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Enseignement supérieur - Rapport Le Déaut : vers de timides transferts de compétences aux régions ?

Dans un climat de méfiance du monde universitaire, le député Jean-Yves Le Déaut propose de renforcer certaines compétences des régions dans les domaines de l'innovation, la diffusion de la culture scientifique et technique, l'appui à un service public d'information et d'orientation tout au long de la vie, les formations en alternance et l'appui au logement étudiant. Le tout étant de ne pas remettre en cause le principe de la compétence générale de l'Etat sur l'enseignement supérieur et la recherche.

"La communauté universitaire éprouve une forte méfiance vis-à-vis de toute évolution qui s'apparenterait à une régionalisation de l'enseignement supérieur et serait susceptible de menacer l'équilibre des services d'enseignement supérieur et de la recherche sur le territoire national." Le rapport remis au Premier ministre ce lundi 14 janvier par le député Jean-Yves Le Déaut confirme le climat de méfiance de la communauté universitaire envers tout renforcement du rôle des collectivités territoriales dans leurs affaires, déjà exprimé dans le rapport final des Assises de l'enseignement supérieur et de la recherche remis à François Hollande le 17 décembre.
Chargé de proposer des transcriptions législatives et réglementaires des conclusions des Assises, le député de Meurthe-et-Moselle, également premier vice-président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, s'est efforcé d'"apaiser les inquiétudes". Dans un contexte de nouvelle étape de la décentralisation qu'il ne peut pas ignorer, le parlementaire propose de nouvelles compétences pour les régions, en prenant soin de les positionner "dans le prolongement de leur rôle de chef de file sur les questions économiques au plan territorial" et "sans remettre en cause le caractère national de l'enseignement supérieur et de la recherche." Propositions que Jean-Yves Le Déaut souhaiterait voir débattues dans le cadre du projet de loi sur l'enseignement supérieur et de la recherche avant de l'être dans celui de la loi de décentralisation, son expérience lui ayant montré que "les dispositions sectorielles sont toujours plus efficacement traitées au cours de la discussion de projets de loi spécialisés que lors d'examen de lois transversales".

Cinq domaines de compétences renforcées pour les régions

Cinq domaines de compétences sont privilégiés. Tout d'abord, Jean-Yves Le Déaut suggère de confier aux régions "la responsabilité des instruments de la politique de l'innovation". Il les voit bien "participer à la gouvernance des structures consacrées à la recherche technologique et du transfert de technologie" et "piloter de grandes plates-formes régionales d'innovation" qui mettraient en réseau les acteurs de la recherche, du développement et de l'innovation sur le territoire.
Les régions seraient également, selon lui, "les mieux à même de relayer les impulsions nationales", mais aussi de "fédérer les initiatives locales" touchant à la diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle.
Il compterait également sur elles pour assurer la mise en réseau des services qui concourent à l'orientation de l'ensemble des publics sur leur territoire et "y apporter un soutien matériel et technique". Etant entendu qu'il s'agit d'un "appui" au service public d'orientation tout au long de la vie dans lequel l'Etat garderait la maîtrise de la définition de la politique nationale et des supports d'information en direction des élèves et étudiants.
Pour le député de Meurthe-et-Moselle, les compétences déjà exercée par les régions en matière d'apprentissage et de formation professionnelle devraient être "mises au service de l'enseignement supérieur" et élargies à la formation tout au long de la vie, ce qui "inclut explicitement les formations initiales en alternance et la formation continue dispensées dans les établissements d'enseignement supérieur, ainsi que les procédures de validation des acquis de l'expérience en vue de l'obtention des diplômes nationaux de l'enseignement supérieur".
Enfin, si l'appui au logement étudiant devrait continuer de relever de la compétence de l'Etat, "il pourrait être envisagé" de déléguer aux régions, sur la base du volontariat, la maîtrise d'ouvrage pour la construction, l'extension et l'équipement des logements étudiants (possibilité qui existe déjà pour les communes et les établissements de coopération intercommunale, rappelle le député). Le rapport propose également de renforcer la coordination des efforts de l'Etat et des collectivités en faveur du logement étudiant dans le cadre des contrats de site.

Contrats de site : une approche pragmatique

Justement, la question des contrats de sites suscite "de fortes divergences sur les modalités de mise en œuvre, s'agissant des relations Etat/collectivités territoriales/établissements", ne cache pas le parlementaire, qui veut toutefois rester optimiste car "le principe de mise en cohérence des objectifs, actions et moyens de ces trois partenaires est acquis". Reste la manière de le concrétiser.
Lui-même se dit favorable au contrat tripartite, avec la région pour chef de file des collectivités territoriales. Mais, face aux réticences, notamment de la Conférence des présidents d'université (CPU) et des organisations syndicales, il propose en quelque sorte de "laisser du temps au temps". Son idée : "Introduire la possibilité de contrats de site en laissant dans un premier temps aux acteurs locaux le soin de déterminer les modalités selon lesquelles les collectivités territoriales y seront associées." Concrètement, les collectivités devront obligatoirement être associées à la préparation des contrats mais ce sera à l'ensemble des partenaires d'en décider la forme : contrats tripartites, contrats bilatéraux coordonnés (comme l'avait suggéré le rapport du 17 décembre), rassemblés ou non dans un contrat global… 
On relève d'ailleurs que Jean-Yves Le Déaut suggère, comme l'avait fait le rapport sur les Assises, de rendre obligatoire l'élaboration de schémas régionaux de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation (SRESRI).
A noter enfin ce clin d'œil à l'organisation des collectivités territoriales : Jean-Yves propose la création de "communautés d'universités" pour remplacer les Pres (pôles de recherche et d'enseignement supérieur), en précisant qu'il a choisi ce terme "par analogie avec le statut de l'intercommunalité".

 

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