Offre de soins - La lutte contre les déserts médicaux au coeur des débats à l'Assemblée
Après le Sénat le 9 mars, l'Assemblée nationale a adopté à son tour en première lecture, le 13 avril 2011, la proposition de loi modifiant certaines dispositions de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (loi HPST). Si les changements apportés au texte voté par le Sénat sont minimes (voir notre article ci-contre du 10 mars 2011), les débats n'en ont pas moins été vifs, en particulier sur la question de la répartition des professionnels de santé libéraux sur le territoire et sur celle de la lutte contre les déserts médicaux.
Incitation ou coercition ?
L'Assemblée a en effet été plus loin dans la suppression des mesures coercitives qui figuraient dans la loi HPST et n'avaient jamais fait l'objet d'une mise en oeuvre depuis lors. La première mesure - qui figurait dans le texte initial de la proposition de loi - a été adoptée à l'identique par les deux chambres. Elle consiste à abroger l'article de la loi HPST qui instaure, pour les médecins libéraux des zones surdotées, une obligation d'apporter un soutien à leurs collègues des zones sous-dotées ou, à défaut, d'acquitter une contribution non négligeable. Cette disposition s'est très vite révélée impossible à appliquer sur le plan pratique et risquait donc de se réduire au seul aspect de la sanction financière, très mal vécue par les médecins libéraux.
En revanche, le Sénat était finalement revenu sur la rédaction initiale de la proposition de loi de Jean-Pierre Fourcade qui abrogeait une autre disposition de la loi HPST, obligeant les médecins à déclarer leurs congés auprès du conseil départemental de l'Ordre (qui les communiquait lui-même à l'agence régionale de santé dans le cadre de l'organisation de la permanence des soins). Cette mesure était jugée vexatoire par les médecins libéraux. Le Sénat l'avait pourtant finalement rétablie en séance. L'Assemblée est revenu sur ce point et a rétabli l'article supprimant cette disposition, ce qui correspond également à la position du gouvernement. La discussion de ces deux articles a donné lieu à des échanges très serrés. La majorité plaide en effet pour des mesures incitatives, alors que l'opposition - comme le programme du Parti socialiste pour la présidentielle s'en est récemment fait l'écho - estime qu'il faudra en passer par des mesures coercitives.
25.000 euros par médecin et par an
Hasard du calendrier ou stratégie délibérée : la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) - qui vient d'engager des négociations difficiles avec les syndicats médicaux pour renouveler la convention - a publié opportunément des chiffres sur le coût de la principale mesure qu'elle finance (prime égale à 20% des honoraires pour les praticiens libéraux qui acceptent d'exercer pendant au moins trois ans dans une zone sous-dotée). Selon la Cnam, le coût de cette mesure est de 25.000 euros par médecin et par an (soit un coût total d'environ 20 millions d'euros). A défaut d'être bon marché, la mesure a au moins le mérite d'être relativement efficace. Depuis sa mise en place en 2007, elle a permis un apport net de 50 médecins dans les zones sous-dotées, alors que le nombre de praticiens dans les territoires concernés avait tendance, depuis plusieurs années, à stagner ou à régresser. Il reste que ce dispositif et, plus largement, la question de la répartition territoriale des médecins est l'un des volets importants de la négociation conventionnelle. Rien ne permet de présager ce qui en sortira, mais la négociation s'annonce tendue. Dès la première réunion formelle, le 14 avril, la Confédération syndicale des médecins français (CSMF) - premier syndicat de médecins libéraux - et le Syndicat de la médecine libérale (SML) ont en effet quitté la table des négociations...
Référence : proposition de loi modifiant certaines dispositions de la loi 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (adoptée en première lecture par le Sénat le 9 mars 2011 et par l'Assemblée nationale le 13 avril 2011).