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Renouvellement urbain - PNRU, NPNRU : l'Anru entre deux programmes

Comment l'Anru évoluera-t-elle en passant de bras armé du Programme national de rénovation urbaine (12 milliards de subventions, 500 quartiers concernés) à celui du Nouveau Programme national de renouvellement urbain (5 milliards d'euros, 200 quartiers) ? Et comment se saisira-t-elle de la "nouvelle philosophie", que tentera d'imposer la nouvelle ministre de la Ville, Najat Vallaud-Belkacem, fondée sur la "clause du territoire le plus favorisé" ? Premières réponses les 17 et 18 juin, aux Journées nationales d'échanges de la rénovation urbaine.

On s'impatiente de connaître la liste des 200 futurs quartiers qui bénéficieront du Nouveau Programme national de renouvellement urbain 2014-2024 (et qui sera connue "à l'automne"), alors que le Programme national de rénovation urbaine lancé en 2003 par Jean-Louis Borloo n'est pas terminé. Seuls 100 quartiers Anru "première génération" sur les 500 planifiés sont achevés ; les autres devraient l'être d'ici à fin 2015, assure l'agence. 397 conventions sont signées, dont plus d'un quart en Ile-de-France.
Sur les 12 milliards d'euros de subventions Anru - censé provoquer un effet levier amenant à un total de 46 milliards d'investissement pour le PNRU - près de 90% est engagé et plus de 7 milliards sont versés (soit la moitié du PNRU), dont 1 milliard en 2013. Le comité d'engagement de l'Anru a validé la démolition de 145.000 logements et "presqu'autant reconstruits", selon l'Anru qui insiste aussi sur son action en faveur de la "transformation des espaces publics" et la création d'équipements, et, d'une manière générale en faveur de "la restructuration de la ville sur elle-même".

"Atteindre un haut niveau de qualité environnementale"

Côté insertion, au 30 juin 2013, près de 20 millions d'heures d'insertion ont été réalisées dans le cadre de 375 projets, ayant bénéficié à 50.400 personnes (dont 65% issus des ZUS et un tiers de moins de 26 ans sans qualification et/ou sans expérience). "Les trois quarts des bénéficiaires dont la situation est connue ne sont plus en demande d'emploi 6 mois après leur premier contrat", se félicite l'Anru, qui souligne également que "les clauses d'insertion tendent aujourd'hui à se généraliser, en dehors de la rénovation urbaine".
L'agence estime qu'il y a "urgence" à aller plus loin sur ce sujet, ainsi que sur ceux de l'accompagnement social, de l'emploi, de l'accès à l'éducation, à la formation, à la culture ou encore à la santé. Elle veut également progresser pour "atteindre un haut niveau de qualité environnementale pour un meilleur cadre de vie" et voit la "nécessité de mettre en valeur toutes les richesses de ces quartiers en consolidant la confiance et l'espoir". Ces déclarations de bonnes intentions ne sont pas pures paroles en l'air : elles présagent la feuille de route que Najat Vallaud-Belkacem devrait présenter, mardi 17 juin, en ouverture des deux Journées nationales d'échanges de la rénovation urbaine (Jeru), pour le NPNRU.

Les "coeurs de cible" et les autres

Ce jour-là, la ministre en charge de la politique de la ville ne donnera pas encore la liste des quartiers du futur NPNRU. Mais elle annoncera les 1.300 quartiers prioritaires, dans lesquels l'Anru piochera les 200 quartiers présentant des "dysfonctionnements urbains majeurs". Ces 200 quartiers seront les "cœurs de cible" du NPNRU, mais les 1.100 autres quartiers prioritaires pourront également émarger auprès de l'Anru, assure Pierre Sallenave, son délégué général.
En l'occurrence, le NPNRU prévoit 5 milliards d'euros de subventions Anru, avec un effet levier attendu de 20 milliards d'euros d'investissements publics.
Les premières conventions pluriannuelles de renouvellement urbain devraient être signées fin 2015, mais des protocoles de préfiguration à ces conventions sont envisagés dès fin 2014/début 2015, c'est-à-dire au moment où seront signés les premiers contrats de ville. Contrats de ville qui devront fixer les orientations stratégiques des projets de renouvellement urbain (PRU), lesquels devraient "agir sur l'urbain, le social, mais aussi l'économique, développer l'attractivité résidentielle, participer à l'amélioration énergétique des bâtiments, la transition écologique".

