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Environnement - Biodiversité : le Cese interpelle les régions

Dans un avis sur la biodiversité adopté par son assemblée le 11 septembre, le Conseil économique, social et environnemental (Cese) ne se prive pas de pointer le décalage entre discours et réalité. En termes de gouvernance, il invite les régions à reprendre en main leurs prérogatives.

"Il y a un manque de mesures fortes au niveau national pour réaliser une adéquation pleinement convaincante entre les déclarations et les actes", pointent dans cet avis sur la biodiversité ses deux rapporteurs, Allain Bougrain-Dubourg et Marc Blanc. Adopté le 11 septembre, cet avis fait suite à un précédent avis rendu il y a deux ans. Depuis lors, "le Cese constate des avancées, en particulier dans la démarche et les objectifs de la stratégie nationale pour la biodiversité 2011-2020 (SNB)". Il rappelle également qu'une directive diffusée en février dernier aux services déconcentrés de l'Etat va dans le bon sens puisqu'elle fixe une feuille de route qui inclut la mise en œuvre de cette SNB et la protection des espèces et espaces naturels. Toutefois, il s'inquiète que l'application de ces priorités "revienne à des services et des établissements publics en pleine réorganisation". S'il salue par ailleurs le travail entamé par l'Observatoire national de la biodiversité pour établir une série d'indicateurs accompagnant la mise en œuvre de la SNB, il exige que ceux-ci fassent l'objet d'une publication et d'une "diffusion appropriée afin que les concitoyens puissent mesurer concrètement les résultats de leurs engagements". Au niveau international, le Cese souhaite que la France mette davantage en œuvre ses engagements dans le cadre de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (Cites). Et que le gouvernement formalise le mandat de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) et "conforte ses moyens pour animer le mécanisme national de la plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (Ipbes)". 

Manque d'homogénéité 

Si le Cese "se réjouit que les collectivités locales prennent conscience des apports de la biodiversité sur leur territoire", qu'un grand nombre de départements n'hésitent plus à protéger leurs espaces naturels sensibles (ENS) et qu'un concours national comme les Prairies fleuries rencontre un succès croissant, il pointe un manque d'homogénéité, regrette que des freins ralentissent cette dynamique et "que les moyens de l'Etat [ne soient pas] à la hauteur d'un véritable dispositif d'intégration interministérielle des enjeux de la biodiversité dans les politiques publiques". Il préconise de mettre l'accent sur l'éducation à la nature, notamment dans le panel d'outils préparant aux métiers de l'enseignement, même si ce chantier de sensibilisation dépasse bien entendu "le seul cadre de l'Education nationale". Lors du vote de l'avis, Raymond-François Le Bris, ancien préfet et directeur de l'ENA, aujourd'hui membre du Cese, a regretté le manque d'outils pour évaluer et suivre en milieu scolaire les efforts accomplis en matière d'éducation à l'environnement.

Des comités régionaux de la biodiversité

Pour le Cese, le PLU intercommunal figurant dans le volet Urbanisme du projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (Alur) est un bon outil pour "freiner la consommation excessive d'espaces naturels et agricoles". Mais en termes de gouvernance et "compte tenu de l'importance de l'ancrage territorial des politiques de conservation et de restauration de la biodiversité", le Cese estime que "c'est aux régions qu'il revient d'assurer la cohérence de cette action [mais qu'il] faudrait pour cela rationaliser les compétences entre collectivités d'une même région et articuler efficacement les instances nationales et territoriales, mais aussi les instances territoriales de différents niveaux". En clair, "seul un co-pilotage Etat-Région permettra de mobiliser et d'impliquer tous les acteurs territoriaux". Reste aussi à ce que les régions adhèrent à la SNB et échafaudent leurs propres stratégies régionales. Le Cese suggère à ce sujet qu'elles s'appuient sur les comités locaux de mise en œuvre de la trame verte et bleue (TVB), lorsqu'ils existent, afin de les élargir en comités régionaux de la biodiversité. Dans le même esprit, il considère que la future Agence française pour la biodiversité - dont les contours sont loin d'être actés mais qui aurait en théorie vocation à regrouper l'Agence des aires marines protégées (AMP), l'Etablissement des parcs nationaux de France et l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques - soit dotée d'un réel "pouvoir de coordination" et décline son action au niveau régional. Et le Cese d'insister : "Les régions constituent, en effet, le périmètre le plus rationnel pour la stratégie et la gestion de la biodiversité, même si les départements doivent rester des acteurs opérationnels". Enfin, il ajoute qu'"à l'image de ce qui se fait pour les monuments historiques", il faudrait "établir un inventaire national du patrimoine naturel de l'Etat et présenter régulièrement un bilan de gestion environnementale de ce patrimoine". "Il est, en effet, étonnant de constater que l'Etat a parfaitement identifié son patrimoine culturel mais n'a jamais fait l'évaluation globale de son patrimoine naturel".

 

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