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Universités - La Cour des comptes envisage que les compétences des Crous soient déléguées aux régions

Dans son rapport public annuel 2015, la Cour des comptes aborde par deux fois les universités. Elle recommande ainsi une modernisation du réseau des Crous, en évoquant deux pistes de réflexion : confier les compétences des Crous aux futurs conseils régionaux ou aux futures communautés d'universités et établissements (Comue). La Cour revient également sur le désastreux chantier de Jussieu en particulier et sur la conduite des grandes opérations immobilières des universités franciliennes en général. Là encore, il y aurait grand besoin de vrai "pilotage stratégique", estime-t-elle.

La Cour des comptes estime "indispensable" la modernisation du réseau des œuvres universitaires et scolaires (les Crous). Notamment parce qu'il faudrait désormais prendre en compte d'autres acteurs "qui ont investi le champ de la vie étudiante, à commencer par les universités et les collectivités territoriales".
Ainsi, "les collectivités territoriales ont intégré la vie étudiante comme une composante de l'attractivité de leurs territoires et sont devenues des partenaires obligés", relève la Cour, rappelant que les régions financent la construction ou la rénovation de résidences universitaires à travers les contrats de plan Etat-région (CPER), que les intercommunalités définissent les programmes locaux de l'habitat (PLH) et que les communes "disposent du foncier". "Régions, départements et communes proposent enfin des bourses ou des prêts d'honneur aux étudiants, selon des critères qu'ils déterminent", ajoute-t-elle.

Confier les compétences des Crous aux futures grandes régions ?

Dès lors, "la multiplicité des structures et des dispositifs ne permet pas l'élaboration d'une stratégie globale de vie étudiante", estime la Cour. Elle envisage deux pistes d'évolutions à long terme : confier les missions du réseau des Crous aux nouvelles communautés d'universités et établissements (Comue), ou décentraliser et confier les compétences des Crous aux conseils régionaux à la suite de la nouvelle réforme territoriale.
Le ministère de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche ne veut pas en entendre parler. "De tels transferts seraient en contradiction avec la recherche d'économies d'échelle", assure-t-elle dans sa réponse. Il admet toutefois qu'"une meilleure coordination avec l'ensemble des acteurs de la vie étudiante est nécessaire au bénéfice des étudiants". Mais pour lui cela passe par l'élaboration du schéma directeur de la vie étudiante (qui associe les collectivités) prévu par la loi du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche, dite loi "Fioraso" (voir notre article ci-contre du 24 juillet 2013).
Dans sa réponse, le président de la conférence des présidents d'université ne dit pas autre chose. Il reconnaît qu'"une coordination plus importante entre les universités, les Crous et les collectivités territoriales est nécessaire" et ajoute : "La démonstration d'un volontarisme politique et administratif, à travers les contrats de site par exemple, sera certainement incitative."

Fermer les résidences étudiantes peu fréquentées

Sur le court terme également, la Cour des comptes invite à des réformes structurelles, notamment concernant le logement étudiant.
Observant que les inégalités d'accès à un logement Crous pour les étudiants les plus défavorisés "se sont accrues" et que le cadre de la restauration universitaire "paraît obsolète", elle recommande, purement et simplement, de "fermer les installations d'hébergement et de restauration trop peu fréquentées".
Elle note que les Crous peinent à équilibrer la gestion de leurs résidences. Notamment du fait de la baisse du taux d'occupation sur certains sites dûe au raccourcissement de l'année universitaire, au développement des stages des étudiants et des séjours à l'étranger. Elle a relevé plusieurs résidences lourdement déficitaires, "notamment dans les villes moyennes". Et d'ajouter que plusieurs Crous ont été amenés à abandonner des résidences pour maintenir leur équilibre financier : ceux de Bordeaux, Aix-Marseille, Amiens, Besançon, Limoges, Lyon, Montpellier, Orléans-Tours, Toulouse ont ainsi résilié des conventions de gestion.

Des plans gouvernementaux sur le logement étudiants qui ne tiennent pas leurs promesses

D'une manière générale, la Cour estime que l'offre de logement étudiant - 162.500 places pour 2,4 millions d'étudiants (dont 12% d'étudiants internationaux) - est "insuffisante et mal répartie". Et cela malgré les deux plans gouvernementaux successifs de 2004 (dont les objectifs étaient construire 5.000 logements neufs par an et réhabiliter 7.000 places par an pendant 10 ans) et de 2012 (qui vise la création de 8.000 places par an, soit 40.000 logements étudiants sur cinq ans). Le moins que l'on puisse dire, c'est que "l'évolution du parc n'a pas suivi le rythme annoncé", comme il est écrit le rapport, avec seulement 26.400 places créées entre 2004 et 2013, "soit une moyenne annuelle de 2.640 places". La Cour note toutefois que "la construction et la réhabilitation de logements se sont accélérées depuis 2007".
A sa décharge, le ministère tient, dans sa réponse, à "préciser que les obstacles à la réalisation de nouvelles opérations de construction ne tiennent pas à la situation financière des Crous, mais au désistement de certaines collectivités territoriales pour le logement étudiant et à la lenteur de certains processus de délivrance des autorisations de construire".

Concentrer la construction dans les zones déficitaires

Plus constructive, la Cour recommande de "concentrer les nouvelles constructions de résidences universitaires sur les zones déficitaires". Car elle observe "de très fortes inégalités territoriales" entre des académies où l'offre de logement est suffisante, et des académies très déficitaires comme celles de Paris, Créteil, Lyon et Lille. Là encore "les plans d'investissement successifs n'ont pas permis de corriger ces inégalités", constate-t-elle, relevant qu'en 2013, le Crous de Paris avait une offre de logement proche de celle du Crous de Rouen qui accueille six fois moins d'étudiants...
Autre gros sujet : la Cour recommande de "revoir les relations contractuelles avec les bailleurs sociaux pour assurer l'entretien du patrimoine", dans la mesure où, rappelle la Cour, le parc des Crous comprend, en dehors des chambres et studios en cité universitaire traditionnelle, nombre de logements en résidences HLM conventionnées.

Un pilotage stratégique pour l'immobilier universitaire parisien

A noter également, dans le cadre de ce rapport 2015 de la Cour des comptes, le sévère retour sur le rapport public thématique qu'elle avait publié en 2011 intitulé "Le campus de Jussieu : les dérives d'une réhabilitation mal conduite". Là encore, elle reconnaît que "la diversité des acteurs concourant aux orientations de la politique immobilière de l'enseignement supérieur et de la recherche en Ile-de-France (universités, communautés d'établissements, établissements d'aménagement) ne facilite pas la cohérence des initiatives en la matière". Elle recommande donc de mettre enfin en place le "pilotage stratégique" qui fait toujours cruellement défaut. Selon elle, "la conception d'un schéma d'ensemble ne peut être confiée à une instance unique (Ndlr, en l'occurrence : l'établissement public d'aménagement universitaire de la région Ile-de-France / Epaurif)". De plus, elle "doit tenir compte des autres schémas d'organisation (notamment les travaux menés dans le cadre du Grand Paris en matière d'infrastructures de transport) et des nouveaux enjeux de l'immobilier universitaire (politique de site, transition énergétique, développement du numérique, coût de l'exploitation-maintenance)".
La Cour annonce à cette occasion qu'une circulaire relative à l'expertise des projets immobiliers, couvrant l'ensemble des opérations (contrat de plan Etat-région, opérations du plan Campus, etc.) devrait être publiée "au début de l'année 2015".

 

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