Environnement - Des communes en mal de mesures contre le bruit
Par un courrier en date du 31 mai 2013, la Commission européenne a mis en demeure les autorités françaises en raison d'une mise en oeuvre insuffisante de la directive 2002/49/CE relative à l'évaluation et à la gestion du bruit dans l'environnement. Cette directive impose aux communes ou EPCI compétents en matière de lutte contre les nuisances sonores au sein des grandes agglomérations de réaliser des cartes de bruit. Charge ensuite aux autorités compétentes de réaliser des plans de prévention du bruit dans l'environnement (PPBE), qui se présentent comme un outil stratégique de maîtrise des nuisances sonores sur leur territoire. En retour, la France a deux mois pour transmettre ses remarques à la Commission. Pour les initiés, ce nouveau rebondissement n'est pas une réelle surprise : la France était déjà en situation de précontentieux face au retard pris. Au départ, le calendrier semblait pourtant tenable : les agglomérations de plus de 250.000 habitants devaient publier les cartes de bruit en 2007 et celles de 100.000 à 250.000 habitants d'ici la fin 2012. Mais un certain flou de responsabilité a joué : les communes relevant d'une agglomération n'ont pas toujours compris qu'elles devaient réaliser elles-mêmes ces cartes. Le décalage s'accentuant entre les communes retardataires et celles qui ont déjà révisé leurs cartes (la loi l'impose tous les cinq ans) n'a guère arrangé les choses. Aux yeux de la Commission, le retard le plus préoccupant concerne les plans d'action qui auraient dû être publiés... avant l'été 2008 ! A ce niveau, face aux exigences de la directive, très peu d'agglomérations - Rennes et Montpellier en font partie - sont en fait dans les clous.
En finir avec la sourde oreille
L'Ile-de-France est loin de faire exception. Fin 2012, seuls quatre PPBE y ont été réalisés par des autorités compétentes de l'agglomération parisienne (Pantin, Clichy-sous-Bois, SAN de Sénart, communauté d'agglomération Grand Paris Seine Ouest). La région a néanmoins la chance d'avoir un observatoire dénommé Bruitparif qui, même s'il manque de moyens, apporte son aide aux élus pour boucler leurs cartes et plans. Il accomplit en parallèle un travail de cartographie régionale. "Nous renforçons cet accompagnement des élus en mettant à leur disposition des outils, depuis peu une trame de rédaction du document de PPBE et bientôt un classeur de bonnes pratiques", indique Lucie Echaniz, qui y est chargée de l'accompagnement des collectivités. Des formations sont aussi prévues (une le 4 juillet prochain sur les PPBE). Et, devant l'urgence, le ministère de l'Ecologie vient de missionner l'observatoire pour faire un état des lieux complet au niveau régional. En clair, une dynamique est donc bien à l'oeuvre : parmi les 250 collectivités franciliennes, près de 100 ont réalisé ou entamé une démarche d'élaboration du PPBE. En Essonne et dans le Val-de-Marne, les cartes seront quasi intégralement bouclées d'ici la fin septembre. "Il y a des conséquences derrière ces cartes, les collectivités le savent et si elles ne vont pas jusqu'à les arrêter et délibérer officiellement sur les plans d'actions qui en découlent, c'est aussi car la période électorale approche. Par ailleurs, les collectivités n'ont pas la main sur les zones de bruit autoroutier ou ferré et il manque en leur sein des cadres territoriaux réellement spécialistes de ces questions", précise Christian Métairie, vice-président de la communauté d'agglomération du Val-de-Bièvre (Val-de-Marne). Autre problème pointé du doigt lors de ce séminaire : les collectivités qui n'ont pas la compétence voirie n'osent pas agir et s'engager dans la rédaction d'un PPBE. Pour certaines où le bruit provient surtout d'infrastructures qu'elles ne gèrent pas directement, par exemple des routes départementales, l'ensemble s'apparente à un "sac de noeuds". Autre défaut régulièrement relevé par les élus, ces cartes n'isolent pas le bruit des deux roues et ne traitent ni des activités militaires, ni du bruit de voisinage ; qui intéressent pourtant de près les habitants. En revanche, le fait qu'elles distinguent deux indices acoustiques de niveau, l'un établi sur une journée (Lden) et l'autre de nuit (Ln), est un point positif car cela met en avant le problème de la gêne nocturne. "En matière de bruit dans les politiques publiques, il y a donc un réel besoin d'éclaircissement et de vulgarisation", conclut Christian Métairie.