédaction des décrets pourrait s'avérer ardue -, il reste également une question de fond. Cette nouvelle mesure s'ajoute en effet aux précédents dispositifs et notamment au contrat d'engagement de service public (Cesp) mis en place par la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) du 21 juillet 2009. Le gouvernement a d'ailleurs fait adopter un amendement pour améliorer ce dispositif, qui n'est donc pas remis en cause (voir ci-contre notre autre article de ce jour sur les autres dispositions du PLFSS). Ces dispositifs nationaux s'ajoutent eux-mêmes aux mesures incitatives prises par les organismes de protection sociale et, en ordre dispersé, par les collectivités territoriales. Face à un dispositif d'ensemble de moins en moins lisible, la question d'une remise à plat de l'ensemble risque donc de se poser rapidement.

Jean-Noël Escudié / PCA

Références : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 (vote sur l'ensemble du texte en première lecture par l'Assemblé nationale, prévu pour le 30 octobre 2012).

 

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