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Accès aux soins - Les déserts médicaux ne sont pas l'apanage des régions sous-dotées

Le conseil national de l'Ordre des médecins publie la seconde édition de ses "atlas régionaux de la démographie médicale", basés sur une approche par bassin de vie, qui fait apparaître des déséquilibres très prononcés au sein d'une même région, y compris parmi celles traditionnellement considérées comme les mieux dotées.

Après l'atlas national il y a quelques mois (voir notre article ci-contre du 24 juin 2011), le conseil national de l'Ordre des médecins publie la seconde édition de ses "atlas régionaux de la démographie médicale". Ces monographies par région, très bien conçues et documentées, ne manqueront pas d'intéresser les collectivités territoriales, de plus en plus souvent confrontées à des pénuries dans l'offre locale de soins. L'examen de ces atlas régionaux - qui reposent sur les chiffres au 1er juin 2011 - fait également apparaître un certain nombre de constantes, qui pointaient déjà dans le document national. Leur principal intérêt est en effet de proposer "une analyse fine des enjeux démographiques actuels à venir, tout en mettant en lumière des différences significatives infra et extra-régionales, indispensables pour les élus ordinaux - interlocuteurs des décideurs locaux". La région est ainsi très loin de constituer un niveau géographique pertinent pour apprécier les déséquilibres dans la répartition de l'offre de soins. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les atlas raisonnent en termes de bassins de vie. Cette approche plus fine fait en effet ressortir des déséquilibres très prononcés au sein d'une même région, y compris parmi celles traditionnellement considérées comme les mieux dotées (Ile-de-France, Paca, Languedoc-Roussillon...).
En Ile-de-France, par exemple, les écarts sont considérables entre Paris et la Seine-et-Marne, dont de nombreux territoires peuvent être considérés comme des déserts médicaux. Alors que ces deux départements comptent respectivement 2,2 et 1,3 millions d'habitants, la capitale enregistre 47% des nouveaux praticiens inscrits au conseil de l'Ordre en Ile-de-France, alors que la Seine-et-Marne n'en totalise que 4%... En région Paca, les Bouches-du-Rhône ont concentré, en 2010, 51% des nouveaux inscrits, tandis que le département des Alpes-de-Haute-Provence n'en dénombre que 0,8%. Le ratio démographique entre ces deux départements n'est pourtant que de un à treize. A l'inverse, les régions défavorisées en termes de médecins libéraux ne sont pas toujours celles que l'on croit. Tout dépend en effet de la répartition des praticiens au sein de la région. Ainsi, Rhône-Alpes et le Limousin présentent une densité médicale identique : 4,6 médecins généralistes pour 5.000 habitants (pour une moyenne nationale de 4,4). Mais 50% des bassins de vie de Rhône-Alpes sont considérés comme en danger au regard de l'offre de soins libérale, tandis que seuls 28% de ceux du Limousin relèvent de cette qualification. Cet écart du simple au double pour une même densité d'ensemble s'explique par la meilleure répartition des médecins sur le territoire du Limousin, alors que le tropisme des agglomérations de Lyon et de Grenoble déséquilibre l'offre de soins de Rhône-Alpes.
Un autre enseignement intéressant des atlas régionaux concerne les "flux migratoires", autrement dit les mouvements entre la région où le médecin à été formé et celle où il choisit d'exercer (et s'inscrit pour la première fois à l'Ordre). La Franche-Comté est ainsi la région qui forme et conserve la plus grande partie de ses médecins. A l'inverse, la Bourgogne ne conserve que 47% des médecins formés à l'université de Dijon. Enfin, un chiffre national illustre bien les difficultés actuelles dans le renouvellement démographique des médecins et les solutions souvent retenues pour y remédier : 41% des médecins inscrits pour la première fois à l'Ordre en 2010 ont obtenu leur diplôme hors de France.
Malgré ce tableau plutôt sombre - auquel on pourrait ajouter le fait que moins d'un nouveau médecin sur dix choisit de s'installer en libéral -, le conseil de l'Ordre voit néanmoins poindre "une lueur d'espoir", comme il le remarquait déjà lors de la publication de l'atlas national. Celle-ci réside notamment dans les enquêtes, qui révèlent que les jeunes médecins nouvellement installés se disent très satisfaits de leur mode d'exercice et se déclarent prêts à le recommander à leurs confrères.

Jean-Noël Escudié / PCA
 

 

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