Accès aux soins - Encadrement de l'installation des médecins : le Conseil de l'ordre n'est plus si sûr
Le 29 mai dernier, le Conseil national de l'ordre des médecins (Cnom) prenait position en faveur de mesure très directives - sinon coercitives - sur l'installation des jeunes médecins (voir notre article ci-contre du 30 mai 2012). Comme l'annonçait Localtis, cette prise de position inattendue a rapidement tourné au conflit de générations entre les médecins déjà bien installés dans la profession et non concernés par une telle mesure - ce qui est le cas de ceux siégeant au Conseil de l'ordre - et les jeunes médecins et étudiants en médecine, qui craignent de ne plus pouvoir choisir librement leur lieu d'exercice. Dès le 8 juin, les organisations représentant les jeunes médecins ont donc publié un communiqué commun exprimant "leur opposition tant sur la forme que sur le fond à ces recommandations [...], élaborées sans concertation avec les principaux intéressés".
Devant les vives réactions suscitées au sein de la profession, le Conseil de l'ordre a organisé le 23 juin une assemblée générale extraordinaire, que l'on devine animée. Dans un communiqué du 26 juin, le conseil rappelle que ses recommandations "ont levé deux tabous" (le second étant celui du plafonnement des honoraires) et reconnaît que "ces sujets interpellent l'ensemble de la profession, en particulier les étudiants, internes et jeunes médecins". Il en tire la conclusion en annonçant, dans une formule un peu surprenante, "un moratoire jusqu'à mi-octobre 2012 sur ces propositions". En attendant, il estime qu'il convient d'approfondir la réflexion et "invite l'ensemble des acteurs à se réunir et à envisager des solutions". Les conseils départementaux et régionaux de l'ordre se sont déjà saisis de la question et les conclusions seront débattues lors de la prochaine assemblée générale de l'ordre, le 13 octobre 2012.
Sur ce sujet très sensible, le Cnom se retrouve en effet un peu seul. Si la plupart des associations de collectivités se sont montrées favorables à sa prise de position (voir notre article ci-contre du 12 juin 2012), l'ordre n'a pas vraiment été suivi par le gouvernement. Concluant un colloque organisé le 26 juin par Sciences Po Paris, Marisol Touraine s'est en effet montrée très prudente, en affirmant : "Pour ce qui est de l'installation [des médecins], aujourd'hui, je joue la carte de la négociation, de la concertation et du dialogue." Tout en reconnaissant que la question des déserts médicaux est "un des grands défis et une des grandes inégalités [...] apparus au cours des dernières années", la ministre des Affaires sociales et de la Santé estime que "la première mesure à prendre, c'est de revoir les études médicales", avec la nécessité de "multiplier et d'imposer les stages" et de développer "des pôles de santé de proximité" afin de "répondre aux préoccupations des jeunes médecins". Ce n'est qu'en cas d'échec de la concertation que le gouvernement pourrait envisager des mesures plus contraignantes.