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Transports - Gestion des gares, cabotage : deux avis de l'Araf appelés à faire jurisprudence pour les collectivités

L'Autorité de régulation des activités ferroviaires (Araf), dont les missions s'élargissent progressivement, assoit ses fonctions de gendarme du rail. Dans le différend opposant le Syndicat des transports d'Ile-de-France (Stif) et Gares & Connexions, elle a pris le 3 février une décision sur la tarification des services en gare qui devrait faire tâche d'huile dans d'autres régions. Et suite au recours de la région Paca au sujet de la ligne Milan-Marseille (Thello), le Conseil d'Etat vient de confirmer la pertinence de ses avis sur le cabotage.

L'Autorité de régulation des activités ferroviaires (Araf), voit ses missions et ses compétences s'étendre. "Elles sont exclusivement ferroviaires mais le projet de loi pour la croissance et l'activité prévoyant de les élargir à la régulation du secteur autoroutier, des tarifs de péages, en allant jusqu'à l'ouverture des lignes d'autocars infrarégionales, ces nouvelles compétences routières vont nous conduire à renforcer notre équipe d'une quarantaine de personnes", a annoncé le 3 février Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires (Araf). La transposition de la directive européenne sur l'espace ferroviaire unique venant par ailleurs de la rendre compétente sur la partie française du tunnel sous la Manche, l'Araf s'apprête à travailler en binôme avec son homologue britannique. 

Transparence dans la gestion des gares

Mais ce qui intéresse plus directement les collectivités ayant à dialoguer - et parfois maille à partir - avec Gares & Connexions, qui gère les gares de voyageurs, c'est l'effort de transparence que lui demande l'Araf. Avant tout, transparence des comptes et communication au Stif, dans le cas francilien (400 gares), des plans de surface des gares. Et plus de pondération dans la part des risques que cette branche de SNCF Mobilités estime prendre en investissant dans les activités régulées en gare, par exemple les espaces d'accueil et systèmes d'information des voyageurs. Pour tarifer ces services, elle tient en effet compte de la rémunération du capital investi, ce qui inclut par exemple la prime de risque. Le litige avec le Syndicat des transports d'Ile-de-France porte sur la méthodologie retenue par l'entreprise publique pour calculer ce coût moyen du capital investi. Un point très technique, donc, pour lequel l'Araf a estimé que la méthodologie de calcul habituellement calquée sur le secteur aéroportuaire n'a pas lieu d'être. "L'affluence est moins variable dans une grande gare que dans un aéroport relevant d'une logique de hub. Plus fixe, l'offre de transports fait l'objet d'une convention. Il y a donc moins de risques de perte de trafic, l'Araf relativise donc l'ampleur des risques supportés par l'actionnaire", explique Anne Yvrande-Billon, docteur en sciences économiques et vice-présidente de l'Araf. Alors que le taux de capitaux investis actuellement pratiqué est de 9,2 %, l'Autorité enjoint ainsi à SNCF Mobilités de pratiquer une fourchette de 5,5% à 6,9 % avant impôt. Ces trois points en moins feront donc baisser la facture pour la région. A moins que l'entreprise publique ne conteste cette décision, dans un délai d'un mois, auprès de la cour d'appel.

Le cabotage, sujet sensible

Second point intéressant les autorités organisatrices : la confirmation par le Conseil d'Etat, au travers d'une décision prise le 30 janvier dernier, de la pertinence des avis pris par l'Araf sur le cabotage (desserte intérieure du territoire français dans le cadre d'un trajet international) et donc la commercialisation des trajets entre villes françaises dans le cadre de la nouvelle liaison Marseille-Nice-Monaco-Gênes-Milan (Thello) qui a débuté en décembre en Paca. Lancée par une entreprise franco-italienne, elle inquiète cette région pour l'équilibre économique de ses TER exploités par la SNCF. L'Araf avait donné son feu vert à son exploitation, elle-même autorisée par le ministère des transports, arguant que la part prise par le cabotage dans ce nouveau service était bien conforme au droit (la part du chiffre d'affaires apporté par son biais ne dépasse pas le tiers de celui de la ligne) et ne bousculait pas l'équilibre économique du contrat de service public liant la région à la SNCF. Une bonne nouvelle donc pour l'opérateur, suspendu à cette décision avant de pouvoir offrir aux usagers la possibilité de réserver des trajets sur des trains Thello entre les neuf gares françaises présentes sur cette liaison, sachant que côté italien, l'affaire était entendue. A l'Araf, on fait valoir que cette décision peut faire jurisprudence dans le cadre du projet de loi et de libéralisation visée du transport interrégional par autocar : "Si les autorités organisatrices sont amenées à devoir réguler ce transport par autocar, alors notre méthodologie employée pour vérifier que la part prise par le cabotage sur le service et son impact sur l'équilibre économique des contrats de service public passés, dont la pertinence vient d'être confortée par cette décision du Conseil d'Etat, les intéressera", conclut l'autorité de régulation.