Aménagement numérique - Le gouvernement lance son label "haut débit pour tous"

Michel Mercier, ministre de l'Espace rural, Christian Estrosi, ministre de l'Industrie, et Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'Etat au Numérique, ont lancé, ce 3 décembre, le label "haut débit pour tous". Mesure emblématique du plan France Numérique 2012, annoncée dès octobre 2008, ce label veut "encourager le développement d'offres garantissant aux utilisateurs l'accès en haut débit à internet à des conditions équitables et techniquement satisfaisantes" sur le territoire métropolitain. Il devrait permettre à chaque Français, notamment en zone rurale, isolée ou de montagne, d'identifier les offres d'accès disponibles dans son département à un tarif inférieur à 35 euros par mois, matériel compris. "Plusieurs opérateurs ont d'ores et déjà manifesté leur intérêt pour la labellisation et ont annoncé leur intention de proposer des offres respectant le cahier des charges", promet le communiqué des ministres, même si aucune précision n'est encore disponible. Dans le calendrier initial, les premières labellisations étaient pourtant prévues dès ce mois de septembre. A l'occasion de l'appel à manifestation d'intérêt lancé début 2009, une douzaine de contributions avaient cependant été reçues de la part d'opérateurs (Vivéole, Numéo, Nordnet, SFR, Numévia, Mecelec Telecoms), d'acteurs du satellite (Eutelsat, Astra) ou de syndicats de collectivités (Ardèche Drôme Numérique, Electricité de l'Ain). Manche Numérique semblait également intéressé. Le cabinet de Nathalie Kosciusko-Morizet a indiqué que les trois premiers fournisseurs d'accès à internet labellisés devraient être connus d'ici fin 2009.

 

Une opération de communication en faveur des opérateurs satellitaires ?

Aujourd'hui, alors que plus de 18,6 millions de foyers ont déjà souscrit un abonnement haut débit, près de 2% des foyers vivent dans des zones non desservies par le haut débit filaire (ADSL ou câble). "Il n'y a pas de miracle : si des ménages, des services publics et des entreprises sont en zone blanche, c'est que le secteur privé n'y trouve pas une rentabilité suffisante pour y apporter le service", souligne l'Avicca qui regroupe 178 villes, agglomérations, départements et régions. L'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel dénonce "l'habile tour de passe-passe" qui a supprimé du cahier des charges du label "le droit à l'accès à internet haut débit, opposable à des opérateurs clairement identifiés", prévu initialement. Elle pointe les limites du label. La Réunion, la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane et les autres territoires outre-mer en sont exclus. Le prix ne comprend pas la téléphonie illimitée, ni les frais d'installation, ni la mise en service (plafonnée à 100 euros). La durée d'engagement peut aller jusqu'à 24 mois. Les volumes de transit, au minimum de 2 Go par mois, sont entérinés. "En bref, le label correspond aux offres satellitaires actuelles", conclut l'association, laconique. Et d'insister alors sur la confusion probable chez les citoyens puisque le satellite n'est qu'une solution parmi d'autres pour assurer une couverture à 100% du territoire avec le Wimax, le Wifi, le NRA ZO, voire la fibre optique. "L'appel à projets pour l'emploi du fonds du Feader (30 millions d'euros en faveur du haut débit dans les zones rurales) est à ce titre bien plus utile qu'un logo", reconnaît l'Avicca. Et l'association de rappeler qu'il faudra bel et bien un fonds pour l'aménagement numérique du territoire. Le milliard annoncé dans le cadre de l'emprunt national n'en constituera qu'une "amorce", alors que les amendements pour son financement pérenne, dans le cadre de la proposition de loi contre la fracture numérique (dite "Pintat"), en discussion au Parlement, ont tous été rejetés. L'Etat est à nouveau rappelé à ses responsabilités : un label et son logo, même déposés à l'Inpi, ne sont pas à la hauteur des enjeux de la montée en débit de tous les territoires.

 

Luc Derriano / EVS