De la banalisation à l'excellence : une "nouvelle philosophie"

Ces objectifs ne sont pas vraiment des nouveautés. Ce qui devrait changer, c'est le portage politique qu'en fera Najat Vallaud-Belkacem. Opérations de renouvellement urbain et contrats de ville devront ainsi intégrer ce que la ministre appelle la "clause du territoire le plus favorisé" et dont elle a commencé à parler lors d'un déplacement à la cité Descartes fin mai (voir notre article ci-contre du 5 juin).
Selon l'explication de texte de Pierre Sallenave, c'est une nouvelle "philosophie" qui se met en place, consistant à rompre avec l'idée de "banaliser" les quartiers de la politique de la ville en vue d'en faire "des quartiers comme les autres". Désormais, il faudra "mettre dans ces quartiers ce qu'il y a de mieux" pour en faire "des quartiers d'excellence".
Pour les contrats de ville, cela se traduira par une demande de la ministre aux acteurs du territoire (élus, préfets, services publics) à "comparer la situation des territoires cibles avec les territoires les plus favorisés de la métropole ou de l'intercommunalité, à identifier les atouts de ces territoires les plus favorisés et à entreprendre une fertilisation croisée entre les deux territoires".
Dans les opérations de renouvellement urbain, l'Anru devra rechercher l'excellence dans trois domaines : la qualité environnementale des projets (en s'appuyant sur le programme d'investissement d'avenir et son action "Ville durable" dont l'Anru est l'opérateur) ; la ville connectée (avec l'objectif de constituer des zones franches numériques) ; la stimulation de l'activité économique et de l'emploi.
Il s'agirait également de "veiller à assurer le même niveau de présence des services publics et de mobilisation des outils de droit commun dans les territoires les plus pauvres que dans les autres territoires".

Les mêmes objectifs... renforcés

Toujours à l'ordre du jour, mais avec l'ambition de les renforcer dans le nouveau programme : la participation des habitants "à la conception et à la mise en œuvre des projets" ("accompagner et non imposer"), avec dans chaque quartier Anru nouvelle génération la création d'une "maison de projets" comme l'impose désormais la loi Lamy pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014.
Egalement toujours d'actualité : "l'accompagnement des investisseurs pour développer l'habitat privé et l'activité économique dans les quartiers", qui est, selon Pierre Sallenave, la condition pour augmenter la "diversité de l'habitat" (autre objectif récurrent), le développement du commerce de proximité et "la consolidation du potentiel de développement économique". Les Jeru seront d'ailleurs l'occasion pour l'Etat et la Caisse des Dépôts de signer un accord portant sur une enveloppe de 400 millions d'euro dont 300 millions d'euros pour le développement économique, durant la période 2014 à 2020, visant à permettre l'implantation d'hôtels d'entreprises, l'installation de pépinières d'activités, de maisons de santé...
L'Anru devra aussi "renforcer l'ouverture du quartier et la mobilité des habitants", "viser l'efficacité énergétique et contribuer au respect de l'environnement" et anticiper la gestion des quartiers rénovés "dans la durée".
Signalons enfin que le Programme des quartiers anciens dégradés (PQAD) n'est pas non plus achevé. La totalité des conventions prévues ont été signées, concernant la réhabilitation de 25 centres anciens d'ici 2016-2018. L'Anru y contribue à hauteur de 150 millions d'euros sur un total de 380 millions d'euros de subventions, devant entraîner 1,5 milliard d'euros de travaux au total.