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Habitat - Trop de parkings tuent les logements

Le nouvel adjoint à la mairie de Paris chargé du logement,Ian Brossat, vient de poser la première pierre d'un immeuble de logements privés totalement dépourvu de parking. Une exception - permise par une ordonnance publiée en octobre 2013 - qui pourrait devenir la règle dans les villes denses bien desservies en transports publics. C'est ce que souhaitait déjà François Hollande dans son discours d'Alfortville en mars 2013. Et c'est ce qu'annoncent également Sylvia Pinel et Manuel Valls dans le cadre de la politique de relance de la production de logements.

Le 17 septembre, Ian Brossat, le nouvel adjoint (PCF) à la mairie de Paris chargé du logement, a posé la première pierre d'un immeuble de logements privés, dans le 18e arrondissement de la capitale. La circonstance et l'immeuble n'ont rien d'exceptionnel et c'est pourtant une première depuis 1977. Cet immeuble neuf est en effet totalement dépourvu de... parking.

Haro sur le PLU

Depuis près de quarante ans, le plan local d'urbanisme (PLU) de la capitale fait en effet obligation à tout promoteur de construire une place de parking pour 100 m2 de logements. Le PLU offre toutefois une possibilité de dérogation pour les immeubles de moins de 2.000 m2. C'est précisément cette dérogation, poussée jusqu'au bout de la logique, qui a permis le lancement de cet immeuble.
Dans une interview au quotidien "20 minutes" du 15 septembre, Ian Brossat explique que, pour atteindre l'objectif de construction de 10.000 logements par an, la ville compte sur la modification du PLU, qui devrait intervenir en décembre 2015. Celle-ci "permettra, par exemple, d'assouplir les normes de construction de parkings, qui constituent un obstacle à la création de logements". En effet, "les normes de parkings augmentent les coûts de construction de 20 à 30%. Nous allons donc assouplir ces normes".

"Nombre de parkings sont vacants"

Dans le cas de l'immeuble du 18e arrondissement, l'absence de parking n'a pas constitué un obstacle à sa commercialisation. Selon l'adjoint au maire, "des emplacements avaient même été réservés par le promoteur, Nexity, dans un parking public voisin et ils n'ont pas trouvé preneurs". Rappelant que 50% des Parisiens ne possèdent pas de voiture, Ian Brossat a affirmé que "nombre de parkings sont vacants" et que "la RIVP, l'un de nos bailleurs sociaux, indique que 26% de ses places de parking sont vides".
La présence du promoteur Nexity dans cette opération ne doit rien au hasard. Son président, Alain Dinin, avait en effet proposé, en février dernier, un "pacte de constructibilité" aux collectivités, prévoyant divers allégements pour relancer le logement, dont l'assouplissement ou la suppression du ratio entre logements et parkings. En contrepartie, il avait affirmé que "si ces contraintes sont allégées, nous pourrions mettre en place un système d'autopartage sur tous nos immeubles de résidence" (voir notre article ci-contre du 20 février 2014).

La pression vient de haut

Même s'il s'agit de la première traduction concrète sur la ville la plus dense de France, l'annonce de l'abandon du ratio parkings/logements n'est pas vraiment une surprise, mais plutôt l'aboutissement d'un chantier de longue haleine. François Hollande en avait ainsi évoqué le principe dans son discours d'Alfortville du 21 mars 2013, consacré au logement (voir notre article ci-contre du même jour). Le chef de l'Etat évoquait alors un allégement, voire une suppression, des obligations de création de places de stationnement "dans les secteurs urbains desservis par les transports en commun". Plus récemment Sylvia Pinel, la ministre du Logement, a évoqué à nouveau la mesure en présentant en Conseil des ministres, le 25 juin dernier, un ensemble de dispositions visant à relancer la construction de logements (voir notre article ci-contre du même jour).
Et Manuel Valls a repris l'idée lors de la présentation de son plan de relance du logement, le 29 août, en estimant notamment que "les normes obligeant à construire des parkings devraient être assouplies dans les zones desservies en transports en commun" (voir notre article ci-contre du même jour). Une définition qui correspond parfaitement au cas de la capitale, mais aussi à celui d'autres grandes villes confrontées à une insuffisance de logements.

Réinventer la poudre ?

Il reste que ces annonces de Sylvia Pinel et Manuel Valls sont quelque peu surprenantes, dans la mesure où cette possibilité existe déjà depuis près d'un an. Elle a en effet été introduite dans l'ordonnance du 3 octobre 2013 relative au développement de la construction de logements (voir notre article ci-contre du 2 octobre 2013). Celle-ci insère un article nouveau dans le Code de l'urbanisme (L.123-5-1) prévoyant notamment la possibilité de "déroger en tout ou partie aux obligations de création d'aires de stationnement applicables aux logements lorsque le projet de construction de logements est situé à moins de 500 mètres d'une gare ou d'une station de transport public guidé ou de transport collectif en site propre, en tenant compte de la qualité de la desserte, de la densité urbaine ou des besoins propres au projet au regard des capacités de stationnement existantes à proximité".
Cette dérogation au règlement du plan local d'urbanisme ou du document en tenant lieu - qui doit faire l'objet d'une décision motivée - est ouverte "aux communes appartenant à une zone d'urbanisation continue de plus de 50.000 habitants figurant sur la liste prévue à l'article 232 du Code général des impôts et dans les communes de plus de 15.000 habitants en forte croissance démographique figurant sur la liste prévue au septième alinéa de l'article L.302-5 du Code de la construction et de l'habitation".

 

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