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Mobilité - Transport longue distance à bas coût : la Fnaut demande plus de régulation pour sauver le train

La Fédération nationale des associations d'usagers des transports (Fnaut) appelle les autorités organisatrices - Etat et régions - à intervenir davantage pour réguler la concurrence entre les différents modes de transport longue distance. Les trains Intercités sont aujourd'hui les plus menacés par le développement des vols low cost, le covoiturage et surtout par le transport par autocar que le projet de loi Macron veut favoriser.

Face à la concurrence des vols low cost, de l'autocar et du covoiturage, les trains Intercités sont-ils condamnés à terme ? Quelles sont les conditions requises pour relancer le service ferroviaire ? Déjà auditionnée par la commission Duron chargée de réfléchir à l'avenir des trains Intercités, la Fédération nationale des associations d'usagers des transports (Fnaut) a présenté ce 6 février ses recettes pour stopper le déclin du rail. Car il y a urgence à ses yeux. "Pour nous, le transport low cost répond à la fois aux besoins des ménages à faibles revenus et à ceux des ménages aisés qui veulent réaliser des économies sur leur budget transport pour dégager du pouvoir d'achat ailleurs. Nous n'y sommes donc pas opposés, assure Jean Sivardière, président de la Fnaut. Ce qui pose problème, c'est qu'il fragilise le chemin de fer qui doit constituer l'ossature du transport intérieur." Car si les transports low cost aérien et routier se sont à ce point développés ces dernières années, ce n'est pas uniquement en raison du facteur prix mais aussi du fait de la dégradation des relations ferroviaires causée par une exploitation défaillante et le mauvais état du réseau, pointe la Fnaut.

Covoiturage : un succès en partie lié aux lacunes du train

L'association a notamment fait réaliser une étude portant sur 25 trajets longue distance pour tenter de cerner les raisons du succès du covoiturage. L'enquête montre que si les covoitureurs-conducteurs sont assez peu sensibles à la qualité de l'offre ferroviaire, il n'en va pas de même des co-voitureurs passagers. Plus l'offre ferroviaire est faible, plus le pourcentage des voitures complètes la veille du voyage est fort : ce taux est de 40% sur Clermont-Montpellier, par exemple, et de 30% sur Lyon-Nancy, Nantes-Bordeaux mais tombe à 11% sur Paris-Nantes ou Lyon-Marseille, par exemple, en raison de la très bonne qualité de l'offre ferroviaire. Le trajet Nantes-Bordeaux, qui souffre d'une offre ferroviaire faible sur le plan quantitatif et qualitatif (3 aller-retours Intercités par jour seulement, en laissant de côté les trajets par Paris, Massy ou Saint-Pierre-des-Corps, plus longs et plus coûteux, et des retards fréquents) est particulièrement symptomatique : le covoiturage passager représente 13% des déplacements en mode collectif terrestre le jeudi et 28% le vendredi.

Les autocars en embuscade

Alors que le TGV est fortement concurrencé par l'aérien low cost, notamment sur des liaisons comme Paris-Marseille ou Paris-Genève, les autocars risquent aussi à terme de constituer une sérieuse menace pour certaines lignes Intercités, voire régionales. Depuis 2009, la loi permet aux autocaristes exploitant des liaisons internationales d'assurer des services de cabotage à condition que ce trafic intérieur ne dépasse pas la moitié du chiffre d'affaires de la ligne globale et la SNCF elle-même avec iDBUS propose une offre sur ce créneau. Mais ce qui inquiète le plus la Fnaut, c'est le projet de loi Macron, en cours de discussion au Parlement, qui propose une libéralisation totale du transport intérieur par autocar. "Nous considérons que cette libéralisation ne doit pas se faire de manière 'sauvage' mais être encadrée par l'Etat ou les régions suivant la longueur des lignes afin d'éviter un écrémage du trafic ferroviaire", souligne Jean Sivardière. Le président de la Fnaut estime qu'avant de décider cette libéralisation, il aurait fallu réaliser des études préalables pour évaluer notamment les consommations d'énergie des autocars et leurs impacts sur l'environnement.

Complémentarité des modes de transport

Selon la Fnaut, chaque mode de transport doit en effet payer ce qu'il coûte à la collectivité (coûts économiques directs et coûts écologiques et sociaux, accidents et nuisances). Ainsi, "les transporteurs routiers doivent payer les aménagements nécessaires des gares routières et des voiries, les touchers de gare, les sillons routiers et une écotaxe", détaille Jean Sivardière. Plus que de concurrence entre les différents modes de transport, la Fédération défend donc l'idée d'une complémentarité fondée sur les caractéristiques techniques, écologiques et économiques de chaque mode. Ce qui suppose selon elle davantage de régulation : pour l'avion, elle réclame la taxation du kérosène qui n'est soumis aujourd'hui ni à la TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques) ni à la TVA, et une suppression de certaines aides publiques au transport low cost ; pour le covoiturage, elle appelle l'Etat à faire respecter la réglementation en identifiant et en sanctionnant les pratiques illicites de transport de personnes et en sanctionnant les fraudes à caractère financier (montant des participations aux frais dépassant le barème fiscal kilométrique, non déclaration des recettes de covoiturage lors des trajets professionnels). La Fnaut est par contre favorable à la concurrence entre opérateurs d'un même mode dès lors que les règles du jeu sont bien posées, c'est-à-dire dans le cadre de délégations de service public, comme dans le transport urbain ou départemental. Elle estime donc que l'Etat doit "impérativement" ouvrir le rail à la concurrence pour amener la SNCF à abaisser ses coûts de production – et donc ses prix -, améliorer la qualité de ses services Intercités de jour et de nuit et conserver ainsi sa clientèle. Mais pour elle, "cette ouverture doit intervenir avant la libéralisation du transport par autocar qui doit faire l'objet d'un moratoire le temps que le rail soit remis à niveau".
 

 

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