Renouvellement urbain - La liste des 200 nouveaux quartiers Anru est arrivée
Article initialement publié le 16 décembre 2014.
Les 200 quartiers Anru nouvelle génération ont été choisis par l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, le 15 décembre 2015, parmi les 1.500 quartiers prioritaires politique de la ville qui présentent "les dysfonctionnements urbains les plus importants, en métropole et outre-mer" (*). Deux millions d'habitants sont concernés. Selon les estimations du ministère en charge de la ville, les projets de renouvellement urbain mobiliseront 240.000 emplois dans la filière du bâtiment et des travaux publics, dont 150.000 emplois directs sur les différentes opérations Anru.
4 milliards d'euros pour 200 quartiers
L'Anru, via le concours d'Action logement, disposera de 5 milliards d'euros dont 4 milliards dédiés à ces 200 quartiers dits "d'intérêt national", soit une moyenne de 20 millions par projet. Plus de la moitié de ces quartiers bénéficiaient déjà, tout ou parti, du premier programme national de rénovation urbaine (PNRU).
Par ailleurs, 850 millions d'euros seront dédiés à 200 quartiers dits "d'intérêt régional", soit environ 4 millions d'euros par projets. 55 quartiers "d'intérêt régional" ont d'ores et déjà été choisis par l'Anru ; les autres émergeront des négociations des CPER (contrats de plan Etat-régions) menées par les préfets.
Le solde, de 150 millions d'euros, sera affecté aux protocoles de préfiguration sur la période 2015-2019 pour les indispensables études préalables qui serviront à définir l'engagement de chaque partenaire dans les projets de renouvellement urbain, sur toutes les villes qui ont au moins un quartier NPNRU, qu'ils soient d'intérêt national ou d'intérêt régional (voir notre article ci-contre du 2 octobre 2014). Le premier protocole de préfiguration de convention devrait être signé avant l'été 2015, selon l'Anru. Et les premières grues ne devraient pas faire partie du paysage avant 2017.
Effet levier de 10 à 12 milliards d'euros venant des HLM
Ces 5 milliards d'euros, annoncés au début de l'été 2013 par le Premier ministre d'alors Jean-Marc Ayrault (voir notre article du 11 juillet 2013), devraient générer, par effet levier, 20 milliards d'euros d'investissement venant des bailleurs sociaux et des collectivités locales principalement. L'Union sociale pour l'habitat a ainsi annoncé que les organismes HLM de son réseau (c'est-à-dire hors Sem) mobiliseraient "10 à 12 milliards d'euros" pour accompagner le NPNRU.
Environ la moitié de ces 5 milliards d'euros devraient financer du logement social (réhabilitation, reconstruction, réhabilitation). Un milliard d'euros irait dans des démolitions et 1,5 à 2 milliards d'euros vers des équipements et des services.
On aurait tort d'imaginer que ces 200 quartiers d'intérêt national sont uniquement des quartiers d'habitat social composés de tours et de barres HLM en décrépitude et situés en périphérie des villes. Il y en a encore naturellement, mais la nouvelle génération des quartiers Anru est bien plus hétérogène que la précédente (voir notre encadré ci-dessous). On y aussi trouve de l'habitat horizontal, des centres anciens dégradés, des bidonvilles ultramarins…
Une convention Anru pour le bassin minier
Les cités minières font ainsi leur entrée et, avec elles, la "prise en compte de l'habitat social horizontal", souligne Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports. Pour l'ex-président du conseil général du Nord, c'est "d'autant plus important que le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais est inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco depuis 2012". De belles rénovations en perspective, donc, avec les contraintes architecturales qui vont avec.
Une convention portant sur l'ensemble de ce territoire serait rédigée, comprenant elle-même des "sous-convention" correspondant à chaque quartier. Huit quartiers seraient concernés, dont quatre d'intérêt national (dont la cité du 12/14 à Lens et le quartier du "Vieux Denain") et au moins quatre d'intérêt régional (dont le centre-ville de Condé-sur-l'Escaut dans l'agglomération de Valenciennes).
