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Personnes âgées - La loi sur l'adaptation de la société au vieillissement verra-t-elle le jour ?

Quel est le sort que le nouveau gouvernement réserve au projet de loi d'orientation et de programmation pour l'adaptation de la société au vieillissement ? Présenté en février dernier par le Premier ministre d'alors, Jean-Marc Ayrault, "oublié" par Manuel Valls dans sa déclaration de politique générale, le texte a été plusieurs fois reporté à l'ordre du jour du conseil des ministres. Il est vrai qu'annoncer une dépense supplémentaire de 645 millions d'euros n'est pas non plus à l'ordre du jour de l'actuel gouvernement.

Les associations et les principaux acteurs de la prise en charge des personnes âgées ne cachent plus leur inquiétude sur le sort du projet de loi d'orientation et de programmation pour l'adaptation de la société au vieillissement. France Alzheimer, l'AD-PA (Association des directeurs au service des personnes âgées), les fédérations nationales de l'aide à domicile... : toutes ont exprimé leurs inquiétudes sur le devenir de ce texte... tout en multipliant les critiques à son encontre. La CFDT Retraités a également protesté contre "les tergiversations sur la prise en compte du vieillissement de la population".

Déjà quatre conseils des ministres...

Après la présentation de son contenu par Jean-Marc Ayrault le 12 février 2014 (voir notre article ci-contre du même jour) et l'avis favorable rendu par le Conseil économique, social et environnemental (Cese) le 26 mars (voir notre article ci-contre du 27 mars 2014), la présentation du projet de loi en conseil des ministres était annoncée pour le tout début du mois d'avril.
Le projet de loi ne figurait évidemment pas au conseil du 4 avril, deux jours seulement après la nomination de Manuel Valls comme Premier ministre. L'ordre du jour de ce conseil particulier était en effet tout entier consacré à la méthode de travail de la nouvelle équipe et à l'autorisation d'engager la responsabilité du gouvernement sur une déclaration de politique générale. Mais le projet de loi ne figurait pas davantage à l'ordre du jour des conseils de ministres du 9, du 16 ni du 23 avril... Il n'a également échappé à personne que Manuel Valls n'a pas évoqué ce projet de loi dans sa déclaration de politique générale du 8 avril, alors qu'il a fait une allusion au projet de loi sur la famille, dont le chef de l'Etat a pourtant annoncé l'abandon, il y a quelques semaines.
La raison de ce retard peut difficilement être imputée au changement d'équipe ministérielle. Marisol Touraine a conservé les mêmes fonctions que dans le précédent gouvernement et c'est d'ailleurs elle qui avait exposé le projet de loi devant le Cese, le 12 février, juste après que Jean-Marc Ayrault a présenté le contenu du texte lors de son déplacement du même jour à Angers. Laurence Rossignol - la nouvelle secrétaire d'Etat chargée de la Famille, des Personnes âgées et de l’Autonomie - a certes besoin d'un peu de temps pour s'imprégner du texte, mais la présentation d'une communication en conseil des ministres sur un projet de loi finalisé n'a rien d'un exercice insurmontable...

Une dépense en plus, une recette en moins...

On peut donc supposer, sans grand risque, que la perspective d'une dépense supplémentaire - chiffrée très précisément à 645 millions d'euros lors de la présentation de la réforme en février dernier - cadre mal avec les 50 milliards d'euros d'économies sur les dépenses publiques annoncés par le Premier ministre. Les associations font certes valoir que la réforme est déjà financée par avance, avec l'instauration de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa), mise en place le 1er avril 2013 sous la forme d'un prélèvement de 0,3% sur les pensions de retraite, de préretraite - pour les salariés et les non-salariés - et sur les pensions d’invalidité, à l'exception des pensionnés non imposables ou soumis à un taux réduit de CSG (voir notre article ci-contre du 2 avril 2013). Le coût évoqué de 645 millions d'euros pour les mesures prévues par le projet de loi correspond d'ailleurs au rendement de la Casa attendu en année pleine.
Mais la réalité est plus complexe. D'une part, même financée, la réforme apparaîtra comme une charge nouvelle, peu en phase avec le contexte actuel. D'autre part, la Casa est aujourd'hui affectée - officiellement de façon temporaire dans l'attente de l'entrée en vigueur de la loi - au financement du déficit du Fonds de solidarité vieillesse (FSV). Une enveloppe de 100 millions d'euros - "arrachée" par les parlementaires - a toutefois été affectée à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). La réaffectation de l'usage actuel de la Casa obligerait à trouver d'autres recettes pour le FSV. Il est donc facile de comprendre le peu d'enthousiasme actuel des pouvoirs publics face à cette double perspective.
Si ce gel ou cet abandon se confirment, la question du statut de la Casa se posera toutefois rapidement, car on voit mal cette taxe affectée, créée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, résister à une éventuelle question prioritaire de constitutionnalité (QPC).
Enfin, il est frappant de constater que ce scénario du gel ou de l'abandon - s'il se confirme - ressemble étrangement à la valse-hésitation du précédent quinquennat, avec les annonces à répétition, jamais concrétisées, sur un éventuel projet de loi Dépendance...

 

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