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Offre de soins - Encadrement de l'installation des médecins : la proposition de loi a "disparu"

L'Assemblée nationale examinera le 26 janvier 2012 une proposition de loi visant à garantir un accès aux soins égal sur l'ensemble du territoire. Un texte adopté par la commission des affaires sociales dans une version entièrement démantelée par rapport aux dispositions "coercitives" initiales.

L'Assemblée nationale examinera, le 26 janvier 2012, une proposition de loi - déposée par Philippe Vigier, député d'Eure-et-Loir, et une cinquantaine de ses collègues Nouveau Centre et UMP - visant à garantir un accès aux soins égal sur l'ensemble du territoire (voir la fin de notre article ci-contre du 13 janvier 2012). Le texte a été adopté par la commission des affaires sociales de l'Assemblée dans sa séance du 18 janvier. Avec toutefois un léger détail : la proposition de loi qui sera examinée le 26 janvier n'a plus rien à voir avec le texte initial, qui émanait pourtant de députés de la majorité.
De façon assez surprenante, la proposition de loi initiale opérait un virage à 180 degrés par rapport au discours traditionnel sur les mesures incitatives et allait au contraire très loin dans la mise en place de mesures d'encadrement de l'installation des médecins libéraux, jusqu'à proposer des dispositions franchement coercitives. Les deux mesures-phares prévoyaient ainsi que tout médecin devrait, "à l'issue de sa formation, et pour une durée minimum de trois ans, s'installer dans un secteur géographique souffrant d'un nombre insuffisant de médecins" et que l'installation définitive des médecins dépendrait d'une "autorisation délivrée par le représentant de l'Etat et le directeur général de l'agence régionale de santé selon des critères de démographie médicale". Il n'a sans doute pas échappé au gouvernement qu'une remise en cause aussi radicale de la liberté d'installation - véritable "règle d'or" de la médecine libérale, avec la tarification à l'acte, depuis la création de la sécurité sociale en 1945 - n'était pas nécessairement des plus habiles à quelques semaines d'échéances électorales nationales.

Médecins retraités, droit des mineurs au secret et télémédecine

La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a donc procédé à un véritable démantèlement de la proposition de loi, en supprimant les douze articles du texte initial - faisant ainsi disparaître les dispositions contraignantes -, pour les remplacer par trois articles nouveaux et assez anodins. Il ne reste pas une ligne - au sens propre - du texte initial dans la proposition de loi qui devrait être débattue par l'Assemblée le 26 janvier. A noter : le rapport sur la proposition de loi n'était d'ailleurs toujours pas en ligne sur le site de l'Assemblée quatre jours après la réunion de la commission des affaires sociales, le 18 janvier. De même, le sommaire du compte rendu de cette séance ne mentionne pas l'examen de la proposition de loi (qui y figure pourtant et occupe près des deux tiers de la séance), se contentant de citer la proposition de loi sur le financement des comités d'entreprise, examinée en première partie de la réunion.
Parmi les trois mesures nouvelles, la première prévoit la mise en place d'une réduction des charges sociales, dont les modalités seront précisées par décret, pour les médecins acceptant d'exercer dans une zone sous-dotée au-delà de l'âge légal du départ en retraite. La seconde, sans véritable rapport avec l'intitulé de la proposition de loi, met en place un secret de l'information médicale au profit des mineurs. Dérogeant à l'article 371-1 du Code civil sur l'autorité parentale, elle prévoit en effet que "les informations à caractère médical relatives à une personne mineure et détenues par les centres de planification ou d'éducation familiale, les établissements d'enseignement du second degré ou les régimes obligatoires d'assurance maladie en application des articles L.2212-7, L.2311-4 et L.5134-1 du Code de la santé publique ne sont communiquées qu'à cette personne et non pas à ses représentants légaux". Il s'agit en l'occurrence des informations relatives à l'interruption volontaire de grossesse et à la délivrance de produits contraceptifs (la délivrance elle-même pouvant d'ores et déjà se faire sans le consentement des parents). Enfin, la troisième disposition, si elle a bien un lien avec la lutte contre les déserts médicaux, ne relève manifestement pas du niveau législatif et n'a qu'une portée pratique très limitée. Elle prévoit que "les établissements de santé, les cabinets médicaux, les maisons de santé et les pôles de santé s'engagent à développer en France la mise en place de la télémédecine telle que définie à l'article L.6316-1 du Code de la santé publique".

Jean-Noël Escudié / PCA

Références : proposition de loi visant à garantir un accès aux soins égal sur l'ensemble du territoire (examinée en première lecture par l'Assemblée nationale le 26 janvier 2012). 

 

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