Juste retour des choses pour "un territoire qui a beaucoup donné à la richesse de notre pays et qui a subi des années de relégation", relève Patrick Kanner. Et pour un habitat "qui correspond à une histoire" et conserve "une vocation sociale".
Dans son ensemble, la région Nord-Pas-de-Calais "bénéficie" de 17 quartiers Anru d'intérêt national (et au moins 8 d'intérêt régional), soit un de plus que Paca (au moins 5 d'intérêt régional) et deux de plus que Rhône-Alpes (au moins 8 d'intérêt régional), mais beaucoup moins que l'Ile-de-France qui en compte 58 dont 24 dans la seule Seine-Saint-Denis.
Le président de la région Nord-Pas-de-Calais, Daniel Percheron, se serait engagé à participer aux projets Anru du nouveau programme à hauteur de 1 euro chaque fois que l'Anru en met 3.
450 millions d'euros pour l'outre-mer
Les 22 quartiers ultramarins choisis par l'Anru sont tous d'intérêt national. Ils bénéficieront d'une enveloppe de 450 millions d'euros (comme dans le précédent programme).
"Le NPNRU s'adaptera aux spécificités des départements d'outre-mer", promet-on au ministère de la Ville. Le NPNRU prendra ainsi en compte les opérations de résorption de l'habitat informel et insalubre, en concertation avec l'Anah, l'Anru et le ministère des outre-mer. Mais il devra également tenir compte, selon les territoires, d'enjeux environnementaux (cyclones, mouvement de terrain, submersion marine, lagon), démographiques (solde naturel, immigration), urbains (insalubrité mais aussi indignité de l'habitat, bidonvilles, indisponibilité foncière) et sanitaires.
Des problématiques que l'on trouve également en métropole, et notamment dans les copropriétés dégradées. Un enjeu que le premier programme de rénovation urbaine n'avait pas abordé de front. Dans l'urgence, les dispositifs de résorption de la dégradation des copropriétés avaient souvent été jugés trop complexes et renvoyés à plus tard. Si bien que sont apparues "des verrues au milieu des quartiers rénovés", selon l'expression de Myriam El Khomri, secrétaire d'Etat en charge de la politique de la ville. Le nouveau programme s'y attaquera donc, par exemple dans le quartier emblématique de Bas-Clichy à Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) ou encore dans celui des Fauvettes à Pierrefitte-sur-Seine (dans le 93 également).
A la recherche d'écosystèmes économiques
"Qu'il s'agisse d'emploi, de développement économique, de vie associative ou de création artistique et culturelle, ce nouveau programme doit fertiliser les espaces de ville dans lesquels il va déployer son action durable pendant les dix ans à venir. Ce sont ainsi 300.000 emplois qui seront créés grâce à ce considérable effort de la puissance publique", selon Patrick Kanner.
Il s'agit de créer des "écosystèmes économiques" dans chacun des quartiers, selon l'expression de Myriam El Khomri. Un écosystème qui générerait 300.000 emplois dont, on l'a vu, 240.000 rien que dans la filière du BTP. Une nouvelle charte nationale d'insertion, répondant aux principes établis par la loi Lamy du 21 février 2014, serait présentée au prochain conseil d'administration de l'Anru. Elle prévoira notamment que soient définies localement "des objectifs de qualité des démarches d'insertion, en cohérence avec les priorités des contrats de ville, en particulier le développement de l'activité économique et de l'emploi". Mais aussi "accroître la généralisation des clauses d'insertion dans la commande publique et privée", par exemple.
L'Epareca, partenaire pour la revitalisation des centres commerciaux
Les quartiers Anru étant d'abord des quartiers prioritaires de la politique de la ville, ils pourront, comme les autres, prétendre devenir "territoires entrepreneurs" à partir du 1er janvier 2015, le dispositif qui a remplacé les zones franches urbaines (ZFU, voir notre article ci-contre du 5 décembre 2014). Ils pourront aussi bénéficier de la nouvelle offre de financement de Bpifrance pour le soutien à la création d'entreprise dans les quartiers. Ils pourront également bénéficier du nouveau fonds de capital développement "Impact partenaires", doté de 45 millions d'euros.
