Education - Fermeture d'écoles : le sénateur Duran missionné pour développer les "conventions ruralité"
Manuel Valls a confié le 21 octobre à Alain Duran, sénateur (PS) de l'Ariège, une mission "pour amplifier la démarche de contractualisation avec les élus locaux en faveur de l'école rurale et de montagne", dans le but affiché de "lutter contre les fragilités de l'école rurale et de montagne" et d'"offrir aux élèves de ces territoires une école de proximité et de qualité". Et dans le but moins politiquement correct de fermer des petites écoles rurales et de regrouper les classes au sein des RPI (regroupements pédagogiques intercommunaux).
Le sénateur, ex-conseiller général de l'Ariège et professeur des écoles de profession, devra remettre ses conclusions au Premier ministre le 31 décembre 2015, après un rapport d'étape demandé "pour la fin du mois de novembre 2015". Manuel Valls veut être "en capacité, dans l'année qui vient, de donner un véritable élan à cette politique".
Considérant que "la contractualisation doit être le levier d'une modernisation de l'offre éducative, répondant aux souhaits des habitants des territoires ruraux et de montagne, notamment en matière d'offre numérique, d'activités périscolaires et de scolarisation des enfants de moins de trois ans", Alain Duran est missionné pour "proposer les voies et moyens d'une contractualisation efficace".
Réponse à l'éparpillement des petites écoles ou "chantage inadmissible" ?
Le Premier ministre ne lui donne pas explicitement les éléments de négociation. Il cite toutefois les cinq "conventions ruralité" déjà conclues (avec les associations départementales de maires d'Ariège, du Cantal, des Hautes-Pyrénées, du Gers et du Lot) et à venir (Allier, Creuse et Haute-Loire)". Or l'argument principal, pour parvenir à ces signatures, ce n'est pas tant l'offre numérique, les activités périscolaires ou la scolarisation des enfants de moins de 3 ans. C'est la garantie du maintien des effectifs enseignants pendant trois ans. Une garantie qui s'accompagne d'une contrepartie impitoyable : l'engagement d'élaborer un plan de regroupement des établissements scolaires, dans le cadre des fameux regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI). C'est-à-dire fermer des écoles.
Lors du comité interministériel aux ruralités de Laon du 13 mars dernier (voir notre article ci-contre du 16 mars 2015), le gouvernement avait déclaré que ces "conventions ruralité" constituaient une "réponse pertinente à l'éparpillement des petites écoles en milieu rural et au recul de la démographie des élèves". Vanik Berberian, président de l'Association des maires ruraux de France, avait quant à lui parlé d'un "chantage inadmissible" qui aboutira à "tout transférer dans la ville chef-lieu".
Alain Duran rencontrera les associations d'élus
Vanik Berberian aura l'occasion de développer son argumentation auprès du sénateur Duran à qui le Premier ministre a demandé, dans le cadre de sa mission, de s'"appuyer sur un dialogue avec les différentes associations d'élus locaux, en particulier les différentes associations de maires et les associations représentatives des départements et des régions, pour favoriser la prise en compte de cette problématique dans les politiques locales, en particulier d'équipement, de solidarité territoriale et de transports scolaires".
Pour mener à bien sa mission, le sénateur de l'Ariège aura donc à gérer la contradiction entre un discours gouvernemental qui d'une part se réjouit que l'école soit "un service public de grande proximité pour les parents et les élèves" et d'autre part estime que la "qualité de l'école rurale (...) passe notamment par le regroupement et la mise en réseau des écoles".
Pour rappel, grâce à ces conventions ruralité, l'académie de Toulouse a sauvé 10 postes d'enseignants à la dernière rentrée des classes (correspondant aux conventions signées avec l'Ariège, le Gers, les Hautes-Pyrénées et le Lot). La convention avec le Cantal a, à elle seule, fait gagner 10 postes à l'académie de Clermont-Ferrand.
A noter que celle du Lot n'a pas réussi à négocier le maintien de ses effectifs enseignants, et a dû se contenter d'une moindre réduction des postes par rapport à ce qui aurait été appliqué hors convention.