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Education - Ecoles rurales : Najat Vallaud-Belkacem demande aux recteurs de booster les conventions "ruralités"

La ministre de l'Education nationale a adressé le 11 octobre une instruction aux recteurs leur demandant de développer les conventions "ruralités" portant sur la réorganisation des écoles situées en zones rurale et de montagne.

Deux jours après le congrès national des maires ruraux, à l'issue duquel fut adoptée une motion demandant à l'Etat de réviser son logiciel sur le maillage des écoles rurales en y ajoutant une préoccupation d'aménagement du territoire (voir notre article du 11 octobre 2016), Najat Vallaud-Belkacem a adressé aux recteurs une instruction leur demandant de multiplier les conventions ruralités. "Cette démarche novatrice, qui concerne déjà 22 départements, doit se développer", écrit la ministre de l'Education nationale dans son instruction du 11 octobre sur les "Ecoles situées en zones rurale et de montagne".
Il y est rappelé que "depuis la rentrée 2015, des emplois ont été spécifiquement consacrés au soutien de ces démarches partenariales et l'impact des baisses d'effectifs a été neutralisé en tout ou partie pour les faciliter ; l'intégration de ces démarches dans les procédures d'allocation de moyens devra être poursuivie pour les prochaines années". Traduction : faire comprendre aux élus ruraux qui perdent des habitants que, s'ils ne signent pas de convention, leurs écoles se verront mécaniquement affecter moins d'enseignants... voire plus d'enseignant du tout.

La convention n'est pas un moratoire

De fait, les associations départementales des maires qui se sont prêtées au jeu ont vu à la rentrée 2016 le nombre de postes d'enseignants maintenu dans leur département (ce fut le cas par exemple du Cantal, des Hautes-Pyrénées, du Gers, de la Creuse ou encore de la Corrèze), ou si le nombre a diminué (comme pour le Lot et l'Ariège) c'était dans une moindre proportion que le seul calcul mathématique l'aurait voulu (voir notre article ci-contre du 11 février 2016).
D'ailleurs, la circulaire le précise bien : la convention ruralité "n'est pas un moratoire sur les mouvements de postes dans le département". Il s'agit plutôt de "donner de la visibilité aux élus sur l'évolution des effectifs de personnels enseignants" et d'"anticiper tout ou partie des effets de l'évolution de la baisse de la démographie scolaire en contrepartie de réorganisations du réseau de ces écoles, élaborées en concertation avec les élus locaux". Traduction : la signature de la convention implique que ces élus prévoient de développer les regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI)... Ce que Vanik Berberian, président de l'Association des maires ruraux de France traduit, lui, par : " Le rêve de l'Education nationale, ce serait de n'avoir plus qu'une école par chef-lieu de canton" (voir notre interview du 10 octobre 2016).

Favoriser les apprentissages et garantir l'avenir scolaire des élèves ruraux

Selon la définition donnée par la circulaire, "la convention ruralité est un contrat d'engagements réciproques conclu, dans les territoires ruraux ou de montagne caractérisés par un maillage des écoles ne correspondant plus aux réalités de la démographie scolaire locale, et permettant de favoriser les apprentissages et l'épanouissement des enfants et de garantir l'avenir scolaire des élèves dans ces territoires".
Signée au niveau départemental, elle "identifie notamment des territoires prioritaires à l'échelon infradépartemental sur lesquels portent des engagements réciproques définis par les parties". Elle peut être signée à un niveau académique "lorsqu'une problématique supradépartementale le justifie". Et, naturellement, "elle prend en compte les communes et les intercommunalités".
La convention est conclue sur une base pluriannuelle, "en général pour trois ans". Ces années doivent être mises à profit pour réaliser le "diagnostic de qualité sur l'évolution des réseaux d'écoles et pour la mise en œuvre de ces engagements".

