Haut débit - Fibre optique : gouvernement et opérateurs affinent leurs annonces, les collectivités ne lâchent rien
L'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l’audiovisuel (Avicca) a attiré l’attention, ce 4 janvier, "sur la réalité concrète des territoires, qui n’est pas constituée de zones 1, 2 ou 3, (les secteurs denses, intermédiaires et peu denses définis par l'Arcep) mais d’ensembles bâtis très différenciés, et qui sont aussi structurés par des collectivités qui tentent de donner des réponses les plus équitables possibles à leurs citoyens". L'Avicca entend ainsi rappeler la position de ses 178 adhérents (50 villes, 50 communautés urbaines ou d’agglomérations, 17 syndicats de communes, 43 structures départementales et 18 régionales) à l'Autorité de régulation des communications électroniques (Arcep) et à l'Autorité de la concurrence. La fibre optique jusqu'à l'abonné est un objectif à atteindre "en dix ans", selon la plateforme commune aux associations d'élus : maires (AMF), conseillers généraux (ADF) et régionaux (ARF). L'Etat doit fixer pour cela des règles du jeu claires et précises, comprenant notamment des "mesures d'aides et de péréquation tarifaire". Le fonds adopté dans le cadre de la loi Pintat et l'attribution d'un milliard d'euros provenant du grand emprunt semblent déjà y répondre. Des technologies alternatives peuvent être mobilisées pour "ne pas laisser se creuser l’écart entre les territoires" mais en veillant "à leur cohérence d’emploi avec l’objectif principal". C'est ce que tente de faire le gouvernement, par exemple, avec le label "haut débit pour tous". Enfin, "l’action à la sous-boucle locale fait partie des outils utiles à l’aménagement numérique du territoire". Mais il ne faudrait pas que la solution NRA-zone d'ombre de France Télécom rejoue les perturbatrices comme, en son temps, la charte des "départements innovants" pour le déploiement des réseaux ouverts d'initiative publique.
Trois scénarios encore en course ?
L'Avicca répond ainsi à l'Arcep qui a annoncé, le 22 décembre dernier, sa décision et sa recommandation relatives aux modalités du déploiement et de l'accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique en zones très denses. Pour l'Arcep, cette décision met "un point final à un travail engagé début 2009, comportant des expérimentations in situ, des consultations, et ce après avis favorable de l’Autorité de la concurrence et de la Commission européenne". L'Avicca nuance, cependant, en soulignant que "l’Autorité de la concurrence a émis un avis très réservé sur la montée en débit par accès à la sous-boucle locale de l’opérateur historique, pour protéger à la fois le marché actuel du haut débit et l’évolution vers le très haut débit sur fibre optique". Et de rappeler que "les études menées par les collectivités sur leurs territoires montrent qu’il existe des écarts considérables de coût de construction suivant les quartiers. Un quartier pavillonnaire peut être dans une zone dégroupée sans être économiquement rentable à fibrer pour un opérateur privé".
"L’Avicca appelle donc à un plan ambitieux sur le très haut débit en fibre optique et à une régulation qui tienne compte de la réalité différenciée des territoires", conclut Yves Rome, le président de l'association. Cet appel intervient à quelques jours des annonces gouvernementales sur la fibre optique, et de celles de France Télécom sur sa "refondation". Selon un document interne en circulation depuis quelques semaines, le gouvernement travaillerait sur trois pistes pour mobiliser le milliard prévu : appel à projets, partenariat public-privé innovant, attribution de prêts ou de subventions pour "forcer" les opérateurs privés à investir dans les zones peu denses. Des moyens et de l'intelligence collective : c'est bien ce dont les collectivités isolées auront besoin pour éviter que ne se surajoute une fracture numérique à la fracture territoriale.
Luc Derriano / EVS