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Commande publique - Le Code des marchés publics n'est pas près de disparaître

Les acheteurs publics attendaient la première prise de parole de Catherine Bergeal, directrice des affaires juridiques du Minefe. C'est chose faite. Et ses propos sont clairs : pas question de remettre en cause le Code des marchés publics (CMP). Pas plus, d'ailleurs, que de supprimer le délit de favoritisme.

Catherine Bergeal, directrice des affaires juridiques (DAJ) du Minefe, réfute l'idée d'un grand soir de la commande publique et affirme : "La suppression du code est une illusion, il est trop tard pour envisager cette hypothèse. D'ailleurs, s'il n'existait pas, nous le réinventerions." Elle s'est exprimée en ce sens - pour la première fois sur la thématique de la commande publique depuis sa prise de fonctions - lors d'un colloque organisé ces 2 et 3 avril par l'Apasp intitulé, sur un ton volontairement provocateur, "A quoi sert le Code des marchés publics ?", en écho aux diverses voix ayant ces derniers temps remis en question le bien-fondé de ce code.

Une question paradoxale

Catherine Bergeal, qui a succédé à Jérôme Grand d'Esnond à la tête de la direction des affaires juridiques de Bercy en octobre 2007, a introduit les débats en soulignant le paradoxe à l'origine de cette question de l'utilité du code. Tout d'abord, la volonté de supprimer le code est probablement due à son propre succès. C'est en effet au moment où il est enfin appliqué dans toute son étendue et sa rigueur que l'on souhaite le supprimer. Catherine Bergeal en veut pour preuve l'augmentation du recours au délit de favoritisme ainsi que le réinvestissement par le juge du champ du contentieux des marchés publics. D'autre part, après trois réformes successives, le code de 2006 est considéré, semble-t-il, comme une réussite. Par conséquent, ce code étant enfin appliqué, enfin modernisé, ne serait-il pas paradoxal de vouloir le supprimer ?
Autre constat : le CMP de 2006 est essentiellement d'origine communautaire. Sa disparition n'offrirait pas une totale liberté aux acheteurs puisque les règles communautaires resteraient applicables, notamment sous forme de principes généraux. En outre, le droit communautaire est enrichi en droit national par des règles spécifiques très utiles, voire indispensables aux acheteurs. Une déréglementation pourrait entraîner un véritable désordre juridique. En effet, les acheteurs seraient certainement tentés de se doter de  multiples "minicodes" s'ajoutant aux éventuelles circulaires et instructions. Cette hypothèse rendrait alors le droit de la commande publique de plus en plus complexe.

Assurer la stabilité du droit des marchés publics

Catherine Bergeal a également voulu rassurer les acheteurs face à l'inquiétude que suscite l'instabilité juridique du droit des marchés publics, notamment liée à une jurisprudence parfois fluctuante et aux réformes successives du code. Elle a ainsi souligné que si aucune déréglementation n'est envisagée, aucun grand projet de réforme du code n'est à l'ordre du jour. En revanche, apporter de la stabilité ne signifie pas figer le CMP. Celui-ci pourrait bien entendu évoluer en fonction des modifications de la législation européenne et des rectifications ou adaptions qui pourraient se révéler nécessaires au fil du temps.

Délit de favoritisme : la France doit montrer l'exemple

Une suppression du délit de favoritisme n'est pas non plus envisagée. Catherine Bergeal a rappelé que Lionel Stoléru, auteur du rapport sur l'accès des PME à la commande publique, était le seul à faire cette proposition. Pas question donc, pour l'heure, de revenir sur ce point. Le ministère de la Justice y serait également hostile. La directrice a insisté sur le fait que la France fait figure de bon élève dans la lutte contre la corruption et se doit de montrer l'exemple dans ce domaine, plus particulièrement à l'heure de la présidence française du Conseil européen.

Quel avenir pour le droit des marchés publics ?

Pour Catherine Bergeal, l'avenir du droit des marchés publics réside plutôt dans la rédaction du futur Code de la commande publique, qui regrouperait l'ensemble des dispositions légales et réglementaires dans ce domaine. Mais ce code devra faire l'objet d'une réflexion approfondie et d'une large concertation avant de voir le jour.
D'autres points ont été abordés par Catherine Bergeal au cours de ce colloque, dont la réforme liée au taux des intérêts moratoires, qui devrait selon elle être majoré de sept points afin d'être plus dissuasif, et la réduction des délais de paiement des marchés de l'Etat, ainsi, plus globalement, que l'accès des PME à la commande publique, la patronne de la DAJ faisant état d'une réelle difficulté entre, d'une part, la demande de quotas et, d'autre part, la volonté de massification des achats. En conclusion, elle a annoncé que le CCAG fournitures courantes et services va être mis en ligne pour une nouvelle concertation. Avant la fin du mois de juin, les autres CCAG devraient également être proposés. Le CCAG marchés de travaux devrait être le dernier mis en ligne.

 

L'Apasp