Le diagnostic territorial : recensement et prospective

Suite au rapport Duran sur "la mise en œuvre des conventions ruralités", remis le 20 mai dernier au Premier ministre (voir notre article ci-contre du 30 mai 2016), l'élaboration d'une convention ruralité doit désormais impérativement reposer sur un diagnostic territorial. Dans ce cadre, le département doit recenser les écoles ou réseaux situés en zones rurale et de montagne "qui, compte tenu de leurs contraintes de desserte, des temps de transport ou de leur fragilité, notamment en termes de démographie scolaire, justifient une réflexion pluriannuelle et un traitement prioritaire". Il doit aussi tenir compte de l'accueil périscolaire et la petite enfance, des besoins en termes d'accessibilité pour les personnes à mobilité réduite, du raccordement à l'Internet "à haut débit de qualité" ou à très haut débit...
Ce recensement est élaboré "en lien avec les services de l'Etat et les élus locaux" (*). Et il doit déboucher sur une analyse "prospective des perspectives d'aménagements à court-moyen terme susceptibles d'améliorer le réseau des écoles existant".
"Dans ces travaux, il convient d'intégrer l'évolution des effectifs sur une durée pluriannuelle, le service rendu par les infrastructures d'accueil comme celles de la petite enfance, les perspectives de développement local et d'étudier les possibilités d'une nouvelle organisation de l'offre éducative", précise l'instruction. Il est également indiqué que "ces travaux contribuent, en tant que de besoin, aux schémas départementaux d'amélioration de l'accessibilité aux services" prévus par la loi Notr.

L'éclairante contribution de l'Insee

Les services déconcentrés de l'éducation nationale pourront bénéficier d'études fournies par la direction régionale de l'Insee. Ces études devront impérativement comprendre un volet "recensement" qui "doit permettre de quantifier et d'apprécier les différences de temps d'accès au 'service école' selon les territoires". La convention cadre signée à la fin de l'été entre le ministère et l'Insee (en annexe de la circulaire) précise qu'il "est souhaitable que cette analyse soit mise en perspective pour tenir compte des caractéristiques démographiques, sociales et économiques du territoire étudié. Elle tiendra compte autant que possible des regroupements pédagogiques existants et des bassins de vie. Ce volet comprend nécessairement une dimension prospective sur la démographie scolaire'.
Les études Insee pourront comprendre un second volet (optionnel, selon la commande de l'académie) qui consisterait à " évaluer l'impact, du point de vue de l'accessibilité, de différents scénarios de localisation des écoles et de classes de regroupements pédagogiques intercommunaux" Dans ce cas, "les hypothèses sur lesquelles reposent ces scénarios devraient, si la démarche est retenue, être fournies aux directions régionales de l'Insee par les services déconcentrés de l'éducation nationale".

Les signataires

Concernant les dispositifs pédagogiques et éducatifs, la convention serait "l'occasion d'un travail sur les conditions de développement des dispositifs 'plus de maîtres que de classes' et 'accueil des moins de trois ans'. Et des "dispositifs spécifiques permettant d'éviter l'isolement pédagogique et géographique pourront être mobilisés". Sont cités : réseau d'animation pédagogique et de formation des professeurs, mutualisation de ressources pédagogiques, liaison école-collège, etc". C'est aussi "l'occasion pour les acteurs locaux d'approfondir la question de la coordination des activités scolaires et périscolaires". Un long chapitre est dédié au plan numérique (voir aussi notre article ci-contre dans l'édition de ce jour).
Le processus de concertation décrit aux recteurs prévoit l'association de "l'institution scolaire" et les associations d'élus ou les élus. "Les rencontres dans les communes, les intercommunalités et avec le conseil départemental, entre élus locaux ou nationaux et responsables départementaux de l'éducation nationale sont privilégiées", est-il indiqué. La convention est ensuite signée "à minima" par le recteur d'académie, l'inspecteur d'académie-directeur académique des services de l'Éducation nationale, le préfet de département, les présidents des associations départementales des maires et, dans toute la mesure du possible, par le président du conseil départemental, "notamment au titre de sa compétence en matière de sectorisation des collèges". A compter du 1er septembre 2017, le président du conseil régional pourra être associé au titre de la compétence sur le transport scolaire. Et au cas où la convention serait conclue à un niveau infra ou supradépartemental, "il conviendrait d'y adjoindre le ou les élus à la tête de ou des exécutifs concernés".

Valérie Liquet

(*) Pour ce qui concerne les territoires de montagne, le recensement des territoires prioritaires devra prendre en compte le classement des communes en zone de montagne. Mais "l'utilisation de ce seul critère n'est cependant pas suffisante pour justifier une politique spécifique", est-il précisé dans la circulaire, il faudra le "combiner avec le caractère rural de la commune, sa démographie scolaire, la situation d'isolement et la qualité des équipements scolaires considérés, en particulier au regard de leur desserte routière, de la durée et des conditions de transport (aléas climatiques, déclivité)".
 

 

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