Les quartiers Anru sont également invités à développer des "projets immobiliers à vocation économique" (600 millions d'euros y sont consacrés dont une bonne partie vient de la Caisse des Dépôts). A ce propos, "l'Epareca sera particulièrement vigilant à la revitalisation des centres commerciaux installés dans les 200 quartiers du NPNRU", indique le ministère de la Ville.
Le défi de la "ville durable"
"Le NPNRU doit contribuer à l'amélioration de la performance énergétique des bâtiments, à la transition écologique des territoires et à la production d'une ville durable", insiste le ministère. 320 millions d'euros y seront consacrés.
L'Institut d'une ville durable, hébergé par l'Anru, serait opérationnel au printemps prochain (voir notre article du 28 octobre 2014). A ce titre, l'Anru est l'opérateur d'un programme doté de 71 millions d'euros dédiés à une quinzaine de projets de développement "intégrés et exemplaires en matière de transition écologique et énergétique". Le ministère confirme que l'Institut "promouvra les innovations urbaines au travers de démonstrateurs, échantillons du savoir-faire français en matière de ville durable dans les quartiers bénéficiant du programme de renouvellement urbain".
Par ailleurs, depuis 2014, dans le cadre du PIA, l'Anru est opérateur d'un deuxième programme d'innovation environnementale. Elle doit mettre en œuvre un autre programme de 250 millions d'euros, en vue de faciliter des opérations de co-investissement public-privé dans les nouveaux quartiers de la politique de la ville.
Mercredi, la ministre de l'Education nationale, Najat Vallaud-Belkacem, annoncera une autre liste. Celle des réseaux d'éducation prioritaire.
Valérie Liquet
(*) Les "dysfonctionnements urbains" ont été établis à partir d'une grille multicritères : état du parc de logement, diversité de l'habitat, mixité des activités, ouverture du quartier et accès aux transports, disponibilité foncière, qualité de l'environnement urbain et d'autres enjeux de la politique de la ville (gestion du quartier…)
Le NPNRU, pour ceux qui auraient loupé un épisode
Lancé quelques mois seulement après le vote de la loi de programmation pour la ville du 21 février, le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) bénéficiera de 5 milliards d'euros de l'Anru, avec le concours d'Action Logement. Il fait suite au programme national de rénovation urbaine (PNRU) engagé en son temps par Jean-Louis Borloo et qui n'est pas achevé. Du coup, les deux programmes vont se chevaucher durant plusieurs années, le temps que l'un s'achève et que l'autre débute sa phase opérationnelle.
Avec le PNRU, 490 quartiers ont tout de même été rénovés, concernant 4 millions d'habitants. 397 conventions ont été signées, correspondant à 12,35 milliards de subventions de l'Anru et à plus de 47 milliards d'euros d'investissements grâce à l'effet levier. Au 15 décembre 2014, près de 90% du programme est engagé, 7,6 milliards d'euros ont été versés depuis le début du programme. Sur les sites, 340.000 logements ont été rénovés et 141.000 construits. Au total, 200 quartiers sur 490 sont achevés "ou sur le point de l'être", selon le ministère. Et la convention conclue le 2 décembre dernier entre l'Etat et UESL-Action logement pour 2015-2019 (voir notre article ci-contre) mobilise les fonds nécessaires à l'achèvement du paiement du premier PNRU et à l'amorçage du nouveau PNRU.
Quatre principes distinguent le PNRU du NPNRU, selon le ministère de la Ville. Par exemple, le portage des projets se fait désormais au niveau des agglomérations. Les trois autres principes sont davantage des défis : un renforcement de la participation des habitants au projet de renouvellement urbain et de la mixité, "l'ambition pour une ville durable (démarche qualité environnementale, transition énergétique et constitution d'écoquartiers).
V.L.